Guerre en Ukraine : Wagner accusé de piller l’or africain pour financer les opérations militaires russes
Le groupe paramilitaire russe Wagner (puis ses déclinaisons), a capté plus de 2,5 milliards de dollars américains générés par l’extraction illégale d’or, depuis l’invasion de l’Ukraine selon un rapport accablant du Conseil mondial de l’or. Des sommes qui ont servi à financer l’appareil de guerre russe en Ukraine.
La milice paramilitaire russe Wagner, longtemps dirigée par Evgueni Prigogine, ce proche de Vladimir Poutine mort en août 2023 dans le crash mystérieux de son avion – et désormais devenue « African Corps » sous contrôle du Kremlin et deux autres sociétés russes (Convoy et Redut) – a multiplié sa présence dans plusieurs pays africains dont elle recherche davantage à capter les ressources qu’à en protéger les populations.
Dans un rapport édifiant publié le 12 décembre et intitulé « Le silence est d’or. Un rapport sur les mineurs artisanaux exploités dans le but de financer la guerre, le terrorisme et le crime organisé », le Conseil mondial de l’or dénonce les pratiques criminelles de Wagner, qui a été « l’un des plus grands bénéficiaires du commerce illicite de l’or. On estime que plus de 2,5 milliards de dollars américains ont été générés par l’extraction illégale d’or, depuis l’invasion de l’Ukraine, et qu’ils ont servi à financer l’appareil de guerre russe », affirme le rapport.
Viols et de torture par les forces russes
« Les mineurs artisanaux d’or subissent diverses violences, allant des attaques et menaces directes de la part de forces gouvernementales ou de mercenaires financés par l’État, notamment le groupe Wagner, jusqu’aux abus et à l’exploitation par des gangs criminels, des bandits et, dans le cas d’États fragiles, des groupes armés insurgés », indique le rapport en évoquant la criminalité mondiale liée à l’or. « Dans certains cas, les mercenaires embauchés et agissant indépendamment d’un ou plusieurs gouvernements sont responsables de violations systématiques des droits de l’homme. Le groupe russe Wagner est le plus actif, et était directement lié au Kremlin à Moscou », souligne le rapport, qui mentionne une enquête édifiante de CBS en mai 2023 sur les exactions commises.
« En septembre 2021, dans le nord-ouest de la République centrafricaine, des informations font état d’un assaut militaire de grande envergure sur la ville de Kouki. Les attaques ont entraîné l’exécution arbitraire de civils qui empêchaient les mercenaires russes de s’emparer de la mine d’or locale, et tuant des mineurs artisanaux afin de piller leurs ressources. On trouve des témoignages similaires d’exécutions, de viols et de tortures commises par les forces russes contre des mineurs artisanaux à Ndassima. Lors d’une autre attaque en 2021 sur la ville de Bambari, qui était entourée de mines d’or artisanales, des témoins ont rapporté des bombardements aériens sur la communauté locale. »
La commission britannique des affaires étrangères de la Chambre des communes a, elle aussi, documenté la « traînée d’atrocités dans pratiquement tous les théâtres où [le groupe Wagner] a opéré », fonctionnant « comme une mafia criminelle internationale, alimentant la corruption et pillant les ressources naturelles », notant que « sa création de richesses se situe en grande partie en Afrique ».

Le rapport indique que la mort de Prigogine « n’a pas interrompu le pillage des ressources naturelles par la Russie à travers le monde, de la Libye à la République centrale africaine (RCA). Au contraire, le Kremlin a saisi cette opportunité pour reprendre le contrôle de ce commerce lucratif. »
Par exemple en République centrafricaine (RCA), le rapport évoque le marché passé entre les mercenaires de Wagner (désormais sous contrôle du ministère russe de la défense) et le président Faustin-Archange Touadéra : « un échange entre ressources et sécurité, [qui] autorise de graves violations des droits de l’homme. » Au Mali, le groupe Wagner a pris le contrôle d’une mine d’or artisanale à Intahaka en février 2024.
Facilité pour mener les opérations commerciales illégales
Le rapport souligne aussi l’extrême facilité avec laquelle « le groupe Wagner peut enregistrer de nouvelles sociétés, changer les noms de leurs administrateurs et transférer ses flux financiers avec une relative facilité et en toute impunité. La combinaison d’une faible application de la loi et d’un manque de transparence concernant la propriété effective des entreprises a laissé au groupe Wagner une grande latitude pour mener ses opérations commerciales illégales. »
« L’or pillé par Wagner peut être ramené en Russie directement via la base militaire russe de Lattaquié, en Syrie, ou indirectement via des centres internationaux de commerce de l’or, en contournant les sanctions internationales », explique le rapport du Conseil mondial de l’or. La chute de Bachar al-Assad pourrait d’ailleurs créer des difficultés avec la base de Lattaquié.
Le Conseil mondial de l’or appelle à agir
Au final, le Conseil mondial de l’or estime que « la Cour pénale internationale doit prendre en compte, dans le cadre de son enquête en Ukraine, l’éventuelle responsabilité pénale de ceux qui facilitent le traitement, le blanchiment et le transfert illégal des profits du groupe Wagner vers la machine de guerre russe ».
Et que « les gouvernements devraient prononcer des sanctions en vertu de la loi Magnitsky, des interdictions de visa et des gels des avoirs contre les dirigeants et les représentants officiels qui collaborent avec le groupe Wagner ou toute organisation comparable. »



