Lors d’une conférence de presse tenue ce lundi 17 mars, l’ancienne Fondation Abbé Pierre a officiellement annoncé son changement de nom. Désormais appelée Fondation pour le Logement des Défavorisés, elle a dévoilé sa nouvelle identité, un tournant pour cette organisation qui lutte depuis plus de 30 ans contre le mal-logement.

L’emblématique béret de l’Abbé Pierre disparaît, emportant avec lui l’image du fondateur. Un nouveau logo arbore désormais le mot « Fondation », où la lettre « A » se transforme en une petite maison stylisée, rappelant l’engagement premier de l’organisation : offrir un toit à celles et ceux qui en sont privés.
« Nous avons choisi de supprimer la mention Abbé Pierre, par respect pour les victimes, par respect pour les bénévoles, salariés et militants contre le mal-logement », a déclaré Christophe Robert, délégué général de la fondation. Face aux accusations visant son fondateur, l’organisation a pris la décision de changer de nom et d’identité visuelle pour garantir la pérennité de son action et éviter que la polémique ne vienne occulter son combat.
« La Fondation Abbé Pierre change de nom mais pas de combat », a-t-il insisté. « On reste tourné vers un seul objectif : lutter sans relâche contre toutes les formes d’exclusion et le mal-logement. » Une nouvelle étape importante dans l’histoire de la fondation, mais qui s’inscrit dans une continuité. « Cette nouvelle identité, c’est un nouveau chapitre qui s’ouvre pour la fondation, emprunt de combativité, parce que les besoins sont immenses. »
Une crise du logement sans précédent
Ce changement intervient dans un contexte particulièrement alarmant pour le logement en France. La Fondation pour le Logement des Défavorisés recense aujourd’hui plus de 4 millions de personnes mal logées, plus de 350 000 sans domicile et douze millions touchées par des difficultés de logement. « La puissance publique n’est pas au rendez-vous », dénonce Christophe Robert. « La situation sur le front du mal-logement se durcit, provoquant de graves dégâts sociaux : impact sur la santé, la scolarisation, l’emploi, la vie sociale, le pouvoir d’achat. »
Les chiffres sont accablants. En quelques années, la construction de logements a chuté de 40 %, avec seulement 263 000 logements construits en 2024, contre 435 000 en 2017. La situation est encore plus critique dans le logement social, où la baisse est aussi spectaculaire. À peine 86 000 logements sociaux ont été construits en 2024, contre 124 000 en 2016, soit le pire résultat enregistré depuis vingt ans. En 2024, les expulsions locatives atteignent des niveaux records, avec plus de 19 000 expulsions réalisées par les forces de l’ordre.
L’hébergement d’urgence, lui, est totalement saturé. Chaque soir, entre 6 000 et 8 000 personnes appellent le 115 sans trouver de place, faute de lits disponibles. Parmi elles, 2 000 enfants dorment à la rue.
Alors que les besoins explosent, la fondation fait face à une diminution des dons de particuliers, conséquence directe des accusations de violences sexuelles commises par l’abbé Pierre dévoilées ces derniers mois. « 97 % de nos ressources proviennent des dons des particuliers, explique Christophe Robert. La fondation a beaucoup progressé depuis sa création, ces dix dernières années, elle a été très soutenue par les donateurs. Mais à partir de juillet 2024, et alors que nous étions en progression constante depuis des années, les dons de particuliers ont baissé de 30 %. » Cette chute brutale fragilise les actions de la fondation, qui espère que ce changement de nom permettra de rétablir la confiance des donateurs.
Un combat plus nécessaire que jamais
Malgré ces difficultés, la Fondation pour le Logement des Défavorisés reste mobilisée et exhorte les pouvoirs publics à agir. « C’est pourquoi nous appelons les responsables politiques à faire du logement l’un des trois ou quatre chantiers prioritaires de la nation », insiste Christophe Robert.
Face à l’urgence de la situation, il interpelle directement l’État : « Pour répondre à la détresse absolue de celles et ceux qui vivent à la rue, nous demandons la mise en place immédiate de cellules locales, placées sous la responsabilité des préfets dans les zones les plus tendues, afin qu’elles soient opérationnelles toute l’année pour apporter des solutions aux sans-abri. » Il appelle également à une mobilisation rapide des infrastructures publiques inutilisées : « Nous invitons l’ensemble des pouvoirs publics à réquisitionner les bâtiments vides et à les aménager en hébergements d’urgence, en attendant de proposer des solutions plus durables. »
Cet appel à l’action ne masque pas une autre réalité : la mobilisation des pouvoirs publics ne suffira pas à elle seule. Sur le terrain, les associations font face à des difficultés croissantes, prises en étau entre la baisse des subventions et la hausse des coûts. « La capacité des acteurs associatifs nous préoccupe beaucoup », alerte le Délégué Général de Fondation pour le Logement des Défavorisés, qui si elle a dû tourner une page, refuse que son action soit entravée.
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