Mercredi sanglant au Liban-Sud : au moins douze morts dans une série de bombardements israéliens

La journée de mercredi s'est déroulée sous le signe de l'escalade au Liban-Sud. L'enchaînement d'événements a commencé dans la matinée, lorsqu'une salve de roquettes s'est abattue sur Safed, ville du nord d'Israël, faisant un mort et déclenchant une riposte israélienne sanglante, qui a coûté la vie à au moins douze personnes, tuées dans plusieurs raids, selon un bilan mis à jour jeudi matin par notre correspodnant dans la région, Mountasser Abdallah.

Dans l'après-midi, une femme syrienne et deux enfants libanais ont été tués dans le bombardement d'une maison dans la région de Bint Jbeil et un combattant du Hezbollah à Adchit, près de Nabatiyé. Une frappe dans la soirée, dans le centre de Nabatiyé, a elle tué au moins 7 membres d'une même famille et un autre combattant du parti chiite. 

Mercredi matin, des tirs de roquettes ont visé une base militaire du nord d'Israël, à Safed, en provenance du Liban, selon l'armée israélienne, qui annoncé qu'une personne avait été tuée et huit autres blessées. Plus tard dans la journée, l'armée a indiqué que la victime était une militaire de vingt ans. Selon la municipalité de Safed, un des missiles est tombé près du centre médical Ziv, selon lequel l'un des blessés est dans un « état grave », un autre dans un « état modéré » et les autres ont été « légèrement blessés ».

Aucune frappe revendiquée par le Hezbollah

Mercredi soir, cette frappe n'avait pas été revendiquée par le Hezbollah ni les autres groupes actifs le long de la frontière sud, bien que plusieurs observateurs estiment qu'elle porte la marque du Hezbollah. Le parti chiite, qui fait d'habitude état de ses tirs sur le nord d'Israël dans des communiqués publiés sur son compte Telegram, n'a revendiqué aucune frappe de toute la journée.

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La réponse aux roquettes provenant du sud du Liban ne s'est pas fait attendre. En début d'après-midi, l'armée israélienne a annoncé avoir mené une série de raids sur plusieurs villages libanais, affirmant ensuite, selon un tweet du porte-parole arabophone de l'armée israélienne, Avichay Adraee, avoir visé « des cibles associées à la force al-Radwane du Hezbollah, des bâtiments militaires, des salles de contrôle et des infrastructures terroristes, dans plusieurs régions ». La force al-Radwane est l'unité d'élite du groupe pro-iranien.

Selon des informations de notre correspondant dans le Sud, Mountasser Abdallah, se basant sur les témoignages d'habitants et des sources sécuritaires, des habitations de la périphérie de Adchit, dans le caza de Nabatiyé, la région de l'Iklim el-Touffah, les villages de Bouslaya et Sniyé dans le caza de Jezzine, Souané, dans le caza de Bint Jbeil et Chéhabiyé, à l'est de Tyr, ont été frappés par des missiles israéliens. Si des frappes ont déjà ciblé le caza de Jezzine depuis le 8 octobre, elles sont toutefois rares, cette région étant située à plusieurs dizaines de kilomètres de la frontière. 

Lourd bilan humain

Ces bombardements se sont avérés meurtriers. À Souané, deux enfants libanais, de 13 et 2 ans, et une femme de nationalité syrienne, ont perdu la vie. Leurs dépouilles ont été extraites des décombres de la maison dans laquelle ils se trouvaient, par des secouristes de l'association des scouts al-Rissala, affiliée au mouvement chiite Amal. L'aîné des deux garçons était d'ailleurs « louveteau » dans l'association, selon un tweet du ministre sortant de l'Agriculture, Abbas Hajj Hassan, proche d'Amal. Et à Adchit, c'est un combattant du Hezbollah qui a trouvé la mort dans une frappe, ayant également fait plusieurs blessés. L'attaque sur ce village a d'ailleurs provoqué un mouvement de panique, à l'origine d'un accident de la route impliquant plusieurs véhicules.

L'éditorial de Issa Goraïeb

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En soirée, une autre frappe sur le centre de Nabatiyé, sur un appartement, a tué au moins trois civils, selon une source sécuritaire citée par l'AFP. L'Agence nationale d'Information fait, elle, état de quatre tués, d'une même famille. Le parti chiite a de son côté annoncé la mort d'un de ses combattants, originaire de la ville.

« Riposte appropriée »

D'autres frappes israéliennes avaient ciblé des zones entourant les localités de Taybé (caza de Marjeyoun) et Marwahine (Bint Jbeil), sans toutefois faire de victimes. 

En réaction à ces tirs, plusieurs nouvelles salves de roquettes ont été tirées du sud du Liban, sans toutefois être revendiquées. Et le président du Conseil exécutif du Hezbollah, Hachem Safieddine, a déclaré que les bombardements israéliens qui ont fait quatre victimes au Liban-Sud, parmi lesquels deux enfants et une femme, « ne resteront pas sans réponse ». « Il y aura certainement une riposte appropriée, du niveau requis », a-t-il martelé à l’occasion de la commémoration du décès de la mère d'un « martyr » du parti. 

A l'ONU, le porte-parole du secrétaire général a de son côté estimé que l' « escalade » de la violence au Liban entre les forces israéliennes et le Hezbollah « est dangereuse et doit s'arrêter ». Stéphane Dujarric a encore relevé que les Casques bleus de la mission de l'ONU au Liban avaient noté un « déplacement des échanges de tirs entre les forces israéliennes et les groupes armés au Liban, y compris visant des zones loin de la Ligne bleue » qui sépare Israël et le Liban.

Pour leur part, les Etats-Unis ont appelé à privilégier la « voie diplomatique » pour réduire les tensions au Proche-Orient, se disant « préoccupés » par la situation au Liban.

La situation au Liban est "sérieuse mais elle n'est pas irréversible", a de son côté estimé le chef de la diplomatie française,  Stéphane Séjourné. 

« Se préparer à la guerre »

En Israël, la frappe sur Safed a provoqué une série de réactions. Le ministre Benny Gantz a notamment estimé que le Hezbollah était responsable de l'attaque, mais également le « gouvernement libanais ». Les ministres Itamar Ben Gvir et Avigdor Lieberman, connus pour leurs positions belliqueuses, ont, eux, appelé à répondre de manière virulente et à élargir les attaques israéliennes au Liban. Une option qui semble envisagée par l'armée israélienne, le chef d'état-major Herzli Halevi ayant appelé, dans la soirée, les commandants chargés de la frontière nord à « se préparer à la guerre ». 

Cette poussée de fièvre a eu lieu au lendemain d'un discours du chef du parti chiite, Hassan Nasrallah. Ce dernier avait fait monter les enchères dans le cadre des tractations pour une résolution dans le Sud, appelant le Liban officiel à « exiger plus que la (résolution onusienne) 1701 », d’autant que, selon lui, le pays est « en position de force », contrairement à Israël qui « ne doit pas sortir vainqueur ». Le leader pro-iranien ne s'était pas non plus montré inquiet d’un élargissement du conflit et avait assuré qu'autant le Hezbollah que Tel Aviv « était toujours dans le cadre des règles d'engagement ». M. Nasrallah doit s'exprimer à nouveau vendredi.