Narendra Modi, pressenti pour être le prochain Premier ministre de l’Inde, est-il fasciste ? Cette question agite depuis plusieurs semaines les Indiens, divisés entre ceux qui s’opposent à ce politicien islamophobe et xénophobe issu du Rashtriya Swayamsevak Sangh (milice nationaliste hindoue, fondée en 1925 sur le modèle des Faisceaux mussoliniens) et ceux qui le défendent, voyant en lui le sauveur de l’économie indienne. Apoorvanand, enseignant à l’université de Delhi, explique sur le site Rediff.com, citant l’écrivain Umberto Eco, qu’il faut rester extrêmement vigilant.

L’intellectuel Kanti Bajpai évoque dans The Times of India “un voyage vers le fascisme soft” : “L’Inde ira vers un fascisme ‘soft’ plutôt que dur, car le pays est grand, divers, a une culture de débat, et le bras administratif du gouvernement est faible. Ceux qui veulent un fascisme plus dur n’arriveront pas à l’imposer sur tout le territoire. […] Qu’est-ce qui explique la montée du fascisme ‘soft’? En bref : l’idéologie à la Modi, l’adhésion des marchés (des grandes et des petites entreprises), le désintérêt de la classe moyenne [pour les autres idéologies] et les médias [qui offrent à Modi une visibilité sans précédent].”

La démocratie indienne survivra

L’historien Ramachandra Guha, qui n’est pas un sympathisant des nationalistes hindous, n’est pas d’accord. Il écrit dans The Telegraph de Calcutta que “s’inquiéter […] de l’arrivée d’une ère fasciste, c’est succomber à un alarmisme prématuré. En mai 2014, l’Inde aura peut-être un Premier ministre arrogant et sectaire à la place d’un Premier ministre faible et incompétent [référence à Manmohan Singh, Premier ministre depuis 2004].
Mais la démocratie indienne, sans parler de l’Inde elle-même, survivra.” L’histoire européenne a montré que la démocratie n’est pas nécessairement un frein au fascisme, bien au contraire, et peut faciliter son avènement.

Le débat se poursuit donc, tandis que les “hindous d’Internet”, défenseurs de Modi et de l’extrémisme hindou hyperactifs en ligne, continuent de s’acharner contre toute forme de critique visant le nouvel homme fort du pays.