Depuis le 30 janvier dernier, les autorités sanitaires alertent d'une pénurie de quétiapine – du nom de ce traitement psychiatrique notamment prescrit dans le cadre de troubles bipolaires, de dépression et de la schizophrénie. Si les médecins sont invités à prescrire une alternative pour initier une thérapie, l'arrêt brutal de ce médicament chez les patients en cours de traitement présente un risque important de rechute.
L’alerte a été donnée dès la fin du mois de janvier. Pourtant, de longues semaines plus tard, la situation est loin de s’être améliorée. La pénurie de quétiapine, un traitement psychiatrique notamment prescrit dans le cadre de troubles bipolaires, de dépression et de la schizophrénie, continue d’inquiéter les autorités sanitaires en France. « Cette situation entraîne une détresse inédite pour tous les acteurs concernés, d'autant qu'elle n'a pas été anticipée », dénonçait l'Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam) dans un communiqué, le 5 février dernier.
Ces tensions, qui concernent tous les dosages du médicament, sont à mettre en lien avec un problème de production rencontré par le fabricant grec Pharmathen international, qui produit ce traitement pour plusieurs laboratoires. Sur son site, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) affirme de fait qu'un « contingentement quantitatif et l'arrêt des exportations par les grossistes répartiteurs ont été mis en place ».
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Résultat : « Aujourd’hui, il n’y a plus rien nulle part », comme le déplore Valérie de Lécluse, présidente du Syndicat général des pharmaciens des Bouches-du-Rhône, auprès de Libération. Et la spécialiste de poursuivre : « La rupture est totale et nationale sur le médicament princeps (Xeroquel), comme sur ses génériques, quel que soit le dosage. »
Des « défaillances » face aux pénuries
Pour faire face à ces difficultés d'approvisionnement, l'ANSM a indiqué certaines « conduites à tenir » dans les prochaines semaines pour les différents acteurs. À commencer par les médecins, qui devront prescrire « une alternative thérapeutique » au moment de commencer un traitement, mais « également pour les patients en cours de traitement, dès que cela est possible », « sauf en cas d'épisode dépressif caractérisé dans le cadre d'un trouble bipolaire ».
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Rappelons que pour certains patients, l’arrêt brutal de ce traitement est souvent synonyme d’effets secondaires, de troubles du sommeil, « et surtout de rechutes potentiellement graves », comme le déplore le psychiatre Antoine Pélissolo, dans une tribune parue dans Le Point le 30 janvier dernier. Concernant les pharmaciens, il est conseillé à ces derniers de distribuer le traitement à l'unité ou, lorsque celui-ci n'est pas disponible, proposer des « préparations magistrales » – produites par un établissement pharmaceutique et divisées par l’officine qui les met en vente.
Par ailleurs, l’ANSM indique avoir fait appel au mécanisme européen de solidarité volontaire. Mis en place en octobre 2023, il permet aux États membres de s'entraider en cas de pénurie grave. Concrètement, le mécanisme « signale les besoins d'un État membre pour un médicament particulier aux autres États membres, qui peuvent répondre en redistribuant les médicaments qu'ils ont en stock », peut-on lire sur le site de la Commission européenne.
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Mais la quétiapine n’est que le dernier d’une longue liste de médicaments en tensions dans les officines françaises. Antidiabétiques, anticancéreux, anti-inflammatoires, antibiotiques de base… D'après Emmanuelle Rémond, présidente de l’Unafam, ces pénuries à répétition « reflètent des défaillances » grandissantes. Selon France Assos Santé, 37 % des Français ont été confrontés à une pénurie de médicaments en pharmacie en 2023, contre 25 % l'année précédente.