VIDEOS. Loi sur la famille : Laurence Rossignol ne se laissera «pas impressionner»

 

VIDEOS. Loi sur la famille : Laurence Rossignol ne se laissera «pas impressionner»

    Un texte sur la famille, présenté par le Parti Socialiste et les écologistes, centré sur les conséquences des séparations pour les enfants, arrive ce lundi en débat à l'Assemblée. Il devrait être discuté jusqu'à mercredi avant un vote le 28 mai. La secrétaire d'Etat à la Famille Laurence Rossignol nous a reçus avant l'ouverture des débats.

    Sur le texte : «Moi j'ai la volonté d'apaiser»

    Après la mobilisation de la Manif pour tous, le précédent gouvernement a enterré, en février, la grande loi famille promise par Dominique Bertinotti à laquelle vous succédez. Le regrettez-vous ?

    Depuis 18 mois, la crispation politique sur la famille est telle qu'avec une grande loi famille, le risque aurait été d'additionner les désaccords. Or, moi, j'ai la volonté d'apaiser. Les conflits, les contradictions, les oppositions sur des sujets comme la filiation, l'accès aux origines sont tels que je pense que la façon la plus raisonnable et la plus constructive est de procéder marche par marche, de travailler par lois, par propositions de loi, thème par thème. Si cela permet de faire avancer les choses, cela me va bien .

    Justement, pour vous, c'est le baptême du feu avec l'examen à partir d'aujourd'hui d'une proposition de loi qui a pour but d'adapter le droit de la famille à leur évolution. Approuvez ce texte ?

    Laurence Rossignol. Il est le résultat d'un travail parlementaire de qualité. Il est cohérent et équilibré. Il n'y a pas de raison qu'il ne fasse pas, in fine, consensus. Avant sa présentation, j'ai pris soin de rencontrer toutes les associations, tous les courants. Certains me reprochent d'avoir reçu les représentants de la Manif pour tous. Mais il faut bien essayer de sortir de la paralysie actuelle. Et quand je suis en désaccord avec mes interlocuteurs, je n'hésite pas à le leur dire.

    Sur le débat l'Assemblée : «Je ne me laisserai pas impressionner»

    Vous attendez-vous à un débat houleux ?

    Inutilement long surtout. 700 amendements déposés, dont plus de 600 par l'UMP, pour 20 articles, c'est totalement disproportionné. Une fois de plus, l'UMP fait de l'obstruction. Chaque fois qu'on parle famille, elle est dans une mécanique d'opposition radicale, quoi qu'on propose, quoi qu'on dise... Ceux qui sont à la manoeuvre ont toujours la même obsession : traquer tout ce qui pourrait -supposément- avantager les couples homoparentaux. En l'occurrence, c'est faux, cette loi n'aborde absolument pas cette question. En confiant à ses éléments les plus dogmatiques, le soin de s'occuper des questions de la famille, l'UMP joue l'immobilisme au risque de pénaliser toutes les familles qui attendent, pour leur quotidien, des évolutions du droit. Il faut aussi faire attention. L'impressionnante augmentation des actes homophobes en 2013 invite à la mesure du verbe et à la responsabilité. Moi, lors de ce débat, je suis là pour chercher des points de convergences, être constructive, je le ferai, je ne me laisserai pas impressionner.

    Sur la médiation : «Cette solution donne d'excellents résultats»

    Reste que ce texte est loin de faire l'unanimité. Beaucoup d'associations le jugent très frileux...

    Je préfère un peu tiédeur aux braises ! D'abord, il va permettre enfin de développer la médiation familiale, en cas de séparation ou de divorce. Cette solution donne d'excellents résultats, notamment au Québec. Désormais, en cas de désaccord entre les parents au sujet par exemple de la résidence, de la pension alimentaire, de la scolarité de l'enfant, des dates de vacances, le juge pourra prescrire une à deux séances de médiation obligatoire. Si cela échoue, tant pis, il aura essayé. Si cela réussit tant mieux Mais l'expérience montre que cela peut débloquer bien des situations et éviter d'encombrer inutilement les tribunaux, même si la médiation n'est pas adaptée à toutes les situations, notamment en cas de violence. Par ailleurs, cette loi va aussi simplifier la vie des familles recomposées.

