Amnesty : "24 Heures et Homeland ont glorifié la torture"

L'ONG lance une nouvelle campagne pour faire cesser la torture et dénonce la glorification des sévices par des séries télévisées.

Source AFP

Reconstitution d'une salle de torture (photo d'illustration).
Reconstitution d'une salle de torture (photo d'illustration). © HERWIG VERGULT / BELGA/AFP

Temps de lecture : 3 min

Trente ans après la convention des Nations unies contre la torture, Amnesty international a dénoncé mardi la pratique "en plein essor" de ces sévices, "normalisés" par la guerre contre le terrorisme et "glorifiés" par des séries télévisées telle 24 Heures. L'organisation non gouvernementale de défense des droits de l'homme, dont le siège est à Londres, a lancé mardi une nouvelle campagne de deux ans visant à faire cesser la torture. Sur les cinq dernières années, Amnesty affirme avoir enregistré des incidents impliquant des actes de torture dans 141 pays dont 79 des 155 États qui ont ratifié la convention des Nations unies de décembre 1984.

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Une enquête mondiale auprès de 21 000 personnes dans 21 pays a également révélé une crainte très répandue de la torture, 44 % des sondés affirmant craindre d'être torturés dans le cas où ils seraient placés en garde à vue. Peut-être encore plus inquiétant, 36 % des personnes interrogées ont dit qu'elles considéraient la torture comme quelque chose de parfois nécessaire et acceptable afin d'obtenir des informations pour protéger la population.

La torture "a été presque normalisée, c'est devenu la routine", a regretté le secrétaire général d'Amnesty, Salil Shetty, au cours de la conférence de presse de lancement de la campagne Arrêtons la torture. "Depuis la soi-disant guerre contre le terrorisme, l'usage de la torture, particulièrement aux États-Unis et dans leurs sphères d'influence (...), a été complètement normalisé", a-t-il ajouté, expliquant ce phénomène par "les attentes en termes de sécurité nationale".

Usage de la lapidation et de la flagellation au Moyen-Orient

Le soutien à la torture est diversement populaire selon les pays, réunissant 74 % de partisans en Chine ou en Inde contre seulement 12 % en Grèce ou 15 % en Argentine, selon l'enquête de GlobeScan.

Au Royaume-Uni, où la peur de la torture est la plus faible de tous les pays, 29 % des personnes interrogées soutiennent le recours à la torture. Pour Kate Allen, directrice pour le Royaume-Uni d'Amnesty, ce soutien est lié à la popularité des séries télévisées d'espionnage, particulièrement violentes. "Des séries comme 24 Heures et Homeland ont glorifié la torture pour toute une génération, mais il y a une énorme différence entre la représentation dramatique créée par les scénaristes et son utilisation réelle par des agents du gouvernement dans des salles de torture", a-t-elle affirmé.

Amnesty, qui a remporté le prix Nobel de la Paix en 1977, largement pour sa lutte contre la torture, se concentre avec cette nouvelle campagne sur cinq pays dans lesquels l'ONG estime que cette pratique a le plus d'impact : le Mexique, les Philippines, le Maroc et le Sahara occidental, le Nigeria et l'Ouzbékistan. L'ONG affirme néanmoins que la torture "fait partie de la vie" dans l'ensemble de l'Asie et qu'elle est également pratiquée "à une échelle industrielle" en Syrie depuis le déclenchement de la guerre civile. En Afrique, cette question n'a pas été traitée correctement par les législations locales, estime-t-elle.

Salil Shetty a également évoqué "la cruauté à l'égard des prisonniers aux États-Unis qui sont placés en isolement, sans lumière", l'usage de la lapidation et de la flagellation au Moyen-Orient et "l'échec persistant" des pays européens à enquêter sur les allégations de complicité de torture.

Pour Loretta Ann P. Rosales, qui a elle-même été torturée par le régime de Marcos aux Philippines en 1976 et préside désormais une institution de défense des droits de l'homme dans le pays, la torture persiste parce que "la nécessité d'une sécurité d'État" prévaut sur "la sécurité des individus".

Amnesty appelle les gouvernements à prévenir la torture en fournissant un accès médical et juridique aux prisonniers ainsi que de meilleures conditions d'inspection des centres de détention. L'ONG appelle également à la multiplication des enquêtes indépendantes, en cas de soupçons de torture, afin de mettre fin à l'impunité. "Les gouvernements n'ont pas tenu leurs promesses, et à cause de ces promesses non tenues, des millions de personnes ont terriblement souffert", a conclu Salil Shetty.


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Commentaires (7)

  • Bibou

    Je ne comprends pas très bien ce qu'un film comme " 24 heures " a comme rapport avec glorifier la torture ? C'est plutôt le contraire, puisqu'il montre les horreurs de la torture. Mais le parti-pris qu'a toujours montré " Amnestie " contre Israël explique probablement cela. Malheureusement, il y a encore beaucoup de pays où elle est pratiquée.

  • Kitt

    Ces séries US ne font que dépeindre une réalité connue de tous. De plus, dans "24 heures", les protagonistes s'opposent justement sur la légitimité de la torture. Donc Amnesty dit n'importe quoi sur ce coup-là.
    Dans la même logique, pourrait-on alors supposer qu'une série comme "Dexter" est une incitation au crime en série et à la self-justice ?
    Il est surtout préoccupant de constater la surenchère de violence et de gore qui s'étale aujourd'hui dans la majeure partie des séries TV et il serait plus opportun de s'interroger sur l'impact qu'elles peuvent produire sur le cerveau d'enfants trop jeunes ou peu éduqués.

  • Adrien

    Les gens d'Amnesty doivent ignorer que chaque année en France 5 attentats de grande ampleur sont déjoués, la torture n'est peut-être pas étrangères à ces résultats. L'angélisme hypocrite des ONG devient dangereux...