
Ce sont « les spermatozoïdes fossilisés les plus anciens jamais découverts », selon le paléontologue Mike Archer, de l'université de Nouvelle-Galles du Sud. Trouvés sur un site préhistorique dans le nord de l'Australie, ils appartenaient à des crustacés qui vivaient il y a quelque 17 millions d'années. Ils étaient enroulés à l'intérieur des organes reproducteurs de ces ostracodes, des crustacés d'eau douce ou d'eau marine microscopiques.
Les spermatozoïdes, géants par rapport à l'animal qui les produisait, ont été découverts sur le site de Riversleigh, dans le nord de l'Etat australien du Queensland, un site préhistorique de 100 kilomètres carrés classé au Patrimoine mondial de l'humanité, qui regorge de fossiles anciens, dont une espèce de kangourous carnivores ou d'ornithorynques munis de dents.
DES ORGANES INTERNES PARFAITEMENT PRÉSERVÉS
Ces fossiles datent de l'oligocène (– 34 à – 23 millions d'années) et du miocène (– 23 à – 5 millions d'années). « Nous avons pris l'habitude d'avoir de belles surprises [à Riversleigh], a déclaré, mercredi 14 mai, le scientifique, qui travaille sur ce site depuis trente-cinq ans. Mais la découverte de spermatozoïdes fossiles, avec leur noyau cellulaire, était totalement inattendue [et] on se demande ce que l'on va pouvoir encore découvrir dans ces sédiments géologiques », a-t-il ajouté.
L'équipe de Mike Archer avait effectué une collecte en 1988 et envoyé ses échantillons à un spécialiste des ostracodes, John Neil, de l'université La Trobe de Melbourne, qui s'est aperçu que les fossiles contenaient des tissus mous. Plusieurs spécialistes ont été consultés, dont Renate Matzke-Karasz, de l'université Ludwig Maximilian à Munich, et Paul Tafforeau, du Synchroton de Grenoble.
1,3 MILLIMÈTRE DE LONG
Une étude au microscope a révélé que les fossiles contenaient des organes internes parfaitement préservés, dont les organes sexuels. Les spermatozoïdes mesurent quelque 1,3 millimètre, soit une taille légèrement supérieure à celle du crustacé. Ils renferment leur noyau, qui contenait autrefois les chromosomes et l'ADN de chaque animal.
Sur le site où vivaient ces animaux il y a des millions d'années s'étendait alors une vaste forêt tropicale. Les petits ostracodes « vivaient dans une pièce d'eau, à l'intérieur d'une grotte, dans laquelle tombaient les déjections de milliers de chauve-souris », a expliqué le scientifique. La quantité de déjections a certainement entraîné des niveaux élevés de phosphore dans l'eau, qui pourrait avoir contribué à la fossilisation des tissus mous des crustacés, « comme le montrent quelques rares exemples de conservation de tissus mous dans des dépôts riches en [déjections de] chauve-souris en France », a expliqué une autre scientifique de l'université de Nouvelle-Galles du Sud, Suzanne Hand.
Ce n'est pas la première fois que des tissus mous presque parfaitement conservés sont trouvés à Riversleigh. Les scientifiques avaient ainsi découvert des insectes préhistoriques toujours dotés de leurs muscles internes, grâce à la fossilisation des bactéries qui consommaient les tissus mous des créatures. Les résultats de la recherche viennent d'être publiés dans Proceedings of the Royal Society B, revue de référence pour les sciences biologiques.
Voir les contributions
Réutiliser ce contenu