Une odeur de cannabis trop persistante, voire écœurante, a fait l’objet en 2020 d’une plainte déposée à Washington par une Américaine de 76 ans contre son voisin, de trois ans son cadet. “Je ne suis pas Snoop Dogg”, s’est défendu l’intéressé lors de son procès, insistant sur les douleurs et les insomnies qui motivaient, selon lui, sa consommation de cannabis. Un argument qui n’a pas convaincu le juge : l’homme s’est vu interdire de fumer à moins de quelques mètres de chez sa voisine, et donc y compris chez lui.

Cette affaire n’a rien d’un cas isolé, alors que les villes américaines sont traversées par une vague de légalisation du cannabis récréatif, observe Bloomberg CityLab, un site du groupe Bloomberg dévolu aux thématiques urbaines et urbanistiques.

À New York, par exemple, le boom des boutiques de cannabis se fait bien sentir. Trop ? Depuis mars 2021, la consommation est autorisée “partout où l’on peut allumer une cigarette”, explique Bloomberg CityLab. “On dirait qu’aujourd’hui tout le monde fume des joints”, a déclaré en 2022 Eric Adams, le maire démocrate de la ville, cité par le média. “Beaucoup de touristes se plaignent de l’odeur de cannabis omniprésente à Times Square”, indique ainsi Tom Harris, président de l’association Times Square Alliance.

Des considérations politiques

Bloomberg CityLab s’interroge sur la manière dont la consommation de cannabis bouleverse les habitudes de vie en communauté. Car au-delà des considérations de santé, de sécurité, et des traditionnels débats sur le bien-fondé de la légalisation de cette consommation, le site américain fait apparaître un aspect bien plus trivial de la chose.

“Une question épineuse se répand dans la sphère de la politique urbaine : comment traiter le problème de l’odeur ?”

Les règles varient selon les États et elles ont leur importance, selon par exemple que la consommation soit autorisée seulement à son domicile ou dans la rue, car “beaucoup de gens ne supportent pas que l’espace public sente de plus en plus le cannabis”, insiste le média.

Le dégoût inspiré par l’odeur âcre de la fumée de cannabis peut néanmoins être entremêlé de considérations politiques, rappelle Bloomberg CityLab, “avec des voix conservatrices soufflant que l’odeur de cette substance jusqu’ici illégale est une émanation du désordre et de la criminalité qui règnent dans les villes gouvernées par la gauche”. Un sénateur républicain a ainsi déposé à l’été 2023 un projet de loi contre toute forme de consommation de cannabis dans l’espace public, et plusieurs petites villes américaines en ont interdit la pratique.

Mais le problème des odeurs en ville n’est pas nouveau, nuance Bloomberg CityLab. “Au XIXsiècle, les New-Yorkais vivaient avec l’odeur des abattoirs et des usines à gaz qui se trouvaient dans leur rue, et celle que dégageaient quelque 200 000 chevaux.” Tout cela pourrait-il finalement être résumé à une question d’habitudes ? “L’odeur de cannabis va juste devenir l’une de celles que l’on sent dans une ville.”