    Sur les beaux parents : «Ils pourront se prévaloir d'un mandat d'éducation quotidienne.»

    Comment précisément ?

    Le rôle des beaux-parents auprès de l'enfant de leur conjoint va être mieux reconnu. Pour eux, le texte crée un «mandat d'éducation quotidienne». En clair, pour tous les actes de la vie courante, ils pourront se prévaloir de ce mandat officiel. Ce document, on pourra le rédiger soi-même à la maison -ou devant notaire. Il permettra enfin au beau parent d'aller chercher un enfant à l'école sans qu'on le suspecte d'être un potentiel «kidnappeur». Pour les directeurs d'établissements, ce sera aussi un soulagement. Ce mandat sera aussi très utile en cas d'hospitalisation. Quand une école envoie aux urgences un enfant qui s'est fait une entorse, les hôpitaux sont intransigeants. Pour eux, l'enfant ne peut sortir qu'accompagné de son parent. Là encore, ce mandat sera d'une vraie aide.

    Certains beaux-parents aimeraient pouvoir transmettre leur patrimoine à leur bel-enfant avec des droits de succession minorés...

    C'est un vrai sujet, mais qui relève en premier lieu du ministre des Finances. Actuellement, ce traitement fiscal plus favorable n'est possible qu'à l'issue de l'adoption simple de l'enfant par son beau-parent. Lorsque le Sénat se saisira de la réforme de l'adoption cela fera certainement partie des débats. Quant-aux beaux parents qui déplorent l'absence de vrai statut, cela me laisse perplexe. S'ils souhaitent revoir les enfants qu'ils ont éduqués après une séparation et que les enfants sont d'accord, qui les en empêche ? Il n'y a pas besoin de la loi pour cela. A moins qu'ils ne soient en conflit avec leur ex et là, je ne veux pas que l'enfant se retrouve l'otage d'une situation délicate.

    Sur la domiciliation des enfants : «Ce texte n'étend pas la résidence alternée.»

    Pour tenter de résoudre le débat sur la garde alternée, ce texte instaure d'office la double domiciliation pour un enfant. N'est-ce pas purement symbolique ?

    Et alors ? Les symboles sont aussi importants pour les familles, non ? Dans une société où l'on valorise les liens entre pères et enfants après une séparation, les termes «résidence principale chez la mère» et «droit de visite et d'hébergement pour le père», sont un archaïsme. C'est bien qu'ils disparaissent du code civil. Avec la double résidence, l'enfant saura qu'il est chez lui dans les deux maisons, quelque soit le temps qu'il passe chez sa mère ou son père. C'est pour lui plus sécurisant. Cette double résidence devrait d'ailleurs figurer sur sa carte d'identité, sur les bulletins scolaires ou les cahiers de liaison. Et si cela permet aux pères d' être alertés par l'école et de venir chercher plus souvent leurs enfants fiévreux, tant mieux ! C'est bon pour l'égalité entre hommes et femmes... D'ailleurs, à ce sujet, j'ai tenu à qu'il y ait une stricte symétrie dans les sanctions entre le parent qui «oublie» de prendre chez lui le week-end son enfant, comme peut le prévoir la convention de divorce, et celui qui s'oppose à son temps d'accueil.

    Cette égalité, les associations de père la revendiquent et désespèrent que ce texte ne favorise pas la résidence alternée paritaire. Ont-ils vraiment tort ?

    Je les ai reçus vendredi dernier et je leur ai clairement dit que pour moi la résidence alternée pour de jeunes enfants suppose que les parents soient d'accord et s'entendent pour l'organiser. J'en profite pour rassurer les pédopsychiatres qui s'alarment : ce texte n'étend pas la résidence alternée, le mi-temps chez chaque parent. C'est toujours le juge qui décidera dans l'intérêt de l'enfant. Par ailleurs, je comprends que les associations féministes soient vigilantes  La lutte contre les violences aux femmes est une priorité du gouvernement. A aucun moment, elle ne peut être effacée par d'autres préoccupations. Protéger les mères, c'est protéger les enfants. Ce texte n'y fera pas exception. J'y veillerai personnellement.

    VIDEO. L'édito du Parisien. «Loi sur la famille : le débat promet d'être houleux»

    VIDEO. Le statut des beaux-parents examiné à l'Assemblée nationale ce lundi