Accéder au contenu principal
Extrême droite en Europe

Le parti Solution grecque, fer de lance de l'extrême droite pour les élections européennes

À deux mois des élections européennes, l'extrême droite grecque continue sa progression, alors que les trois partis ultranationalistes ont déjà obtenu un score record lors des législatives de juin dernier. Le parti Solution grecque – qui ne compte aujourd'hui qu'un seul député à Strasbourg – ne fait que grimper dans les sondages.

Le leader du parti nationaliste "Solution grecque", Kyriakos Velopoulos, sort de l'isoloir après avoir voté pour les élections législatives, le 25 juin 2023 à Thessalonique.
Le leader du parti nationaliste "Solution grecque", Kyriakos Velopoulos, sort de l'isoloir après avoir voté pour les élections législatives, le 25 juin 2023 à Thessalonique. © Sakis Mitrolidis, AFP
Publicité

L'extrême droite grecque est de nouveau bien visible. Alors que les partis Solution grecque, les Spartiates et Niki – construits sur les cendres du parti néonazi Aube dorée – ont déjà marqué le retour des idéaux ultranationalistes au Parlement grec (la Vouli) en juin 2023, les derniers sondages indiquent que les intentions de vote leur sont toujours plus favorables pour les élections européennes de juin prochain. Des estimations qui profitent notamment au parti Solution grecque.

Arrivé troisième lors des législatives, le parti de Kyriákos Velópoulos, créé en 2016, a déjà conquis 12 sièges à la Vouli, et semble poursuivre son ascension vers Strasbourg, porté par les deux autres partis d'extrême droite. À eux trois, ils avaient recueilli 12,77 % des suffrages lors des élections législatives.

Pour les européennes, le dernier sondage réalisé début avril par Palmos Analysis pour le journal Free Press plaçait Solution grecque à la quatrième position, avec près de 11 % des intentions de vote, derrière le parti au gouvernement Nouvelle Démocratie (31,3 %), le parti de gauche Syriza (14,1 %) et le Pasok de centre-gauche (13 %).

Mais certains observateurs prédisent un sort plus favorable encore à Solution grecque, à l'instar de Georgios Samaras, professeur adjoint de politique publique au King's College de Londres, et spécialiste de l'extrême droite européenne. Selon lui, le parti de Kyriákos Velópoulos pourrait même "se hisser à la deuxième place".

Moins de cinq ans après l’effondrement électoral d’Aube dorée, la Grèce connait une résurgence notable de l’extrême droite, qui attire même certains électeurs de droite déçus par la politique du Premier ministre Kyriákos Mitsotákis.

À lire aussiAube dorée, un parti violent et xénophobe au Parlement

Ultranationalistes, ultrareligieux, ultraconservateurs

Tous trois considérés comme étant à l'extrême droite de l'échiquier politique, Solution grecque, les Spartiates et Niki n'en sont pas moins très différents, explique Georgios Samaras, qui insiste sur le caractère "mainstream" ("grand public") de Solution grecque, entretenu par la figure de son leader, Kyriákos Velópoulos. Un leader "qui utilise des mouvements venus de la base de la société et les organisations à l'échelle locale" pour ancrer sa présence dans l'espace politique.

Solution grecque, comme l'ensemble des partis situés très à droite, "se déconnecte des étiquettes qui tendent à les classifier comme partis d''extrême droite' ou de 'droite radicale'", analyse le politologue, qui a effectué une thèse sur la montée du parti néonazi grec Aube dorée et son impact sur le comportement électoral. Il ne fait pourtant aucun doute, dit-il, que Solution grecque, parti populiste, soit bel et bien sur cette ligne, "adoptant des perspectives ultraconservatrices et ultrareligieuses".

Proche de l'Église orthodoxe, le parti s'est notamment prononcé contre les politiques progressistes, diffusant une rhétorique homophobe lors des discussions sur le mariage homosexuel, adopté en février dernier.

S'inspirant de l'ex-président américain Donald Trump, Kyriákos Velópoulos utilise le slogan "Make Europe Christian again" ("Revenons à une Europe chrétienne") et fait campagne sur le thème du rejet de l'immigration. Il entend notamment construire "un mur de six mètres de haut" à la frontière avec la Turquie, rétablir la peine de mort, et expulser tous les "migrants illégaux".

Plus loin dans les sondages, le parti des Spartiates (près de 4 % d'intentions de vote pour les européennes), créé en 2017, entretient quant à lui des liens étroits avec le parti néonazi Aube dorée. Il a notamment gagné en popularité dans les sondages durant les législatives de juin dernier, après qu'Ilías Kassidiáris, ex-leader et porte-parole d'Aube dorée, lui a apporté son soutien et exhorté ses partisans à voter pour lui.

