Anne Lauvergeon, ex-dirigeante d'Areva, a été mise en examen dans le dossier de l'UraMin.

La dirigeance d'Areva par Anne Lauvergeon, de 2001 à 2011, est décortiquée par la Cour des comptes qui a signalé ses soupçons à la justice.

AFP PHOTO / JOEL SAGET

Ils n'ont même pas attendu la fin de leur enquête pour signaler leurs découvertes. En alertant le Parquet national financier (PNF) sur des soupçons de dissimulations de la part d'Anne Lauvergeon, dans le rachat d'Uramin par Areva qu'elle présidait, les magistrats de la Cour des comptes concentrent le feu de leurs accusations sur elle. Le tout en quatre accusations de "délits" et "infractions pénales" présumées, tel que le rapporte Le Monde ce vendredi.

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• Le délit de "présentation de comptes inexacts ou infidèles". La société minière canadienne Uramin a été rachetée par Areva en 2007 pour 1,7 milliard d'euros. Dès octobre 2010, la direction des finances du groupe note ouvertement le "risque d'impairment [ndlr: dépréciation] sur le périmètre" de cette société, que ne "pouvait pas ignorer" Anne Lauvergeon selon le journal, chiffré à 1,82 milliards d'euros... Mais ce n'est que le 12 décembre 2011 que le conseil de surveillance fait passer dans ses comptes 1,4 milliard d'euros de provisions sur les actifs.

• Le délit de "diffusion d'informations fausses ou trompeuses". Elle signe en mars 2011 un document de référence pour l'exercice 2010 contenant simplement "un ajustement comptable de 300 millions d'euros visant Uramin", écrit le quotidien, qui cite les magistrats évoquant des "motifs très succincts et parcellaires".

• Le délit "d'abus de pouvoir". Dans ce contexte, il est reproché à Anne Lauvergeon d'avoir "dissimulé" à sa tutelle, l'Etat, "les pertes générées par l'acquisition", selon le signalement. Le texte est ici sans appel: "Ces manoeuvres, contraires à l'intérêt d'Areva, auraient eu pour objet de permettre à Anne Lauvergeon de tenter de se maintenir à la tête du groupe." Après un second mandat, elle avait été évincée avec l'aval de l'Elysée sous Nicolas Sarkozy à la mi-2011.

• Le délit de "faux et usage de faux en écriture privée". Pour la Cour des comptes, les vérifications d'usage (ou "due diligences") avant le rachat d'Uramin en 2007 ont été "sciemment caviardées", selon les termes du Monde, avant d'être envoyées à l'Etat. Deux versions semblent co-exister: l'officielle, donnée à l'Agence des participations de l'Etat (APE), ne précise pas certains doutes -"manque d'expérience", "peu de données fiables", "calendrier flou"- présents dans un document resté, lui, interne à Areva.

Mais aussi... Au-delà de ces quatre points, le signalement -sur lequel travaille la brigade financière de la police judiciaire depuis l'ouverture de l'enquête préliminaire le 10 avril- ajoute d'autres éléments. La Cour s'interroge notamment sur les 865 millions d'euros investis sur les installations sans que la direction "ne dispose d'éléments fiables sur leur pertinence".

L'avocat d'Anne Lauvergeon, Me Jean-Pierre Versini-Campinchi, indiquait après l'annonce de l'enquête: "Ma cliente est tout à fait sereine et je ne vois absolument pas quelle infraction pénale pourrait lui être reprochée." Il semblerait que les magistrats adressent ici leur réponse avec cette liste d'accusations.

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