Crise diplomatique entre le Rwanda et la Belgique : "Notre seule boussole continuera à être le respect des droits humains"
Le ministre belge des Affaires étrangères Maxime Prévot a dénoncé lundi une "déformation totale des faits" par le régime rwandais, qui a annoncé lundi rompre ses relations diplomatiques avec la Belgique.

- Publié le 17-03-2025 à 14h43

"La Belgique regrette cette décision, qui est disproportionnée et illustre que lorsque nous sommes en désaccord avec le Rwanda, celui-ci préfère ne pas dialoguer", a déclaré le chef de la diplomatie belge, dans un communiqué.
Il rappelle avoir invité, en vain, son homologue rwandais, le ministre Olivier Nduhungirehe, lors de son passage à Bruxelles la semaine dernière. "On peut supposer que le gouvernement rwandais a probablement préféré se contenter d'une vision unilatérale et biaisée de notre position. Or, la rupture des canaux de discussion ne facilite jamais la résolution des différends."
"La Belgique ne cherche ni à punir ni à affaiblir le Rwanda"
La Belgique réfute, ajoute-t-il, les déclarations du président rwandais Paul Kagame faites ce week-end, ainsi que les raisons invoquées pour justifier la décision rwandaise.
"La Belgique ne cherche ni à punir ni à affaiblir le Rwanda, encore moins en fonction d'un passé colonial dont elle a pris ses distances depuis longtemps. Il s'agit d'une déformation totale des faits", selon Maxime Prévot.
"La seule boussole de la Belgique continuera à être le respect des droits humains, de l'État de droit et du droit international humanitaire", dit-il. "Cette position est partagée par toute l'UE ainsi que par d'autres partenaires internationaux, dont le G7. Ceci montre qu'il ne s'agit pas d'une position isolée et que la Belgique n'a pas besoin de convaincre ses partenaires."
Dans un communiqué des Affaires étrangères rwandaises, Kigali accuse "le rôle historique destructeur" de la Belgique "dans la création d'un extrémisme ethnique (qui) a conduit au génocide contre les Tutsis en 1994".
Une position inchangée de la Belgique
"Notre position vis-à-vis du génocide contre les Tutsis au Rwanda en 1994 reste inchangée", répond Maxime Prévot. "La Belgique a condamné sans la moindre ambiguïté le génocide contre les Tutsis et a assumé sa part de responsabilité, notamment en demandant pardon pour ses manquements. La Belgique reste attachée à l'application de la loi sur la négation du génocide contre les Tutsis et maintiendra la très bonne coopération judiciaire entre le Rwanda et la Belgique concernant la poursuite de ses auteurs."
Face à la violation de l'intégrité territoriale de la RDC et à la poursuite des violences dans l'est du pays, le Conseil de l'Union européenne a adopté ce lundi des sanctions individuelles contre des hauts responsables militaires rwandais ainsi que des membres du M23 et de l'AFC. Un individu et une entreprise rwandaise ont également été sanctionnés en lien avec le trafic illégal de ressources naturelles en RDC.
"Il est probable que la décision prise aujourd'hui par le Rwanda ne soit pas étrangère à l'adoption unanime de ces sanctions au niveau européen", selon le ministre Prévot.
Le ministre Prévot a pris des mesures de réciprocité
L'objectif de ces mesures est d'exercer une pression afin que toutes les parties cessent le feu et s'asseyent à la table des négociations, poursuit-il. "La Belgique salue les avancées réalisées ces derniers jours grâce à la médiation régionale et les encourage vivement. La République démocratique du Congo doit également prendre ses responsabilités, non seulement pour permettre la résolution des conflits, mais aussi pour réformer sa propre gouvernance."
La Belgique appelle à un engagement de bonne foi dans les dialogues sur le plan régional et national, tout en mettant fin à toute coopération avec les FDLR (des forces fondées par d'anciens responsables hutus rwandais du génocide des Tutsis de 1994, NDLR) et en sanctionnant tout discours ou acte de haine à l'encontre des Rwandophones.
En réponse à la rupture des relations diplomatiques et à l'expulsion des diplomates belges, le ministre Prévot a pris des mesures de réciprocité: convocation du chargé d'affaires par intérim du Rwanda, déclaration des diplomates rwandais persona non grata avec ordre de quitter le territoire dans un délai de 48 heures et dénonciation de nos accords bilatéraux de coopération gouvernementale.