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« Ça dégénère » : tension maximale à Bambari, en Centrafrique

Les soldats français ont engagé l'artillerie et des hélicoptères de combat contre des ex-rebelles Séléka. Notre envoyé spécial décrit la situation sur place.

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Publié le 24 mai 2014 à 12h00, modifié le 28 mai 2014 à 22h41

Temps de Lecture 3 min.

Les troupes françaises de Sangaris, le 22 mai à Bambari, en Centrafrique.

Il y a quelques rares éclats de rire, de la musique qui surgit la nuit des téléphones portables dans la cour de la paroisse Saint-Joseph de Bambari. Ils sont quelques défis au malheur et à la peur. Plusieurs milliers de personnes sont venues s'abriter sur ce site religieux, transformé en trois jours en camp de réfugiés.

Samedi matin, un vent de panique a envahi la foule. « Ils montent à l'église, ils vont nous attaquer », s'affole au téléphone la sœur Marie-Rosalye. Ils, ce sont les civils musulmans armés d'arcs et de flèches, d'armes blanches en tout genre. Certains voient leur dernière heure arriver. Méprise. Les assaillants étaient en fait d'autres familles venues grossir le lot des réfugiés de la paroisse. A moins d'un kilomètre de là, quelques minutes plus tôt, aux environs de 9 h 30, le colonel Despouys, le chef de corps du groupement tactique inter-armes (GTIA) Scorpion, déployé dans l'est de la Républicaine centrafricaine, perd en un instant le fil de ses explications sur le processus de cantonnement puis de désarmement des combattants de la Séléka, sur la nécessité d'encourager ceux qui veulent la paix. « Ca dégénère pour de bon », s'inquiète l'officier français.

« LA PROCHAINE FOIS, JE LE DÉCOUPE »

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Un hélicoptère Gazelle vient de détruire un pick-up des ex-rebelles. Des jets de mortier éclairants sont déclenchés pour intimider l'autre camp, qui réplique au lance-roquette. Un soldat des forces spéciales de retour de mission lâche, excédé, en sautant de son véhicule : « La prochaine fois, je le découpe. » Son équipe vient d'échapper à une rafale non loin de la cour d'appel.

RCA, Les troupes Sangaris à Bambéri le 22 Mai

Coup de chaud à la résidence du préfet transformée en base militaire française. Le colonel Despouys craint fortement que le nouvel « état-major » de la Séléka n'ait plus le contrôle de la situation. « C'est un malentendu », minimise le capitaine Ahamat Nedjad Ibrahim, le porte-parole militaire de ceux qui se sont rebaptisés « Forces Républicaines ».

Plusieurs des plus importants officiers, comme le général Zacaria Damane ou Ali Darassa, acquiescent. Ils viennent, disent-ils, de perdre deux soldats suite à une incompréhension avec les soldats français. Les deux parties reconnaissent que deux pick-up des ex-rebelles, dont l'un équipé d'une mitrailleuse lourde et chargé de combattants, se sont avancés à la sortie ouest de la ville de Bambari. Les Séléka prétendent que leurs hommes étaient partis pour relever les leurs à la barrière. Qui a ouvert le feu ? Chaque camp se rejette la responsabilité. Le médecin chef de l'hôpital confirme un décès par balle et six blessés. La Séléka parle de quatre morts dont deux civils.

« NOUS MOURRONS ENSEMBLE »

Dans l'après-midi, le calme est revenu mais il demeure d'une infinie fragilité. Les rues de Bambari sont tenues par des civils, essentiellement de jeunes éleveurs peuls, et des soldats armés. Pierres et bouts de bois servent de barricades sur les chaussées de terre défoncées.

Leur colère est avant tout motivée par la peur de voir les miliciens anti-balaka, leurs ennemis, rentrer dans la ville. Ils ne sont qu'à quelques kilomètres et contre eux les combattants de la Séléka est perçue comme l'unique garantie sécuritaire. Les voir perdre leur statut de maîtres de la ville sous pression internationale et de la présidente de transition Catherine Samba-Panza terrorise la population musulmane.

Lire le récit en images :  La longue fuite des musulmans centrafricains
Carte de la Centrafrique.

Dans la soirée, le préfet, l'imam, un représentant de la Séléka ont lancé sur les ondes de radio Béoko, une radio locale, un appel au calme. « A tous ceux qui se sont réfugiés dans les églises, je vous demande de rentrez chez vous. Ne craignez rien... Nous ne mourrons pas chacun de notre côté. Nous mourrons ensemble », a déclaré le préfet, nommé lorsque la Séléka tenait le pouvoir à Bangui, la capitale.

Son récepteur en main, Béatrice n'est pas convaincue par cet appel à l'unité. « C'est pas vrai ce qu'il dit… Les Séléka et les jeunes musulmans volent les motos des nôtres. Les pauvres femmes doivent payer 200 francs, 500 francs pour aller au champ ou quand elles vont ramasser quelques fagots. Sinon, ils vous tapent. » Béatrice s'endormira ensuite entourée de ses six enfants et petits enfants dans un couloir de la paroisse Saint-Joseph.

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