Des policiers de la brigade canine inspectent le sous-sol d'un immeuble, dans le cadre de "l'opération de nettoyage XXL" lancée simultanément dans plusieurs villes de France pour lutter contre le trafic de drogue, le 25 mars 2024 à Chenove, en Côte d'Or

Des policiers de la brigade canine inspectent le sous-sol d'un immeuble, dans le cadre de "l'opération de nettoyage XXL" lancée simultanément dans plusieurs villes de France pour lutter contre le trafic de drogue, le 25 mars 2024 à Chenove, en Côte d'Or

afp.com/ARNAUD FINISTRE

Le constat est cinglant. La commission d’enquête du Sénat sur le narcotrafic a jugé, mardi 14 mai, que le plan antidrogue que le gouvernement doit présenter prochainement était "famélique" et n’était "pas à la hauteur des enjeux".

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Lors d’une conférence de presse, le président de la commission, Jérôme Durain, a expliqué avoir eu accès au nouveau plan du gouvernement et a estimé qu’il était "en deçà" du précédent plan.

La création d'un parquet national

La commission d'enquête sénatoriale sur le narcotrafic en France a proposé mardi la création d'un parquet national antistupéfiants (Pnast) et de faire de l'Office antistupéfiants (Ofast) une "DEA à la française", sur le modèle de l'agence antidrogue américaine, en lui donnant pleine autorité sur les services de terrain.

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"Ce nouveau parquet permettra de spécialiser et d'incarner la lutte contre le narcotrafic (...) et nous avons l'ambition de faire de l'Ofast une DEA à la française. Cela implique une véritable autorité sur les enquêtes et les moyens" alloués à la lutte, ont annoncé en conférence de presse les sénateurs Jérôme Durain (PS) et Etienne Blanc (LR), président et rapporteur de la commission d'enquête. Au total, la commission a présenté 35 propositions pour tenter de lutter contre le trafic de drogue.

Une menace "directe pour l'intérêt de la nation"

Jérôme Durain a jugé que le narcotrafic constituait "une menace directe pour l'intérêt de la nation" et ce "nouveau parquet permettra de spécialiser et d'incarner la lutte contre le narcotrafic dans la sphère judiciaire".

"Corollaire de cette organisation, côté répressif, il faut renforcer l'Ofast créé en 2019, cheffe de file de la lutte antistup mais qui aujourd'hui ne l'est qu'en titre", a poursuivi le président de la commission. "Nous avons l'ambition, a-t-il dit, de faire de l'ofast une DEA à la française. Cela implique une véritable autorité sur les enquêtes et des moyens à la lutte."

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Dans son rapport, la commission s'est montré critique sur le bilan des opérations "places nettes" et "places nettes XXL" au regarde des moyens considérables déployés. "Elles sont utiles mais les résultats sont modestes." La commission a insisté sur l'importance de taper les trafiquants au porte-monnaie. Etienne Blanc a rappelé que le chiffre d'affaires du trafic de drogue en France représentait "entre trois et six milliards d'euros" par an. Mais, a-t-il ajouté, seulement 100 millions d'euros sont saisis". "C'est nettement insuffisant." Sur ce volet, la commission suggère de rendre "systématiques les enquêtes patrimoniales dans toutes les enquêtes". Elle propose en outre que "les commerces de façade" qui servent à blanchir l'argent de la drogue fassent "l'objet de fermetures administratives".

Autre proposition: la création d'une "injonction pour richesse inexpliquée" quand "un réseau tombe". Il faut demander "aux trafiquants comment ils ont constitué leurs avoirs (...) et s'ils n'y parviennent pas, ils s'exposent à la saisie ou la confiscation", a développé Étienne Blanc.

Enfin, les deux sénateurs ont insisté sur la lutte contre la corruption, qui prend la forme par exemple de la consultation de fichiers de police, d'achat de services auprès des dockers, etc. "Il est temps de réagir avant de connaître le même sort que les pays voisins, a estimé Jérôme Durain, pour qui "le risque est immense." "Il n'y a pas de corruption de basse intensité."