L’Afrique du Sud a voté le mercredi 7 mai. La première élection sans Mandela. L’ANC (Congrès national africain), le parti qu’il a fondé, fort de son héritage, est sûr de remporter l’élection. Mais le parti de Mandela n’a jamais été aussi affaibli par les scandales, la corruption et les inégalités. Ceux que la presse sud-africaine surnomme les born free votent pour la première fois.

Ils sont nés après la libération de Mandela (1990) et n’ont pas connu l’apartheid. “Cette génération gronde de colère et de désespoir”, écrit le chroniqueur phare du quotidien “noir” The Sowetan, Justice Malala.

Le fondateur et directeur du journal This Day poursuit : “Après être parvenue à la démocratie sous les acclamations générales, l’Afrique du Sud est en train de devenir ce que l’écrivain William Gumede appelle ‘une nation agitée’, marquée par la désillusion, la colère et le mécontentement, en particulier chez les jeunes. La moyenne d’âge n’est que de 24 ans en Afrique du Sud, et ceux qui voteront pour la première fois aux élections générales de 2014 sont nés deux ans après 1994, date à laquelle les Noirs ont voté pour la première fois. Ils ne savent pas ce qu’était l’apartheid et beaucoup s’en moquent. C’est peut-être le début de la fin pour l’ANC. L’hégémonie du parti repose essentiellement sur le message qu’il adresse aux Noirs, selon lequel il était le parti de la libération et de Mandela.” Le taux de chômage chez les jeunes est deux fois supérieur à la moyenne nationale.

Plus que tous les autres candidats, le populiste Julius Malema, jeune dissident de l’ANC, drague les born free en tenant un discours radical. L’ancien président de la ligue des jeunes de l’ANC (African National Congress) veut rassembler “les orphelins et ceux qui ont perdu tout espoir [en l’ANC]”, rapporte The Sowetan. La photographe américaine Krisanne Johnson a suivi pendant deux ans ces born free. Elle capte et restitue avec subtilité l’esprit de cette génération étonnante, qui bouscule l’icône Mandela, effrite la barrière raciale et dessine les contours de l’Afrique du Sud post-Mandela.