Elle est la première au monde à souffrir de diabète de type 1 et à pouvoir produire sa propre insuline. Une jeune femme de 25 ans originaire de Chine a été traitée pour son diabète de type 1 grâce à ses propres cellules souches reprogrammées. Une technique qui lui permet depuis plus d’un an de manger du sucre et de produire sa propre insuline. Les résultats de cette expérience pionnière ont été détaillés dans la revue Cell.
Le diabète de type 1 est une maladie auto-immune qui apparaît spontanément chez l’enfant ou l’adolescent. Les lymphocytes T (des globules blancs) se mettent à identifier les cellules ß du pancréas comme des cellules étrangères à l’organisme du patient, et à les éliminer. Or ces cellules ß produisent une hormone essentielle à la régulation de la glycémie : l’insuline. Sans insuline, la concentration de glucose (de sucre) dans le sang est anormalement élevée, ce qui entraîne des complications au niveau du cœur et des vaisseaux. Irréversible jusque-là, le diabète de type 1 se traite grâce à un traitement par insuline que les malades doivent prendre à vie.
Un cas isolé mais prometteur
Toutes les personnes qui souffrent de diabète de type1, sauf cette jeune femme de Tianjin en Chine, qui a pu bénéficier d’une greffe de ses propres cellules souches. Ces cellules souches sont des cellules neutres, encore indifférenciées, qui se transforment par la suite en cellules spécialisées.
Dans le cas de la jeune femme, des cellules souches ont été mises au point à partir de cellules déjà spécialisées, on parle alors de cellules souches pluripotentes induites. Concrètement, "les chercheurs ont pris du tissu adipeux de la patiente, qu’ils ont transformé en cellules souches grâce à un cocktail de petites molécules. C’est un véritable challenge. Ces cellules souches ont ensuite été transformées en cellules endocrines pancréatiques selon un protocole bien spécifique", explique le Pr Raphaël Scharfmann, chercheur à l’Inserm et pionnier dans le domaine des cellules ß pancréatiques.
Grâce à ces nouvelles cellules endocrines dans le pancréas, la patiente s’est mise à produire sa propre insuline trois mois après la greffe.
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Si cette première s’avère réjouissante dans le domaine de la recherche contre le diabète de type 1, elle n'en reste pas moins un cas isolé et ne laisse pas présager d’un traitement qui serait disponible pour l'ensemble des patients. "Ce n’est pas pour tout le monde", prévient le Pr Scharfmann.
D'abord, il faut rappeler le profil très particulier de cette patiente : "En plus de son diabète de type 1 apparu à l’adolescence, elle souffre de pathologies en parallèle, a déjà été transplantée du foie, du pancréas et prend un traitement immunosuppresseur [pour maximiser les chances de réussite de la greffe de foie]", détaille le spécialiste.
Les chercheurs eux-mêmes affirment ne pas savoir exactement pourquoi cette technique a enfin fonctionné chez cette patiente mais jamais lors d’essais précédents, avec d’autres malades. L’élément clé pourrait être le traitement immunosuppresseur pour sa greffe de foie, qui aurait permis une meilleure assimilation de ses propres cellules reprogrammées.
Peut-être le site d’injection novateur – les muscles abdominaux – a-t-il également joué un rôle, les greffes se faisant habituellement dans le foie.
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Des "usines" à insuline très performantes
Le Pr Scharfmann souligne, lui, le travail colossal réalisé sur la qualité des cellules souches en amont de la greffe. "Après de nombreux contrôles qualité, elles ont d’abord été transplantées sur plus de 200 souris, ce qui est énorme. Le génome de ces cellules a ensuite été séquencé pour être analysé et seulement ensuite elles ont été transplantées à la patiente."
En tout, 2 milliards de cellules lui ont été transférées. "C’est deux fois plus que ce qu’on a dans le pancréas. Les cellules ß qui produisent l’insuline sont de véritables usines. Nous avons 1 milliard de ces cellules dans notre pancréas et chacune d’entre elle produit 6.000 molécules d’insuline à la seconde." Le nombre deux fois plus élevé de cellules endocrines pancréatiques pourrait aussi avoir été déterminant.
Dans tous les cas, "il s’agit d’un grand pas. Surtout si on regarde où on en était il y a encore 25 ans", commente le spécialiste. L’équipe qui a suivi cette patiente pourrait bien publier d’autres résultats prochainement. Les chercheurs ont déclaré vouloir étendre l’essai à un groupe de 10 à 20 autres personnes.