Les manifestants lancent leur «bataille finale»

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ThaïlandeLes manifestants lancent leur «bataille finale»

Des milliers de manifestants thaïlandais ont lancé vendredi leur «bataille finale» contre le gouvernement face à un cabinet affaibli par le limogeage de la Première ministre.

«Nous dormirons ici ce soir!», a lancé Suthep Thaugsuban, le meneur des manifestants, depuis une scène montée près du siège du gouvernement. «J'appelle les personnes au pouvoir à coopérer avec nous et à se débarrasser des vestiges de Thaksin», a-t-il ajouté, tandis que ses partisans construisaient des barricades et un campement.

Dans la rue depuis six mois, les manifestants ne démordent pas de leur idée d'instaurer à la place du gouvernement intérimaire un «conseil du peuple», non élu, en charge de «réformes» du système. Celui-ci est gangréné par la corruption, selon eux, après des années de gouvernements pro-Thaksin, le frère de Yingluck Shinawatra, la Première ministre déposée mercredi.

L'ampleur de la mobilisation vendredi n'avait à la mi-journée pas celle de décembre et janvier, quand des dizaines voire des centaines de milliers de Thaïlandais étaient dans la rue. Après des semaines de manifestations réduites à leur minimum, ils étaient néanmoins déterminés à renouer vendredi avec leur occupation d'ampleur des abords du siège du gouvernement, inutilisé depuis des mois.

«Jour de la victoire»

Cet ancien vice-Premier ministre (quand l'opposition était au pouvoir entre 2008 et 2010), connu pour ses déclarations hyperboliques, a appelé les présidents de la Cour suprême et du Sénat à «trouver une solution». «Sinon le peuple mènera des actions pour changer les choses lui-même», a encore dit celui qui a déjà annoncé plusieurs fois le «jour de la victoire». Une marche a également été lancée en direction des sièges de plusieurs télévisions.

Des canons à eau ont dû être utilisés pour repousser des manifestants qui tentaient de pénétrer dans un bâtiment de la police. Un manifestant a été légèrement blessé, selon les autorités. Des centaines de policiers ont été déployés à travers les rues de Bangkok, alors que des violences sont redoutées, la crise ayant déjà fait au moins 25 morts en six mois. D'autant plus que les Chemises rouges pro-gouvernementales ont annoncé pour samedi une grande manifestation à Bangkok. Contestée depuis des mois, la Première ministre Yingluck Shinawatra a été destituée mercredi par la Cour constitutionnelle, laquelle est accusée de faire partie d'une «coalition des élites» royalistes contre le gouvernement.

Elle a ensuite été reconnue coupable jeudi de négligence dans le cadre d'un programme controversé de subvention aux riziculteurs. Un gouvernement intérimaire, avec une vingtaine de ministres ayant survécu au limogeage, reste toutefois en place, bien qu'affaibli. Ce «coup d'Etat judiciaire» contre l'exécutif, attendu depuis semaines, n'est donc que partiel.

«Clan Shinawatra»

Mais les manifestants d'opposition comptent bien profiter du moment de faiblesse du gouvernement intérimaire. Ils refusent les élections législatives prévues le 20 juillet. Thaksin Shinawatra a été renversé par un coup d'Etat en 2006, et vit en exil pour fuir une condamnation pour malversations financières, politique selon lui.

Leur demande de report sine die des élections et leurs critiques ouvertes de la démocratie suscitent des inquiétudes, jusqu'à Washington qui a insisté cette semaine sur la nécessité d'un scrutin dans cette monarchie constitutionnelle qui fonctionne sans Parlement depuis des mois. Selon les analystes, les manifestants sont soutenus par les élites proches du Palais royal, qui considèrent le «clan Shinawatra», vainqueur de toutes les législatives depuis 2001, comme une menace pesant sur la monarchie. Le roi de Thaïlande est âgé de 86 ans. Depuis le putsch de 2006 contre Thaksin, la Thaïlande est engluée dans un cycle de crises opposant ennemis et partisans du milliardaire Thaksin Shinawatra.

(afp)

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