La ministre de la Culture est soupçonnée d'avoir réalisé du lobbying contre plusieurs centaines de milliers d'euros lorsqu'elle était députée européenne. Selon le magazine « le Nouvel Obs », qui a consulté le réquisitoire du Parquet national financier, le montant total serait supérieur aux 900 000 euros annoncés.

© Alain Guizard/ABACAPRESS.COM
Elle affirmait, face aux juges d’instruction, le 21 juillet dernier, avoir « toujours respecté les règles ». Le Parquet national financier (PNF) requiert pourtant un procès devant le tribunal correctionnel contre la ministre de la Culture, Rachida Dati. Elle est accusée de « recel d’abus de pouvoir et d’abus de confiance » et de « corruption et trafic d’influence passifs par personne investie d’un mandat électif public au sein d’une organisation internationale [ici, le Parlement européen] ».
Surtout, selon les informations du Nouvel Obs, Rachida Dati aurait touché une somme bien supérieure aux 900 000 euros annoncés au départ. L’hebdomadaire, qui a eu accès au réquisitoire (long de 134 pages) du PNF, annonce que celle qui était alors avocate en parallèle de son mandat de députée européenne aurait touché près de 2 millions d’euros, entre 2010 et 2018. L’enquête du Parquet concerne trois conventions passées par l’actuelle ministre de la Culture avec des entreprises, dont RNBV, filiale de l’alliance Renault-Nissan.
Le Parquet demande le renvoi de Rachida Dati et de Carlos Ghosn
Des conventions sans contrepartie d’un travail réel, qui sont soupçonnées d’avoir servi à masquer une activité de lobbying au sein du Parlement européen. C’est pourquoi le PNF a demandé le renvoi de Rachida Dati, comme celui de Carlos Ghosn, alors dirigeant chez Renault-Nissan, qui est accusé d’« abus de pouvoir par dirigeant de société », d’« abus de confiance » et de « corruption et trafic d’influence actifs ». Rachida Dati et Carlos Ghosn contestent les accusations portées contre eux.
L’affaire avait débuté à la suite d’une plainte, adressée par une actionnaire de Renault SA, au Parquet national financier, le 12 avril 2019. Selon le Nouvel Obs, les juges expliquent dans leur réquisitoire que le financier franco-libanais Nicolas Sarkis, créateur du fonds AlphaOne Partners, aurait expliqué avoir « rémunéré Rachida Dati à hauteur de 100 000 euros par an de 2010 à 2018, dans le cadre d’un forfait annuel de conseil juridique ». Soit 900 000 euros en presque dix ans, auxquels s’ajoutent notamment les 100 000 euros par an qu’aurait touché Rachida Dati grâce à un contrat avec l’opérateur mobile Orange.
La proximité entre Rachida Dati et Nicolas Sarkis se serait aussi construite, selon le PNF, grâce à leurs intérêts communs pour l’Azerbaïdjan, dictature qui fait fortune avec son stock d’hydrocarbures. L’une comme l’autre n’ont cessé de défendre le pays caucasien. Une défense si récurrente que, pour le cas de Rachida Dati, le président du Parlement européen de l’époque, l’Allemand Martin Schulz, aurait demandé à son collègue chargé de la déontologie, Gerald Häfner, de se pencher sur cette dernière.
Durant son travail d’investigation, l’élu allemand aurait expliqué à son collègue, dans un e-mail datant du 7 mars 2014, que Rachida Dati a « déposé de nombreux amendements sur les questions gazières et énergétiques, qui coïncident avec les intérêts des grands énergéticiens ».
Nicolas Sarkis aurait, quant à lui, soutenu le régime en place en Azerbaïdjan dans une tribune publiée par le site d’informations Huffington Post, alors que Rachida Dati était députée européenne. Enfin, des notes inscrites dans un cahier saisi par les enquêteurs, en 2019, dans le bureau de l’assistante de l’élue, à la mairie du 7e arrondissement de Paris, indiquent « dossier Sarkis ». Preuve, selon le Parquet, d’un réel lien entre l’homme d’affaires et la femme politique.
« Un réquisitoire n’est que la vision du parquet d’un dossier. Il n’est pas le reflet de la réalité, rétorquaient, le 15 novembre dernier, Olivier Baratelli et Olivier Pardo, les avocats de l’ancienne garde des Sceaux sous Nicolas Sarkozy. S’ouvre maintenant un délai légal au cours duquel nous allons répondre point par point pour contrecarrer cette vision parcellaire et inexacte. » Rachida Dati considère que les faits qui lui sont reprochés sont prescrits. Pas assez convainquant pour le Parquet national financier, qui compte bien aller au bout de la procédure judiciaire.
Aux côtés de celles et ceux qui luttent !
L’urgence sociale, c’est chaque jour la priorité de l’Humanité.
- En exposant la violence patronale.
- En montrant ce que vivent celles et ceux qui travaillent et ceux qui aspirent à le faire.
- En donnant des clés de compréhension et des outils aux salarié.es pour se défendre contre les politiques ultralibérales qui dégradent leur qualité de vie.
Vous connaissez d’autres médias qui font ça ? Soutenez-nous !
Je veux en savoir plus.
Les mots-clés associés à cet article