Batteries, solvants et déchets chimiques: en plus de Stablex, 16 sites au Québec reçoivent les déchets dangereux des États-Unis
Le Québec est le plus gros récipiendaire au monde par habitant de déchets dangereux américains
Des déchets dangereux américains sont envoyés à près d’une vingtaine d’entreprises québécoises, faisant du Québec l’endroit qui reçoit la plus grande quantité au monde par habitant de ces matières toxiques pour la santé et l’environnement.
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Au total, 17 sites à travers la province figurent dans les registres de l’Agence de protection de l’environnement américaine (EPA) que le Bureau d’enquête a épluchés.
La plupart sont situés proches de zones densément peuplées autour de Montréal, dont les plus importants: Stablex, qui enfouit des déchets à Blainville, et Terrapure, qui recycle des batteries au plomb à Sainte-Catherine.
Plus que les Mexicains
Au total, entre 2018 et 2022, les compagnies américaines ont exporté ici l’équivalent de 86,8 kg de déchets dangereux par Québécois, d’après les données de l’EPA.
En comparaison, les Mexicains, premiers importateurs au monde de déchets dangereux américains, ont reçu l’équivalent de 27 kg par personne pendant la même période. Les Sud-Coréens, troisièmes importateurs au monde derrière le Canada, ont pour leur part reçu l’équivalent de 19,7 kg par personne.
Notre Bureau d’enquête a mené cette analyse en s’associant au quotidien britannique The Guardian et à l’unité de journalisme d’enquête mexicaine Quinto Elemento Lab, qui ont obtenu les registres de l’EPA dans le cadre d’une vaste enquête de plus de deux ans.
Ces données nous ont permis de révéler en février qu’en expropriant la Ville de Blainville au profit de Stablex, Québec donne un sérieux coup de pouce aux producteurs de déchets dangereux américains, puisque cette multinationale est le plus gros importateur de ces matières du sud de la frontière vers la belle province.
Grâce à une loi adoptée sous bâillon, Stablex a maintenant commencé à déboiser un milieu humide pour y agrandir ses installations, menaçant des habitats où vivent des espèces menacées. Elle compte y enfouir huit millions de tonnes de déchets dangereux.
Dans l’espoir de stopper les machines, la Ville a porté la cause devant les tribunaux et bloque l’accès à un chemin d’accès, ce qui ralentit le déboisement.
Risque pour la santé et l’environnement
Ces matières présentent un risque pour la santé humaine et l’environnement, et nécessitent donc un traitement particulier au cours de leur transport, de leur stockage, de leur traitement et de leur élimination.
Les États-Unis nous en envoient de toutes sortes: des batteries, des solvants, des déchets chimiques, des liquides inflammables, des hydrocarbures, des déchets électroniques, des boues d’hydroxydes, du propane, des aérosols, etc.
Mais les règles quant à la gestion et à la catégorisation de ces déchets diffèrent selon les juridictions.
Par exemple, «aux États-Unis, il est interdit d’enfouir des sols contaminés avec du mercure visible, mais ici, on peut», explique l’écotoxicologue Daniel Green de la Société pour vaincre la pollution. «On est très tolérant avec ce qu’on accepte», déplore-t-il (voir autre texte).
La situation a de quoi interpeller la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), où aboutissent la plupart des importations de déchets. Depuis décembre, elle réclame la réalisation d’un mandat d’enquête et d’audience publique générique du Bureau d’audience publique sur l’environnement (BAPE) sur la gestion des matières dangereuses résiduelles au Québec.