Poutine ratifie la plus grande campagne de conscription en 14 ans: 160.000 jeunes appelés sous les drapeaux

Vladimir Poutine a ratifié ce lundi l’ordre biannuel de conscription en Russie, rapporte le média russe en langue anglaise Meduza. Le nombre de conscrits est fixé à 160.000 hommes, un nouveau record après les 150.000 jeunes appelés sous les drapeaux au printemps 2024. C’est la première fois depuis 2011 que le nombre de conscrits réclamés est aussi élevé, avec un pic à 200.000 hommes cette année-là.

La campagne d’enrôlement se déroulera du 1er avril au 15 juillet précise Meduza, et s’inscrit dans l’objectif affiché par Poutine en septembre dernier d’étendre l’armée russe à 1,5 million de militaires actifs. En janvier dernier, l’âge maximum pour être appelé a été repoussé de 27 à 30 ans.

Mais le système russe est complexe: ces conscrits, dont le nombre est fixé chaque année, servent à renforcer ce qui était avant la guerre un noyeau militaire professionnel. Selon la loi, ces jeunes doivent d’abord passer par quatre mois d’entrainement avant leur incorporation, et ne peuvent être déployés hors du sol russe, sauf en cas de guerre déclarée. Comme la Russie n’a jamais reconnu être engagée dans une guerre avec l’Ukraine, en théorie ces conscrits ne peuvent y être envoyés, à l’inverse des soldats professionnels sous contrat.

Mais dans les faits, rien n’est moins sûr, et la frontière entre conscrit et soldat est devenue très fine. Les pressions sur les conscrits pour leur faire signer des engagements “volontaires” dans l’armée sont devenues la norme, en Russie.

Selon Ivan Chuvilyaev, de l’ONG russe “Get Lost” qui aide les personnes qui tentent d’éviter la conscription, ces jeunes hommes sont incités à signer avec de fortes primes d’engagement et l’assurance d’un déployement dans une région sans risque, ou à proximité de chez eux. À l’inverse, on leur rappelle souvent qu’un conscrit peut quand même se retrouver dans les régions annexées, comme la Crimée.

La pression sociale et les menaces font le reste, selon Euronews. “La falsification de documents est très répandue”, ajoute Chuvilyaev. “Le contrat est signé pour le conscrit par des recruteurs qui mettent un ‘x’ dans la case signature. Le soldat s’en aperçoit lorsqu’il reçoit une carte bancaire et des documents relatifs aux allocations.”

Ces pressions ne font qu’amplifier les tentatives d’échapper à la conscription, alors que les témoignages s’accumulent que celle-ci se fait de plus en plus sous la contrainte. Les organisations de soutien aux conscrits font état de 217 raffles de jeunes hommes organisées rien que l’automne dernier, et rien que dans la région de Moscou, pourtant longtemps épargnée de l’effort de recrutement par rapport aux campagnes.

“Tout lieu fréquenté - un centre commercial, un food court (une aide de restauration, NDLR) - peut faire l’objet d’un raid. Les conscrits sont aussi arrêtés sur leur lieu de travail, sur les campus, à leur domicile, parfois même lors d’un contrôle routier”, confie un juriste à l’Echo. Une récente rafle a été filmée dans une salle de sport moscovite de la chaîne Spirit Fitness. On y voit de nombreux jeunes gens, certains en pleurs, rassemblés par des hommes en uniforme et cagoulés.

De nombreuses personnes déclarées inaptes au service pour raison médicale se retrouve également raflées. Le nombre de recours a explosé devant les tribunaux moscovites - 4.428 en 2024, le double de l’année précédente. Mais encore faut-il que les victimes de ces rafles n’aient pas été containtes à signer un engagement, ou été envoyées dans une zone proche des combats avant l’aboutissement des procédures judiciaires.

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