Le gourou du biohacking Bryan Johnson crée une « religion » fondée sur l’IA

« Chère humanité, je crée une religion. » Le multimillionnaire de 47 ans connu pour sa quête aussi obsédante qu’inquiétante de la jeunesse éternelle – allant jusqu’à se faire transfuser le sang de son fils ado – vient de frapper une nouvelle fois. Pas de complément alimentaire inédit ou de « routine » anti-âge controversée cette fois, mais la création d’un culte dont il serait (bien entendu) le gourou ultime.
Annoncée sur le réseau social X le 7 mars dernier, cette « religion » épouse son combat de longue date contre la mort, lui qui rêverait d’atteindre les 200 ans. Baptisée « Don’t Die » (ne meurs pas), celle-ci est censée mettre tout le monde d’accord. « “Ne meurs pas” est la seule chose sur laquelle chaque être humain s’accorde chaque seconde de chaque jour », défend le biohacker à la peau lisse sur la plateforme détenue par Elon Musk, dans un thread aux accents prophétiques.
Jésus 3.0
« Il y a quelques années, j’ai fait une expérience de pensée m’imaginant en présence de personnes du 25e siècle. Il me semblait évident qu’ils diraient que “Ne meurs pas” est la façon dont l’humanité s’est sauvée et a fusionné avec l’IA », écrit Bryan Johnson, sans donner plus de détails sur ce futur sauvetage de notre espèce.
Suivi par près de quatre millions de personnes sur les réseaux sociaux, celui qui se considère comme le « Jésus de la santé » entend proposer une sorte de doctrine totale, ou « grande théorie unificatrice de l’existence », surpassant les « paradigmes existants » que sont la démocratie, le capitalisme et la religion (entendue au sens traditionnel du terme). Le tout, en s’appuyant sur les mathématiques, l’informatique ou encore la biologie.
Dear humanity,
— Bryan Johnson (@bryan_johnson) March 7, 2025
I am building a religion.
Wait a second, I know what you’re going to say. Hold that knee-jerk reaction and let me explain.
First, here’s what’s going to happen:
+ Don’t Die becomes history’s fastest-growing ideology.+ It saves the human race.
+ And ushers in… pic.twitter.com/MJcrU9uXNf
« Je vieillis désormais au rythme le plus lent jamais enregistré. La science, les mesures et les protocoles fonctionnent. La même approche méthodique peut être appliquée à la Terre, à l’IA et à l’espèce humaine », explique celui dont l’âge biologique (mesurant le vieillissement réel du corps) serait de seulement 42 ans, soit cinq ans de moins que l’âge indiqué par son passeport. CQFD.
Sois jeune et tais-toi
Concrètement, rallier la secte (pardon, la religion) de Johnson consiste avant tout à… l’imiter. « Se coucher [de bonne] heure, faire de l’exercice quotidiennement et manger sainement », « mesurer et améliorer chaque organe de son corps », « éliminer les toxines, réduire le stress, être en famille et entre amis », déroule le fondateur de Blueprint, qui permet de passer commande de coûteux compléments alimentaires et tests déterminant la vitesse du vieillissement du corps ou encore le taux de microplastiques qu’il contient (compter près de 150 dollars pour le « starter pack »). Mais aussi de t-shirts et sweats siglés « Don’t Die ».
Pour les adeptes de ce culte, appelés « citoyens Don’t Die », il existe désormais même une appli du même nom permettant d’obtenir son score « Don’t Die » – établi en fonction d’indicateurs comme la qualité du sommeil, le nombre de calories brûlées ou encore le nombre de pas réalisés au cours de la journée – et d’échanger avec les autres membres de la communauté. Comme dans le capitalisme, « tout peut se voir attribuer une valeur », précise Johnson sur X.

Sur le réseau social, quelques réactions enthousiastes se distinguent des très nombreux commentaires railleurs. Pas sûr que ce qui ressemble à une opération marketing suffise à faire oublier les controverses émaillant la réputation du célèbre biohacker, auquel Netflix a même consacré un docu au début de cette année.
La dernière affaire en date nous vient du New York Times, qui a publié le 21 mars dernier une longue enquête révélant une manie moins connue de l’entrepreneur américain (également à la tête de l’entreprise de neurotechnologies Kernel) : les accords de confidentialité qu’il fait signer de force à tous ses employés et partenaires sexuels. Une procédure visant à leur interdire de parler de son logement mais aussi du fait qu’il porte rarement des slips, ou encore de dévoiler la teneur de ses propos concernant ses activités sexuelles et ses érections (lui qui tente de « rajeunir son pénis » et se vante de ses érections nocturnes d’une durée de trois heures, surpassant la moyenne des hommes de dix-huit ans). Et pire, d’évoquer les effets secondaires des produits qu’il commercialise : premiers signes de diabète, chute du taux de testostérone, nausées… Pas tout à fait les meilleures auspices pour démarrer une nouvelle religion.