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MeToo à l'hôpital : "Tout le monde sait", d'anciennes internes en médecine victimes d'agressions sexuelles témoignent

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  • France Bleu

Après les accusations de harcèlement sexuel contre l'urgentiste Patrick Pelloux, la parole se libère dans le monde médical autour des violences sexistes et sexuelles à l'hôpital. D'anciennes internes de médecine, victimes d'agressions ou de comportements sexistes, témoignent.

Huit femmes médecins sur dix ont été victimes de comportements sexistes. Huit femmes médecins sur dix ont été victimes de comportements sexistes.
Huit femmes médecins sur dix ont été victimes de comportements sexistes. © Getty - Tempura

Alors que l'urgentiste Patrick Pelloux est accusé de harcèlement sexuel et moral, la parole se libère à l'hôpital sur les violences sexistes et sexuelles. D'anciennes internes en médecine témoignent ce lundi sur franceinfo d'agressions subies, à l'instar de Marie. Il y a quelques années, elle fait son stage d'interne dans un hôpital psychiatrique d'Île-de-France, qu'elle préfère ne pas citer.

À l'époque, elle démarre tout juste son premier semestre quand elle est agressée sexuellement par un médecin psychiatre. "Dès les premières semaines, un médecin a commencé à me faire des remarques assez malaisantes de type : 'Très sexy, tes petites bottes de cavalière'. Un jour, il a demandé à la secrétaire de me convoquer dans son bureau. Je suis rentrée et tout de suite, il a fermé la porte à clefs. Il m'a plaquée contre le mur, il m'a touché les seins. J'étais sidérée. Je suis sortie en courant du bureau et je suis allée me réfugier dans le bureau des secrétaires. Elles ont vu que j'étais en état de choc. Je leur ai expliqué ce qui s'était passé et elles m'ont dit : 'Ne t'inquiète pas, c'est comme ça'. En gros, 'c'est de la blague'".

Très vite, Marie en parle à son chef de service, qui étouffe l'affaire. "J'ai eu du mal à terminer mon stage, car j'avais beaucoup de colère. Je ne comprenais pas pourquoi je n'étais pas entendue. Ce qui est terrible, c'est que tout le monde sait. On a beau signaler les comportements, on est rarement protégées par l'institution, voire parfois on est sanctionnées, on est mises au placard". Marie n'a pas souhaité porter plainte pour ne pas porter préjudice à sa future carrière de médecin.

"Bien sûr, il est resté à son poste"

Au-delà des agressions, les remarques sexistes et les comportements inappropriés sont chose courante. Au cabinet d'une médecin généraliste de Seine-et-Marne, Laure en a fait les frais. Jeune étudiante à la faculté de Paris-VI, elle doit y faire son stage. Mais dès le début, le médecin lui fait des réflexions sexistes. Il a des gestes déplacés, des accès de colère pour l'humilier devant les patients. L'atmosphère est toxique. L'étudiante a beau alerter la fac, là encore l'affaire est glissée sous le tapis.

"J'avais appelé l'interne du semestre précédent qui m'avait dit qu'elle avait beaucoup souffert pendant le stage et qu'elle avait fait une dépression", se souvient Laure. "J'en ai rapidement parlé à a fac qui a accepté que je n'aille plus chez ce maître de stage, tout en me disant : 'Bon, il a sûrement eu un coup de cœur pour vous'. J'étais écœurée. J'avais mis un commentaire sur le site de la fac qui a été effacé par la faculté. Il n'y a pas assez de maîtres de stage en médecin générale et donc bien sûr, il est resté à son poste".

Huit femmes médecins sur dix victimes

L'an passé, huit femmes médecins sur dix affirmaient avoir été victimes de comportements sexistes, 30% de ces femmes ont déclaré avoir subi des gestes inappropriés ou des attouchements, 17 % des agressions sexuelles, selon les chiffres de l'association "Donner des Elles à la santé".

"Ce qui fait encore plus peur, c'est qu'elles n'en parlent pas", se désole sa présidente, Marie-France Olieric, chef de service en gynécologie à Metz. "Quand on les interroge, moins de 30% déclarent en avoir parlé au sein de l'hôpital. Quand on leur demande pourquoi elles n'en ont pas parlé, soit elles n'avaient pas conscience que c'était anormal, soit elles avaient l'impression qu'il ne se passerait rien. Peut-être que le MeToo hôpital, c'est ce qu'il fallait pour que ça bouge".

D'autant que les mentalités sont en train de changer avec les nouvelles générations, assure Camille Shadilly, trésorière de l'intersyndicale des internes : "La génération 20-30 ans qui arrive à l'hôpital, en tant que médecin ou autre, la mentalité change. Les langues se délient. Certains actes qui étaient considérés par certains comme normaux ou banals, maintenant on les dénonce".

Le ministère de la Santé a promis une réponse globale et ferme. Aucun écart ne doit être toléré, a prévenu Frédéric Valletoux. Une réunion aura lieu d'ici la fin du mois avec des associations, des employeurs et des professionnels de santé.

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