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Françoise Hardy, une vie de mélancolie (1944-2024)

Françoise Hardy, le 1er décembre 2016
Françoise Hardy, le 1er décembre 2016
© Maxppp - Olivier Lejeune

Françoise Hardy est décédée à l’âge de 80 ans. Icône des années yéyé, la chanteuse avait débuté sa carrière dans les années 1960, marquée par la mélancolie. Elle a signé une trentaine de disques et des collaborations avec Gainsbourg, Berger ou Daho, et quelques livres et rôles au cinéma.

L'interprète du Temps de l'amour, de Comment te dire adieu ou de Partir quand même est décédée. Son fils, Thomas Dutronc, l'a annoncé ce mardi 11 juin dans la soirée sur Instagram. Auteure, compositrice et interprète, celle qui était née à Paris le 17 janvier 1944 est devenue une figure des années 60 et des yéyés avec son tube international Tous les garçons et les filles, avant une carrière marquée par la mélancolie. En juin 2021, sur nos ondes, elle se décrivait comme "quelqu'un de particulièrement sentimental qui fait passer l'autre avant tout à partir du moment où je suis amoureuse".

Après un cancer du système lymphatique puis un cancer du pharynx, Françoise Hardy avait annoncé en 2019 à RTL qu'elle n'était "pas sûre d'arriver à chanter à nouveau, ni même d'en avoir envie". Férue d'astrologie et de psychologie, elle avait au printemps 2021 fustigé l'"inhumanité" de la France en matière d'euthanasie.

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À écouter

Mélancolie yéyé

La Série musicale

29 min

Coup de foudre pour le rock’n’roll

Sa passion pour la musique commence à l’adolescence. Françoise Hardy, élevée avec sa sœur par sa mère (son père, peu présent et marié à une autre femme, ne les reconnaîtra qu’à la fin de sa vie), écoute la radio anglaise et découvre le rock’n’roll. C’est le coup de foudre racontait-elle à Hélène Hazéra sur France Culture en 2001 : "Le déclic s’est produit quand je suis tombée sur une station anglaise, j’ai eu un coup de foudre pour cette musique que je ne connaissais pas et qui était du rock, du country rock. Du jour au lendemain, c’est devenu toute ma vie !" Un style musical qui lui donne envie d’écrire. Au point qu’une fois son Bac en poche, elle demande comme cadeau à son père une guitare. "C’était pour essayer de fredonner ces chansons qui me plaisaient tant (…). C’était ma joie d’essayer de composer des musiquettes sur trois accords."

Ces musiquettes deviennent des chansons que Françoise Hardy interprète dans les caves d’un hôtel du Louvre avant de rejoindre le Petit Conservatoire de la chanson, une émission de télévision où sont donnés des cours de chant. "Je me souviens de l’audition car il y avait d’autres jeunes gens comme moi et Mireille [animatrice de l'émission et professeure de chant, ndlr] leur a dit qu’on leur écrirait. Mais à moi, elle m’a dit de rester. Cela a été quelque chose d’extraordinaire pour moi à ce moment-là." Françoise Hardy, très réservée, préfère se cacher au fond de la classe mais court tout de même les auditions dans les maisons de disque.

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"Je cherchais l’assurance que je n’étais pas faite pour cela, se souvient-elle. Mais contrairement à ce que j’imaginais, les gens qui m’ont auditionnée ne m’ont pas du tout jetée. Ils m’ont rappelée pour me demander si je m’étais déjà entendue chanter. J’imaginais tellement le pire que je ne pouvais être surprise que dans l’autre sens." Françoise Hardy dans À voix nue, sur France Culture, en 2001

Françoise Hardy finit par décrocher un contrat, facilement, et fait son premier passage à la télévision à 18 ans dans l'émission du Petit Conservatoire de la chanson où elle disait déjà "préférer les chansons tristes".

En 1962, elle enregistre son premier titre "Tous les garçons et les filles", c’est le début du succès. En un an, elle vend deux millions d’exemplaires. La musique rock explose chez les adolescents. Françoise Hardy écrit, compose et interprète ses chansons qu’elle préfère "tristes et lentes aux chansons plus rapides et plus gaies".

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L'intimité des studios plutôt que le devant de la scène

Françoise Hardy passe les six premières années de sa carrière à parcourir les scènes du monde entier. C’est l’une des seules artistes de l’époque à être connue en Angleterre. Elle chante d’ailleurs en français et en anglais. Puis elle décide de ne se consacrer qu’à l’enregistrement de disques. En 1971, alors âgée de 26 ans, elle expliquait à Émile Noël avoir arrêté de chanter sur scène "depuis deux ans et demi. Si je ne pouvais faire que des disques, je serai ravie. Il faut réussir à surmonter le trac…" Une décision en partie due à sa relation avec Jacques Dutronc, même si ce n'était pas l'unique raison. Dans l'émission Par les temps qui courent , en juin 2021, Françoise Hardy expliquait qu'avec "le premier homme qui a compté pour [elle] Jean-Marie Périer" , ils se voyaient peu, voyageant chacun beaucoup pour leur travail.

