C’est désormais confirmé. Après plus d’un an d’attente, la mise à jour du Nutri-score a été validée par le gouvernement. Annoncée début 2024, elle n’avait pas encore été déployée en France, contrairement aux six autres pays qui ont mis en place l’affichage de l’indicateur nutritionnel. En cause, des dissensions gouvernementales et une forte pression exercée par les acteurs de l’industrie agro-alimentaire. Plus sévère, le nouvel algorithme du Nutri-score ne fait en effet pas l’unanimité.
Boissons "sans sucre" contenant des édulcorants, viande rouge, céréales ou encore yaourts à boire… Les notes associées à ces aliments devaient perdre quelques lettres suite à un ajustement des seuils de nutriments à favoriser ou à éviter. Validé par le ministère de la Santé il y a près de huit mois, l’arrêté officialisant cette actualisation était néanmoins en attente depuis plusieurs semaines.
Le 5 mars dernier, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard avait ainsi assumé publiquement avoir bloqué sa publication, reprochant au niveau Nutri-score de donner une mauvaise note aux produits "remarquables" du terroir, fromages et charcuterie notamment. "L’arrêté est à ma signature. Je n’ai pas encore signé, je ne sais pas quelles sont mes marges de manœuvre pour en corriger les effets négatifs, mais croyez bien que je m’y intéresse de très près", avait-elle déclaré lors des questions au gouvernement au Sénat avant de revenir sur sa position.
"Enjeux impératifs de santé publique"
Quelques jours plus tard, vendredi 14 mars, le gouvernement a finalement annoncé l’entrée en vigueur de ce nouveau mode de calcul, "compte tenu des enjeux impératifs de santé publique". Il s'agit de "lutter contre le surpoids, l'obésité" avec derrière "des sujets aussi lourds que les maladies cardiovasculaires, le diabète et certains cancers", précise la ministre de la Santé Catherine Vautrin sur TF1. Selon un récent rapport de l’OCDE, le Nutri-score pourrait notamment permettre d’éviter deux millions de cas de maladies chroniques en Europe d’ici à 2050.
Gage toutefois donné au secteur agroalimentaire : les ministres assurent qu'ils seront "attentifs à ce que ce système (...) ne nuise pas aux produits issus de la richesse de nos terroirs et symboles de notre patrimoine culinaire". Ils entendent rester "vigilants aux effets de bord" que la nouvelle méthode de calcul du Nutri-Score "engendre pour les produits issus du savoir-faire français". Les entreprises et marques engagées dans cette démarche volontaire auront "deux ans pour mettre à jour leurs emballages et apposer le nouveau Nutri-Score", selon leur communiqué.
"C'est une victoire de la santé publique, un grand motif de satisfaction puisque cet arrêté était attendu depuis plus d'un an : cela permet de rappeler que ces enjeux de santé publique doivent être au premier plan des préoccupations du gouvernement", s'est réjoui auprès de l'AFP le Pr Serge Hercberg, l'un des concepteurs du Nutri-Score. L'association de consommateurs Foodwatch y voit de son côté une victoire de "la mobilisation citoyenne contre les lobbies agroalimentaires".
Un étiquetage "utile pour tous"
Certains acteurs de la grande distribution et de la transformation agro-alimentaire ont également exprimé leur soutien. La fédération patronale des supermarchés, la FCD, a ainsi salué l'arrêté sur le Nutri-score revisité, étiquetage "utile pour tous : il pousse à des meilleurs choix nutritionnels autant qu’il pousse les entreprises à améliorer leurs recettes". Dans une publication Linkedin, Thierry Cotillard, le patron des Mousquetaires/Intermarché, a lui aussi apporté son soutien à la nouvelle notation. "Oui, cette "V2" est plus sévère, notamment avec le sucre et le sel. Mais si cet affichage permet d’éclairer les consommateurs et réduire le risque de maladies, il n’y a pas de question à se poser", estime-t-il.
L’opposition au logo arc-en-ciel reste pourtant encore forte. Certaines marques ont d’ores et déjà pris la décision de s’en défaire, à l’instar de Danone. Au niveau européen, l’avenir d’un Nutri-score obligatoire semble par ailleurs compromis. Face à ces reculs, Foodwatch assure qu'elle continuera de "dénoncer les manœuvres des lobbies auprès de la Commission européenne" tout en bataillant pour que "le logo devienne obligatoire sur tout le continent".
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