Canicule au Mali : "la glace coûte maintenant plus cher que le pain et le lait"

Fatoumata Sinaba produit et vend des sachets de glace

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Légende image, Fatoumata Sinaba produit et vend des sachets de glace aux familles voisines pour l'Iftar, le repas traditionnel de rupture du jeûne pendant le Ramadan, à Bamako.
  • Author, Chérif Ousman MBARDOUNKA & Priyanka Sippy
  • Role, BBC Afrique & BBC Africa

Du 1er au 5 avril, le Mali et le Burkina Faso ont connu une vague de chaleur exceptionnelle, autant par sa durée que par son intensité.

Selon les scientifiques du réseau World Weather Attribution (WWA), cette vague de chaleur meurtrière qui a frappé le Sahel début avril est liée au changement climatique "d'origine humaine".

Au Mali, des températures supérieures à 45°C ont été à l'origine de la mort de plus de 100 personnes.

Les effets des chaleurs d'avril au Mali, qui a connu un pic à 48,5°C, ont été exacerbés par les coupures de courant. Le Mali vit en effet, au rythme des coupures d'électricité à cause de la vétusté de ses centrales. Cela limite l'usage des ventilateurs et climatiseurs, et affecte le fonctionnement des services de santé.

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La glace, un produit de luxe

Un homme transportant un sac de glace sur la tête

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Légende image, Les populations achètent des glaces pour se rafraîchir.

Pour faire face à ses pics de chaleur, les populations achètent des glaces pour se rafraîchir.

Le coût de la glace a triplé dans certains quartiers de la capitale, Bamako, en raison de la canicule et de la grave crise de l'électricité.

Dans une commune tranquille de Bamako, la capitale du Mali, Fatouma Yattara, 15 ans, s'apprête à acheter de la glace au vendeur local parce qu'il fait très chaud.

"Les gens ont besoin de boire de l'eau fraîche au moins. Dans certains endroits, c'est 100 francs, 300, 500, vous savez, c'est trop cher.", s’exclame-Fatouma

Mais pour beaucoup, utiliser de la glace pour se rafraîchir n'est plus une option.

Assitan Traoré vit à Magnambougou. Elle affirme que le coût de la glace a triplé dans certains endroits. Elle coûte maintenant plus cher que le pain et le lait.

« Les vendeurs nous apportent de la glace du camp militaire et nous la revendent à 300 francs l'unité. Nous n'avons presque jamais d'électricité à Magnambougou. Donc, finalement, on n'a pas le choix. », nous explique Assitan

Des délestages réguliers

Des élèves assistent aux cours du soir grâce à un lampadaire solaire mobile

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Légende image, Des élèves assistent aux cours du soir grâce à un lampadaire solaire mobile appelé par les habitants "Foroba Yelen", en langue bambara, dans le village de Sanogola, au nord-est de Bamako.

De graves coupures d'électricité ont empêché les gens d'utiliser leur réfrigérateur, ce qui a eu pour effet de raréfier la glace et de faire grimper les prix.

Les coupures de courant constantes rendent également difficile le stockage de la nourriture.

Traoré Nana Konate vit dans la commune de Kati à Bamako. Elle dit qu'elle est privée d'électricité depuis 10 heures.

« En ce moment, nous ne pouvons pas stocker de nourriture parce qu'il y a trop de coupures d'électricité. Alors, la nourriture se dégrade et il faut la jeter. Il arrive souvent que nous soyons privés d'électricité pendant 24 heures. On ne peut même pas dormir à cause de la chaleur. », se plaint Traoré Nana.

Pour se soulager des températures caniculaires, certains essaient de s'asperger d'eau. C'est le cas de Soumalia Maiga, qui vit à Bamako.

Il prend une petite bouilloire en métal et se verse de l'eau sur la tête. « C'est insupportable pour moi, vu mon état de santé, parce que je souffre de vertiges. Je me verse de l'eau toute la journée pour survivre. Nous souffrons. On souffre vraiment. »

Une chaleur meurtrière

Des patients se rétablissent dans un service pour hommes

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Légende image, La plupart de ces patients arrivaient déshydratés, les principaux symptômes étant la toux et l'encombrement des bronches.

Plus de 100 personnes sont mortes de causes liées à la chaleur depuis le début de la canicule en mars. Le professeur Yakouba Toloba travaille à l'hôpital universitaire de Bamako où ils enregistrent une quinzaine d'hospitalisations par jour. Selon le professeur Yakouba, dans l'ensemble du pays, cela dépassait les centaines. « La plupart de ces patients arrivaient déshydratés, les principaux symptômes étant la toux et l'encombrement des bronches. », dit-il.

De nombreux pays d'Afrique de l'Ouest ont connu des vagues de chaleur record que les scientifiques attribuent au changement climatique.

De retour à Bamako, les vendeurs locaux continuent de remplir leurs réfrigérateurs d'eau alors que les températures devraient rester supérieures à 40 degrés pendant les prochaines semaines. Pour les Maliens, il s'agit pour l'instant d'une nouvelle normalité.