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Au total, Françoise Hardy a sorti une trentaine de disques tout au long de sa carrière. Elle a signé des collaborations avec Serge Gainsbourg, Michel Berger, Michel Jonasz, Étienne Daho, Rodolphe Burger… et bien sûr Jacques Dutronc : "l’amour de [sa] vie" , dont elle était séparée depuis la fin des années 1980 et père de son fils, Thomas. C’est d’ailleurs Jacques Dutronc qui inspira la plupart des textes de Françoise Hardy ou du moins ses "sentiments pour lui, ses états d’âme" … Un homme qui avait "un gros problème d'engagement, qui était fuyant et disparaissait comme il apparaissait, c'était très difficile à vivre" , confiait Françoise Hardy. Des chansons que le chanteur n'écoutait pas car "elles lui filaient le bourdon" en rigolait Françoise Hardy.

"Je n'aurais jamais écrit les textes que j'ai écrits si j'avais vécu avec lui [Jacques Dutronc] un amour épanouissant, réciproque. (...) Cela a été excessivement douloureux." Françoise Hardy dans l'émission Par les temps qui courent, le 1er juin 2021

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"Je n’ai jamais pu écrire que sur des émotions personnelles profondes, c’est d’ailleurs pour cela que je n’apprécie que les mélodies qui sont assez mélancoliques, romantiques", racontait Françoise Hardy. "La chanson est un mode d’expression qui a l’avantage d’allier le langage musical et le langage verbal. Un mode d’expression facile à recevoir mais difficile à émettre. Comme le disait l’héroïne de François Truffaut dans ‘La Femme d’à côté’, ‘tout est dans les chansons’. Et pour peu que ce soit exprimé avec beaucoup de sensibilité et de subtilité, cela a une force d’émotion incroyable."

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Plus interprète que compositrice, Françoise Hardy trouvait aussi son inspiration dans les mélodies auxquelles elle attachait beaucoup d’importance. "J’écris à partir d’une musique, donc il faut que cette musique me fasse de l’effet. Plus elle va me faire de l’effet, plus je vais redouter de ne pas être à la hauteur de l’effet produit par cette mélodie. Si elle ne me fait pas d’effet, il n’y a aucune chance pour que quoi que ce soit me vienne en tête. Je m’imprègne de cette mélodie, cela prend parfois des mois ! Puis au bout d’un certain temps, un mot ou une idée arrive et là je suis sauvée ! Le plus difficile est fait. Je peux utiliser tout un cahier de brouillon pour une chanson."

Et quand le texte est achevé, Françoise Hardy expliquait avoir l’impression d’avoir été "visitée par une espèce de grâce"

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Son combat pour l'euthanasie

Au début des années 2000, Françoise Hardy tombe malade et souffre d’un cancer du système lymphatique. Elle sera obligée d’arrêter sa carrière quelques temps, avant d’être en rémission de la maladie. Quelques années plus tard, elle développe un nouveau cancer, du pharynx, qui dégrade progressivement son état de santé. Au Figaro, en mars 2021, Françoise Hardy, dans un état de souffrance "cauchemardesque", confiait : "Je pense avoir fait mon temps. On a tous comme un petit filon en soi et je pense que le mien est épuisé. J’ai écrit tout ce que je pouvais écrire."

Au moment de l’examen par l’Assemblée nationale d'une proposition de loi visant à autoriser l’euthanasie, début avril 2021, Françoise Hardy, interrogée par franceinfo, appelait la France à rattraper son retard à ce sujet. "Quand quelqu'un en arrive à avoir des souffrances insupportables et qu'il est incurable, c'est inhumain de ne pas abréger ses souffrances." Elle expliquait ressentir les effets "catastrophiques" de 45 séances de radiothérapie, ne plus avoir de salive et être sourde d’une oreille, souffrir de détresse respiratoire et devoir "consacrer cinq à six heures par jour rien qu’à l’alimentation".

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Dans son dernier album, Personne d'autre, sorti en 2018, Françoise Hardy avait évoqué son combat contre la maladie. Dans une chanson écrite et composée par La Grande Sophie : Le Large. Avec notamment ces paroles :

Et demain tout ira bien, tout sera loin
Là au final quand je prendrai le large
Tout sera loin, donne moi la main
Là au final quand je prendrai le large.

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