Affaire BNP-Paribas : la banque prête à sacrifier l'un de ses directeurs généraux

Affaire BNP-Paribas : la banque prête à sacrifier l'un de ses directeurs généraux

    BNP Paribas, sous pression, est sur le point de se séparer de l'un de ses directeurs généraux, Georges Chodron de Courcel. Elle accéderait ainsi à une demande des autorités américaines qui menace la banque française d'une amende record de 10 milliards de dollars et d'une interdiction de toutes transactions en dollars, ce qui feraient fuir nombre de ses clients étrangers.

    La banque française a informé le département américain de la Justice (DoJ) et le régulateur bancaire de New York, Benjamin Lawsky, que Georges Chodron de Courcel, par ailleurs président de la filiale suisse, était sur le départ.

    Benjamin Lawsky menace de suspendre les activités aux Etats-Unis de BNP Paribas, qu'il accuse d'avoir enfreint l'embargo américain en réalisant des opérations en dollars avec des pays comme l'Iran ou le Soudan. Il a demandé il y a plusieurs mois la tête de Georges Chodron de Courcel, mais l'établissement financier renâclait.

    C'est l'une des premières grandes concessions que BNP Paribas accepte de faire dans ses négociations avec les autorités américaines. BNP Paribas risque une amende record, qui pourrait avoisiner les 10 milliards de dollars selon la presse américaine.

    Le régulateur américain réclame la tête d'une douzaine de banquiers

    Au total, Benjamin Lawsky exige le licenciement d'une douzaine de banquiers associés aux opérations qu'il juge litigieuses, dont plusieurs hauts dirigeants. BNP Paribas a déjà établi une liste de noms. Celui du président du conseil d'administration de la première banque française, Baudouin Prot, n'y figure pas.

    Outre leur licenciement, Benjamin Lawsky exige qu'ils restituent à la banque une partie de leurs rémunérations.

    Apparenté à Bernadette Chirac et diplômé de l'école Centrale de Paris, Georges Chodron de Courcel, 64 ans, a fait toute sa carrière au sein de la banque. Il est l'un des trois directeurs généraux délégués de la banque aux côtés de Philippe Bordenave et François Villeroy de Galhau.

    Dans le cadre des réceptions avant les cérémonies du 70e anniversaire du D-Day, François Hollande espérait évoquer l'affaire ce jeudi soir au diner avec Barack Obama. Mais le président des Etats-Unis a d'ores et déjà fait savoir que «la tradition américaine est que le président ne se mêle pas des affaires de justice».

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    Des employés déjà licenciés

    Côté français, on fait pourtant preuve de bonne volonté. «La banque a pris des décisions lourdes, en interne, pour adapter ses procédures. Un certain nombre de collaborateurs qui avaient participé aux transactions concernées ont été remerciés dans des conditions nettes et claires», a révélé le ministre des Finances Michel Sapin auprès du journal Le Monde.

    La veille, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, avait admis la nécessité d'une sanction. Il avait en revanche critiqué le montant mirobolant de l'amende: «S'il y a eu une faute, il est normal qu'il y ait une sanction mais la sanction doit être proportionnée et raisonnable. Ces chiffres-là ne sont pas raisonnables», a-t-il déclaré sur France 2.

    VIDEO. Laurent Fabius sur France 2 mardi matin

    Et Michel Sapin d'insister ce jeudi: «Payer pour le passé, ça parait légitime, payer pour l'avenir serait illégitime». Comme le ministres des Affaires étrangères, le ministre des Finances regrette une «disproportion manifeste».

    «La peine de mort n'est pas acceptable sur aucune entreprise»

    Visiblement énervé, le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg est allé plus loin dans l'invective. «Il est parfaitement normal que nous demandions le retour à la raison, car quelles que soient les fautes, la peine de mort n'est pas acceptable sur aucune entreprise, quelle qu'elle soit», a-t-il déclaré sur Europe 1. Et d'ajouter: «Il n'est pas acceptable que l'une des premières banques mondiales soit attaquée de cette manière». Selon Arnaud Montebourg, «cela va poser beaucoup de problèmes entre les deux gouvernements».

    La France a accentué la pression ces dernières heures en laissant entendre que cette affaire pourrait peser sur l'attitude de la France dans la négociation du traité de libre échange avec les Etats-Unis. Et cette semaine, le gouverneur de la banque de France Christian Noyer a fait le déplacement à New York pour rencontrer le procureur de Manhattan chargé du dossier, Cyrus Vance. Celui là même qui avait inculpé DSK de crime sexuel avant d'être contraint d'abandonner les charges pesant sur l'ancien patron du FMI.

    Mercredi, le secrétaire d'Etat américain John Kerry s'est toutefois voulu rassurant. Il a expliqué vouloir un traitement «juste et que cela reflète quelque chose d'adéquat par rapport à ce qui a pu se passer». BNP Paribas, qui mène depuis plusieurs mois des négociations avec la justice américaine, ne s'exprime pas sur le fond de l'affaire. Sa réputation et son positionnement en bourse sont déjà menacés.

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