Parfois, une mauvaise nouvelle peut en cacher une bonne. La mauvaise est que les émissions de CO2 dans le monde ont à nouveau augmenté en 2023, selon le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), paru vendredi 1er mars. Ce petit 1,1 % de hausse paraît peu, mais il nous éloigne encore de l’objectif de baisse de 45 % d’ici à 2030 si l’on veut contenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 °C. Les chances d’y parvenir s’amenuisent sérieusement.
La bonne nouvelle est que cette hausse est assez concentrée et conjoncturelle. Elle est en grande partie due aux sécheresses spectaculaires en Inde et en Chine, qui ont conduit ces deux pays à faire tourner à plein régime leurs centrales à charbon. Elle masque des baisses aux Etats-Unis (– 4,1 %) et surtout en Europe (– 9 %). Des chutes obtenues en dépit d’une croissance économique forte aux Etats-Unis (+ 2,5 %) et modérée en Europe (+ 0,7 %).
Autrement dit, la thèse d’un possible découplage entre la croissance économique et celle des émissions de CO2 se confirme, même si elle est encore insuffisante. Et ce n’est pas parce que les émissions auraient été exportées vers l’industrie chinoise. Par rapport à 2022, la dégringolade industrielle européenne, notamment en Allemagne, n’explique que 30 % de la baisse des émissions.
Le solaire, source d’électricité la moins chère
Le vrai changement est dû à l’élan spectaculaire des énergies renouvelables. Désormais, la production d’électricité éolienne est supérieure en Europe à celle produite par le gaz (– 15 %) et le charbon (– 27 %), ainsi que par le regain de production nucléaire et hydroélectrique par rapport à l’annus horribilis 2022. Du côté des Etats-Unis, l’amélioration obtenue provient en grande partie du basculement de la production électrique du charbon vers le gaz du fait de ses prix attractifs.
Sur le plan mondial, cette conversion aux énergies bas carbone se confirme largement. Toujours selon l’AIE, 85 % des nouvelles centrales électriques construites en 2023 étaient solaires, éoliennes ou nucléaires. Pour une raison simple : le solaire est aujourd’hui la source d’électricité la moins chère.
La Chine, d’ailleurs, en installe sur son territoire plus que le reste de la planète réunie. Le pays est leader de quasiment toutes les technologies bas carbone, du panneau solaire à la voiture électrique, en passant par les pompes à chaleur et le nucléaire. C’est la relance de l’économie par l’industrie qui grève en grande partie les efforts chinois. Nous ne sommes qu’au début du long chemin vers le découplage énergétique.