Affaire Abbé Pierre : "Un grand malade mental", "des jeunes filles marquées pour la vie"… La découverte d’une lettre de 1964 qui accable le prêtre
Une lettre de Monseigneur Veuillot de 1964, archevêque coadjuteur de Paris, révèle le silence délibéré de l’Église sur les comportements de l’abbé Pierre, accusé d’agressions sexuelles. Ce comportement a été couvert par l’Église pour éviter un scandale.
"Impossible de le désavouer politiquement." Ces mots, écrits dans une lettre datée du 13 mars 1964 par Monseigneur Veuillot, archevêque coadjuteur de Paris, résument l’omerta qui a entouré l’affaire de l’abbé Pierre pendant des décennies. Dans une lettre destinée au cardinal de Montréal, que RTL a pu consulter, Monseigneur Veuillot évoque pour la première fois explicitement le comportement de l’abbé Pierre, dont les agressions sexuelles étaient déjà connues. Pourtant, ce silence a été sciemment entretenu par l’Église.
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L’archevêque parle des "faiblesses" de l’homme d’Église. Il poursuit, plus directement : "Il s’agissait en effet d’un grand malade mental", décrit-il, soulignant la "perte de tout contrôle de soi" et le traumatisme laissé sur les "jeunes filles […] marquées pour la vie". Ce silence était d’autant plus voulu que l’abbé Pierre, à cette époque, jouissait d’une grande popularité, particulièrement après la publication de ses livres à succès.
"Ceux qui ont sa responsabilité craignent un scandale"
Monseigneur Veuillot mentionne également des "autorisations" obligatoires pour chaque déplacement de l’abbé Pierre. Il ne pouvait bouger sans l’aval de son évêque référent et de la ville où il se rendait. Malgré cette surveillance, les abus ont perduré. "On a remarqué que les 'accidents' ne se produisent pas quand il a un guide", écrit Monseigneur Veuillot, mais l’abbé Pierre tentait constamment d'"échapper aux contrôles et aux soins".
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Connu dès 1964 par cette lettre, le comportement de l’abbé Pierre ne cessera pas pour autant. Des agressions sexuelles et viols rapportés par 24 femmes se poursuivront jusqu’aux années 2000. Dans cette lettre, Monseigneur Veuillot est explicite : "ceux qui ont la responsabilité de son cas craignent un scandale", justifie-t-il. Les consignes sont claires : il faut "l’escorter au plus près", "ne pas le perdre de vue", mais surtout, ne pas "le briser psychologiquement".













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