L'ultranationaliste, condamné lors du procès qui a statué qu'Aube dorée était une "organisation criminelle", est aujourd'hui l'un des premiers soutiens des Spartiates, voire son "leader naturel", affirme Georgios Samaras. Certaines sources qualifient même les Spartiates de "cheval de Troie" d'Ilías Kassidiáris, son nouveau parti – les Hellènes – ayant été empêché de participer aux dernières législatives par la Cour suprême.

Le parti Niki ("Victoire"), crédité de 3 % des intentions de vote pour les européennes, a quant à lui construit sa narration sur un discours antivax, homophobe, xénophobe et anti-avortement.

De manière générale, Georgios Samaras note la tendance des instituts de sondage grecs à sous-estimer la popularité des partis d'extrême droite aux élections, notamment en raison du phénomène des "shy voters" (littéralement "électeurs timides" : ceux qui n'osent pas dire aux sondeurs pour qui ils votent réellement). Ce phénomène pourrait expliquer un résultat en réalité bien supérieur à ce qui se dessine dans les sondages.

Un réservoir d'électeurs déçus de la droite

"Il apparaît statistiquement que Solution grecque soit le seul parti à gagner du terrain et à augmenter ses pourcentages à un tel rythme", abonde Georgios Samaras. Alors qu'il n'avait recueilli que 4,45 % lors des élections législatives de juin 2023, le parti ultraconservateur dispose, à deux mois des européennes, de près de 11 % des intentions de vote. L'expert précise qu'"une partie des soutiens de Solution grecque provient aussi d'un réservoir d'électeurs de la droite dure de Nouvelle Démocratie qui ont été déçus" par la politique du parti au gouvernement.

"La montée de Velópoulos dans les sondages semble être enracinée dans trois développements essentiels", écrivait début avril le spécialiste dans un article d'opinion publié sur le site Kathimerini. "Les Spartiates sont en phase de dissolution interne, Niki a adopté une approche nettement plus discrète depuis qu'il a obtenu ses premiers sièges au Parlement grec, et plus important encore : Nouvelle Démocratie est aux prises avec des dissensions internes – une tendance mise en évidence par Metron Analysis dans un sondage publié mi-mars."

Qui plus est, le gouvernement Mitsotákis a fait face à une motion de censure déposée fin mars au Parlement par cinq partis d'opposition, un an après l'accident ferroviaire le plus meurtrier de l'histoire du pays, à Tempé, après des allégations selon lesquelles des enregistrements audio liés à la collision auraient été falsifiés avant d'être divulgués aux médias.

Lors du débat, Kyriákos Velópoulos – dont le parti a soutenu la motion de censure, qui a finalement été rejetée – a prononcé un discours remarqué, accusant le gouvernement de ne pas vouloir que la vérité sur Tempé soit révélée. "Le gouvernement a échoué à trouver le bon message [sur la catastrophe de Tempé] et Solution grecque capitalise sur cela", précisait Georgios Samaras dans un entretien à Kathimerini.

Dans le nord de la Grèce, la montée en puissance de Solution grecque est telle que dans de nombreuses localités, le parti d'extrême droite occupe déjà la deuxième place après le parti de droite Nouvelle Démocratie. Une tendance qui, selon Georgios Samaras, pourrait se généraliser lors du scrutin européen. "Ils pourraient en effet se hisser à la deuxième place", prédit-il, ajoutant qu'obtenir plusieurs sièges au Parlement européen (sur les 21 alloués à la Grèce) contribuerait à donner encore davantage de poids au parti à l'échelle nationale.

À Strasbourg, l'unique député Solution grecque siégeant à ce jour, Emmanouíl Frágkos, fait partie du groupe des Conservateurs et Réformistes européens (CRE), auquel appartient également le député français Nicolas Bay (Reconquête) et qui rassemble plusieurs députés des partis d'extrême droite italien Fratelli d'Italia et espagnol Vox. Marqué par "la présence significative de politiciens conservateurs et traditionnels" selon Georgios Samaras, ce groupe, qui occupe 66 sièges sur 705, comprend principalement "d'anciennes factions eurosceptiques qui ont évolué vers la droite".

À lire aussiÉlections européennes : les enjeux d'un scrutin à haut risque

La montée de Solution grecque est loin d'être un cas isolé et reflète des tendances plus larges à l'œuvre au sein de l’extrême droite à travers l’Europe. Pays-Bas, Italie, Hongrie, Finlande, Bulgarie... Les sondages donnent l’extrême droite gagnante dans neuf États membres de l’Union européenne, et en deuxième ou troisième position dans neuf autres.

Le résumé de la semaineFrance 24 vous propose de revenir sur les actualités qui ont marqué la semaine

Emportez l'actualité internationale partout avec vous ! Téléchargez l'application France 24

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.