
La disparition, révélée en avril, de plus de deux mille tubes contenant des fragments du virus du SRAS — syndrome respiratoire aigu sévère — à l'Institut Pasteur de Paris était pour le moins inquiétante. La réponse des pouvoirs publics est proportionnelle. La ministre des affaires sociales, Marisol Touraine, et le ministre de l'éducation nationale et de la recherche, Benoît Hamon, ont adressé une note confidentielle au vitriol aux responsables de l'Institut.
Selon le site d'information Mediapart, qui a eu accès à ce document daté du 16 avril , les ministres y énumèrent pêle-mêle une série d'anomalies préoccupantes :
« Forte probabilité de destruction [des échantillons] non ordonnée par les responsables et sans traçabilité, retard de deux mois dans la transmission de l'information aux autorités compétentes, listes des personnes habilitées non initialement disponibles, congélateurs non sécurisés, absence de vidéosurveillance, archives non disponibles le week-end. »
Cette note est adressée à Pierre Boissier, directeur de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS), et à Jean-Richard Cytermann, chef du service de l'inspection générale de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR). Selon le site d'information, elle charge les deux inspecteurs d'une mission visant à contrôler « l'ensemble des laboratoires de haute sécurité biologique de l'Institut Pasteur », soit dix-huit laboratoires et deux animaleries. Cette opération doit permettre de mettre à l'épreuve les mesures de sécurité de l'Institut.
Selon Mediapart, un premier rapport est attendu pour le 31 mai, et des conclusions définitives à la fin de juillet.
« AUCUN POTENTIEL INFECTIEUX »
L'Institut Pasteur avait annoncé le 13 avril avoir perdu deux mille trois cent quarante-neuf petits tubes de virus du SRAS, contenus dans vingt-neuf boîtes, stockées dans un laboratoire habilité à conserver des organismes hautement pathogènes, en précisant qu'ils n'avaient « aucun potentiel infectieux ». Les tubes étaient conservés dans un congélateur.
Leur perte avait été constatée en janvier lors d'un inventaire, mais signalée seulement deux mois plus tard à l'Agence du médicament et des produits de santé (ANSM). Informée le 28 mars, l'ANSM a mené une inspection du 8 au 12 avril, qui « n'a pas réussi à déterminer ce qu'il était advenu des souches », selon Gaétan Rudant, directeur de l'inspection à l'ANSM. « Nous avons conclu à un problème de gestion de la traçabilité au sein de l'Institut », a-t-il ajouté, soulignant que pour l'ANSM, comme pour l'Institut Pasteur, « il n'est pas acceptable que du matériel biologique soit perdu ».
A la mi-avril, le professeur Christian Bréchot, directeur général de l'Institut Pasteur, avait estimé que les tubes avaient probablement été détruits et « autoclavés » (stérilisés) sans que cela ait été noté. L'Institut avait également porté plainte contre X pour faire toute la lumière sur l'affaire. Les activités de recherche du laboratoire ont depuis été suspendues par l'ANSM, qui a également demandé un nouvel inventaire « tube à tube dans tous les laboratoires de l'Institut Pasteur habilités à manipuler des micro-organismes et toxines (MOT) », a précisé M. Rudant. Cet inventaire est toujours en cours.
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