"Voracité", maltraitances, burn-out : un livre-enquête dénonce l'émergence du "low-cost" dans les crèches

Victor Castanet dénonce l'émergence d'un modèle "low-cost" dans les crèches. © Getty - Manu Vega

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Après son livre retentissant sur la situation des Ehpad, le journaliste Victor Castanet s'est attaqué au sujet des crèches. Dans son livre-enquête "Les Ogres", qui sera publié ce mercredi, il raconte "les dérives" des groupes privés et l'inaction des pouvoirs publics.

Dans son livre-enquête "Les Ogres" (Flammarion), qui sort ce mercredi, le journaliste d'investigation Victor Castanet décrit la "voracité" de certains groupes de crèches privées et en particulier du groupe People & Baby. Le journaliste, qui a révélé en janvier 2022 le scandale Orpea dans les Ehpad avec son livre "Les Fossoyeurs", met en avant l'émergence d'un modèle low-cost de crèches, avec l'implication des collectivités locales et de l'État.

Victor Castanet évoque une course au remplissage, des cas de maltraitances, de burn-out des professionnels engagés sur le terrain ou encore de non-respect du taux d'encadrement. "Les ogres, ce sont ceux qui mangent les enfants dans les contes. Mais c'est aussi la voracité, l'obsession des groupes à grossir toujours plus", a-t-il expliqué à l'AFP, pointant "des dérives mises en place aux sièges de certains groupes" et l'inaction des pouvoirs publics.

Un phénomène déjà dénoncé en septembre 2023 dans deux livres-enquêtes mettant en cause les crèches privées, "Le prix du berceau" et "Babyzness", puis, en mai dernier, à l'occasion d'une Commission d'enquête de l'Assemblée nationale. La rapporteuse de cette Commission, la députée Renaissance Sarah Tanzilli, mettait en avant un système "à bout de souffle", dans le public comme dans le privé, décrivant une "complexité kafkaïenne", un "sous-financement chronique" et une "insatisfaction des usagers et des personnels".

La responsabilité des collectivités

Selon Victor Castanet, l'ensemble "des groupes du secteur (People & Baby, Les Petits Chaperons rouges, Babilou, La Maison Bleue…)", ont "une responsabilité dans cette dynamique de low-cost qui a entraîné une dégradation continue de la qualité d'accueil des enfants". Dans son livre, il cite particulièrement "les dérives" du groupe People & Baby, l'un des géants de la petite enfance, "qui a trait à l'optimisation des coûts", a-t-il avancé ce mardi sur France Inter.

Mais le journaliste pointe aussi "la responsabilité des mairies, des collectivités et des ministères" dans cette situation. Depuis 2004, les mairies peuvent confier la gestions de leurs crèches à des groupes privés afin de répondre plus efficacement aux demandes grandissantes des familles via des délégations de service public. Mais cela entraine parfois une guerre des prix, avec certains acteurs privés qui bradent leurs services, proposent des prestations à bas coût, ce qui a un impact sur la qualité d'accueil des enfants.

"En gestion directe, un berceau, ça coûte à peu près 12. 000 euros par an", a-t-il exposé. Des premiers opérateurs privés "sont arrivés avec des offres à 8.000 euros", puis d'autres "qui ont cassé les prix pour conquérir de nouvelles parts de marché" avec des berceaux à "4.000 ou 3.500 euros", a-t-il constaté. "En l'espace de dix ou quinze ans, les prix des berceaux en délégation de service public ont été divisés par trois", a-t-il résumé. "Si les pouvoirs publics mettent trois fois moins d'argent, évidemment, il y a une baisse continue de la masse salariale (…) et après un certains nombres de maires s'étonnent ou mettent la responsabilité sur les groupes privés", a tancé Victor Castanet.

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