Le système d'asile britannique est engorgé depuis plusieurs années. Crédit : Picture alliance
Le système d'asile britannique est engorgé depuis plusieurs années. Crédit : Picture alliance

Au Royaume-Uni, plus de 200 000 dossiers d’asile sont encore en cours de traitement. Parmi eux, 138 000 attendent une réponse à leur première demande d’asile. Un chiffre record depuis le début des statistiques en 2011. L'an dernier, le premier pays de nationalité des demandeurs d’asile était l’Afghanistan, suivi par l’Iran et le Pakistan.

C’est un record depuis que le Royaume-Uni a commencé à compiler les statistiques sur l’asile en 2011. Un récent rapport parlementaire britannique révèle que 215 500 demandeurs d’asile sont en attente d’une réponse à leur dossier d’asile sur le sol anglais, selon un bilan s’arrêtant en juin 2023. Un chiffre qui a "plus que doublé" par rapport à 2015, notent les auteurs.

Parmi ces dossiers, 138 000 attendaient une première réponse à leur demande de protection.

"112 000 cas résolus" fin 2023

Le Premier ministre conservateur Rishi Sunak, qui a fait de la lutte contre l’immigration irrégulière sa priorité, avait promis fin 2022 de désengorger le système d’asile britannique en résorbant le retard dans les décisions.

En début d’année, le chef du gouvernement s’était attiré les foudres d’une partie de l’opposition et de certaines ONG. Il avait affirmé que ses services étaient parvenus à effacer l’arriéré dans les dossiers d’asile avec "112 000 cas résolus" fin 2023.

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Si l'opposition et les associations ne réfutent pas ce chiffre, elles contestent cependant la manière dont les autorités ont géré cet arriéré. Les opposants accusent le Premier ministre de "truquer" les chiffres.


Des migrants devant le centre d'hébergement de Napier, dans le sud-est de l'Angleterre. Crédit : Picture alliance
Des migrants devant le centre d'hébergement de Napier, dans le sud-est de l'Angleterre. Crédit : Picture alliance


De nouvelles dispositions permettent de retirer une demande pour des motifs jugés contestables par les associations. Une personne qui n’est pas en mesure de remplir correctement le questionnaire d’asile, qui ne se présente pas à des entretiens ou qui se trompe dans son adresse peut voir sa demande retirée, même si les autorités n’ont pas pu entrer en contact avec elle.

Une mesure prise dans le but de réduire cet arriéré, avait indiqué en janvier une source anonyme au quotidien The Guardian. Au total, 31% des dossiers ont été effacés du décompte final car classés comme "non procéduraux", faisant ainsi baisser les statistiques.

Expulsions vers le Rwanda

Ces dernières années, le gouvernement conservateur multiplie les dispositifs pour tenter de réduire les arrivées, en particulier de migrants illégaux susceptibles de demander l'asile dans le pays.

Son projet phare d'expulsion des demandeurs d’asile arrivés de manière irrégulière dans le pays a finalement été adopté dans la nuit de lundi 22 à mardi 23 avril par le Parlement. Annoncée il y a deux ans par le gouvernement de Boris Johnson, cette nouvelle loi permet à Londres d’externaliser son système d’asile, et de se défausser de ses responsabilités selon l'ONU.

Désormais, les migrants ne pourront plus déposer un dossier de protection au Royaume-Uni, ce sont les autorités rwandaises qui seront responsables de leur demande.

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Le texte est largement contesté par les ONG et les instances internationales. Ce projet est une "honte nationale" et il "laissera une tache sur la réputation morale de ce pays", a réagi mardi côté Amnesty International. Dans un autre communiqué commun, Amnesty, Freedom from Torture et Liberty, estiment ainsi que le texte constitue "une menace significative pour l'Etat de droit".

Le Haut-Commissaire aux droits de l'Homme, Volker Türk, et son homologue en charge des réfugiés, Filippo Grandi, ont appelé mardi le gouvernement "à prendre plutôt des mesures pratiques pour lutter contre les flux irréguliers de réfugiés et de migrants, sur la base de la coopération internationale et du respect du droit international des droits de l'Homme". Les Nations unies ont ainsi demandé à Londres de "reconsidérer son plan".

Les Afghans, première nationalité des demandeurs d’asile

Alors que pendant longtemps l'essentiel des demandeurs d'asile provenait du Proche-Orient --notamment de Syrie et d'Iran--, l'Asie est devenue en 2023 la première région d'origine et l'Afghanistan le premier pays d'origine. Viennent ensuite l'Iran, le Pakistan, l'Inde et le Bangladesh.


Des migrants secourus par les forces britanniques dans la Manche, le 23 avril 2024. Crédit : Picture alliance
Des migrants secourus par les forces britanniques dans la Manche, le 23 avril 2024. Crédit : Picture alliance


Après un bond en 2002 (plus de 84 000), le nombre de demandes avait chuté fortement jusqu'au début des années 2010 mais est depuis reparti à la hausse avec les répercussions de la guerre en Syrie et d'autres conflits ou crises de par le monde.

En 2023, le Royaume-Uni a enregistré 67 337 demandes d'asile, concernant plus de 84 000 personnes (une demande pouvant concerner plusieurs personnes en même temps).

Mais le pays ne se classe qu’à la 18e place des États européens accueillant le plus de demandeurs d’asile par rapport à sa population. En 2022, le Royaume-Uni comptait 13 demandes d'asile pour 10 000 habitants, largement derrière des pays comme Chypre, l'Autriche ou le Luxembourg et encore après l'Allemagne (9e), l'Espagne (12e) ou la France (13e).

 

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