
INTERNATIONAL - Non merci Monsieur le président. À la veille de Noël, Joe Biden a usé du peu de pouvoir politique qui lui reste avant son départ de la Maison Blanche pour commuer la peine de 37 des 40 prisonniers condamnés à mort par la justice fédérale. L’un des derniers gestes forts de son mandat en faveur de ceux « qui ont fait preuve d’une réhabilitation réussie », selon ses propres mots.
Sauf qu’il y a un hic. Lundi 6 janvier, deux prisonniers parmi ceux dont la peine de mort a été effacée ont refusé ce privilège accordé par le chef d’État américain et déposé un recours devant la justice fédérale. Une curieuse réaction de la part de deux hommes, Shannon Agofsky et Len Davis, qui patientent dans le couloir de la mort.
Ultime recours
Une décision qui n’a rien à voir avec leurs opinions politiques ou une éventuelle aversion pour le président démocrate. Avec ce choix, ils espèrent surtout échapper à une « situation juridique désavantageuse », comme l’explique la chaîne américaine NBC. Car Shannon Agofsky et Len Davis cherchent à faire appel de leur condamnation et faire reconnaître leur innocence. Autrement dit, ils préfèrent rester dans le couloir de la mort pour tenter d’être disculpés plutôt que de rester en prison jusqu’à la fin de leur vie sans possibilité de recours.
Derrière leur décision se cache le processus judiciaire en vigueur aux États-Unis pour déceler d’éventuelles erreurs judiciaires lors des recours contre la peine de mort. Un processus connu sous le nom de « contrôle renforcé », permettant aux tribunaux d’examiner attentivement − une dernière fois − les dossiers de condamnation à mort. Il permet aussi aux condamnés d’obtenir des conseils juridiques pour leur appel.
C’est le cas pour Shannon Agofsky, condamné pour le meurtre du président d’une banque en 1989, puis pour le meurtre d’un codétenu en 2001, actant sa condamnation à mort par un jury trois ans plus tard. Selon son recours cité par NBC, « commuer sa peine maintenant, alors que le prévenu a une procédure judiciaire active, revient à le priver de la protection du contrôle renforcé ».
Le « consentement du condamné n’est pas requis »
L’autre détenu, Len Davis, estime quant à lui qu’une « condamnation à mort attirerait l’attention sur la conduite accablante » du ministère de la Justice le concernant. Cet ancien policier de 60 ans conteste la manière dont il a été accusé de meurtre par piétinement en 1994. Et tente désormais de rétablir son innocence dans ce dossier. « Le défendeur n’a jamais demandé la commutation de sa peine », est-il précisé dans son recours.
Si le geste de Joe Biden a attiré son lot de critiques supplémentaires après la grâce controversée de son fils Hunter, il a aussi provoqué des réactions positives chez les défenseurs des droits de l’homme et des opposants à la peine de mort. D’autant plus avant l’arrivée de Donald Trump au pouvoir. Sachant que ce dernier souhaite étendre les exécutions lors de son second mandat.
Robin Maher, directeur exécutif du Centre d’information sur la peine de mort, indique auprès de NBC que la grande majorité des détenus bénéficiant de la clémence de Joe Biden en sont « reconnaissants ». L’activiste rappelle au passage que cette prérogative présidentielle « est constitutionnellement autorisée et absolue ». D’ailleurs, une décision de la Cour suprême américaine datant de 1927 prévoit que le « consentement du condamné n’est pas requis » lors de telles décisions. Dans l’attente de la décision de la justice fédérale, les deux hommes ont en tout cas choisi de se défendre ensemble, en prenant un seul et même avocat pour plaider leur cause.
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