Harcèlement au Parlement européen : la droite s’oppose à une formation obligatoire pour les eurodéputés

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Un vote sur le rapport est prévu le 20 mars, mais l’eurodéputée socialiste allemande Gabriele Bischoff, membre de la commission des affaires constitutionnelles du Parlement (AFCO) et rapporteure pour ce dossier, a déclaré que la semaine dernière, les membres de droite de l’AFCO s’étaient opposés à l’idée d’introduire une formation obligatoire. [EPA-EFE/RONALD WITTEK]

Les eurodéputés conservateurs, de centre droit et d’extrême droite s’opposent à l’introduction d’une formation obligatoire sur la prévention contre le harcèlement pour les membres du Parlement européen, a déclaré à Euractiv une eurodéputée allemande impliquée dans le processus de révision des règles de l’hémicycle en la matière.

Suite à plusieurs cas de harcèlement physique et psychologique commis par des eurodéputés à l’encontre d’employés de l’institution au cours des dernières années et divulgués par la presse, le Parlement européen a lancé une réforme visant à renforcer ses procédures internes en matière de lutte contre le harcèlement.

En juillet 2023, le Bureau du Parlement européen a mis en place un  service de médiation  indépendant pour ces cas et a approuvé la mise en place d’une formation obligatoire pour les membres.

Le rapport a ensuite été présenté à la commission des Affaires constitutionnelles (AFCO) du Parlement, où il s’est heurté à des objections.

L’eurodéputée socialiste allemande Gabriele Bischoff, membre de la commission AFCO et rapporteure pour ce dossier, sur lequel un vote est prévu le 20 mars, a déclaré que les membres de droite de la commission se sont opposés à l’idée d’introduire une formation obligatoire la semaine dernière.

L’Allemand Sven Simon, eurodéputé du Parti populaire européen (PPE) et membre de la commission AFCO, a déclaré à Euractiv que « ce à quoi nous nous opposons est une procédure qui va à l’encontre des règles du Parlement », sans toutefois préciser quelle partie du règlement de l’institution serait enfreinte par la mise en place d’une formation obligatoire.

« Il est tout simplement invraisemblable que le PPE collabore une fois de plus avec des groupes politiques d’extrême droite. Une coopération étroite entre le PPE, le groupe ID [Identité et Démocratie] et le CRE [Conservateurs et Réformistes européens] a tenté de tuer le rapport », a indiqué Mme Bischoff à Euractiv.

Une autre source proche du dossier a confirmé cette information à Euractiv.

Selon la proposition, la formation des eurodéputés devrait avoir lieu dans les six premiers mois de leur mandat.

« Compte tenu des nombreux cas de harcèlement dans cette législature, nous devrions faire plus pour prévenir [le harcèlement au Parlement européen] », a déclaré l’eurodéputée socialiste.

Le Parlement européen va réformer les règles internes relatives aux plaintes pour harcèlement

Le Parlement s’apprête à durcir ses règles internes concernant le harcèlement du personnel et des fonctionnaires, alors que le régime actuel est accusé de décourager les victimes de porter plainte.

Affaires récentes

La réputation du Parlement européen a été entachée après que plusieurs cas de harcèlement de son personnel par des eurodéputés ont été divulgués dans les médias.

En mars dernier, le quotidien allemand Bild a fait état, en citant un rapport interne, d’allégations concernant l’eurodéputée allemande du PPE Karolin Braunsberger-Reinhold, accusée d’avoir harcelé sexuellement deux de ses employées au cours d’un voyage.

Interrogée par le quotidien allemand sur ces accusations, Mme Braunsberger-Reinhold a déclaré qu’elle avait «exprimé ses profonds regrets » aux deux employés.

L’eurodéputée socialiste espagnole Mónica Silvana Gonzalez a fait l’objet d’une sanction au printemps dernier pour harcèlement psychologique à l’encontre de trois assistants. Elle s’est vu interdire ses activités pendant un mois et a perdu son indemnité journalière de 338 euros.

L’eurodéputé espagnol du groupe libéral Renew Europe, José Ramón Bauzá, a été sanctionné par un blâme le 28 février pour avoir harcelé psychologiquement le personnel, ce qui constitue la sanction la plus faible possible dans de tels cas.

Avant lui, l’eurodéputée luxembourgeoise Monica Semedo, de la même famille politique, a reçu une amende de 3 380 euros pour mauvaise conduite à l’égard de son personnel.

Un autre cas a été rapporté dans les médias en avril 2023 lorsque les autorités belges ont demandé au Parlement européen de lever l’immunité de l’eurodéputé grec de gauche Alexis Georgoulis après qu’une employée de la Commission européenne qui travaillait pour lui a déposé une plainte contre lui pour harcèlement sexuel.

Le 1er mars 2024, l’eurodéputé écologiste allemand Malte Gallée a démissionné en raison d’une enquête sur son comportement en 2022. L’eurodéputé bavarois a toutefois nié avoir commis des actes répréhensibles.

Plusieurs membres du personnel, qui ont demandé à rester anonymes pour leur propre sécurité, ont critiqué la procédure interne du Parlement de lutte contre le harcèlement, la jugeant lente et problématique, l’un d’entre eux déclarant qu’elle « apporte beaucoup de stress et d’incertitudes aux victimes quant à leur avenir ».

Au cours des procédures d’évaluation interne de l’organe consultatif du Parlement, les victimes sont mises en congé ou invitées à changer de bureau jusqu’à ce qu’une décision soit prise.

Dans une résolution adoptée le 25 avril dernier, la commission des Droits de la femme et de l’Égalité des genres (FEMM) du Parlement a jugé insuffisante la procédure interne relative aux cas de harcèlement.

Les eurodéputés dénoncent le manque de protection des victimes de harcèlement au Parlement européen

Dans un projet de résolution adopté mardi (25 avril), la commission des Droits des femmes du Parlement européen a estimé que les procédures internes de l’Assemblée pour traiter les cas de harcèlement psychologique et physique étaient inadéquates.

[Édité par Anne-Sophie Gayet]

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