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Logement : la loi Duflot au risque du « détricotage »

Le gouvernement est accusé de vouloir édulcorer la loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové (ALUR) pour se réconcilier avec un secteur sinistré.

Par , et

Publié le 12 juin 2014 à 10h57, modifié le 12 juin 2014 à 13h46

Temps de Lecture 4 min.

C'est une des priorités affichées du quinquennat. Un thème majeur servi par deux lois portées par l'ex-ministre du logement Cécile Duflot. Le logement va-t-il devenir un point de fragilité supplémentaire pour François Hollande ?

Lire aussi : Article rĂ©servĂ© Ă  nos abonnĂ©s Sylvia Pinel, ministre fragile d'un « domaine sinistré »

Toute la journée, mercredi 11 juin, le gouvernement est monté au front pour démentir des rumeurs de « détricotage » de la loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové (ALUR). Plusieurs médias avaient affirmé au matin que le gouvernement s'apprêtait à édulcorer les mesures phares de la loi, notamment l'encadrement des loyers et la garantie universelle des loyers, en retardant les décrets d'application ou en les vidant de leur substance.

« On ne remet rien en cause, Duflot s'emballe pour rien », a déclaré Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement, faisant allusion à la réaction sur les réseaux sociaux de l'ex-ministre du gouvernement Ayrault. « La nouvelle offensive contre l'encadrement des loyers a une légèreté de patapouf… qui paye les boîtes “d'influence média” cette fois ? », avait lancé Mme Duflot dans un tweet aussi vague qu'accusateur.

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« Cent décrets, c'est un gros convoi, ça demande du temps pour être appliqué, cela se fera au fur et à mesure », a assuré M. Le Foll. Sollicitée, Mme Duflot n'a pas souhaité réagir, mais pour son entourage, « la consigne pour que la loi ALUR ne soit pas appliquée viendrait de Matignon ». Le gouvernement chercherait ainsi à se réconcilier avec les professionnels du logement, hostiles à toute régulation du marché de l'immobilier. Dans l'après-midi, au cours d'un point presse improvisé et en l'absence de Sylvia Pinel, son cabinet démentait toute remise en cause de la loi et précisait que les premiers décrets étaient attendus « à l'été ou avant l'été ». Leur publication sera par ailleurs « priorisée » en fonction de leur capacité à « relancer la construction et à favoriser le pouvoir d'achat ».

La nouvelle ministre du logement a hérité de la part de l'écologiste Cécile Duflot d'un « monstre » législatif de 85 articles, qui nécessite un lourd travail réglementaire pour sa mise en œuvre. Deux cents mesures d'applications regroupées en une centaine de décrets doivent sortir, notamment pour border des mesures aussi emblématiques que l'encadrement des loyers, le montant des honoraires de location, la garantie universelle des loyers ou encore la réforme de l'attribution des logements sociaux. La loi ne donne qu'un cadre. Au fur et à mesure de l'élaboration puis de l'examen de la loi, les ambitions de départ s'étaient déjà réduites.

« L'ENCADREMENT SERA APPLIQUÉ D'ABORD À PARIS »

Sur l'encadrement des loyers, Cécile Duflot elle-même avait, le 28 mars, précisé dans un communiqué que celui-ci serait effectif dès l'automne uniquement dans l'agglomération parisienne, puis progressivement dans vingt-sept autres agglomérations, sans préciser de date.

Mme Pinel réitère aujourd'hui les annonces précédemment faites. « L'encadrement sera appliqué d'abord à Paris, car seule la capitale est dotée d'un observatoire à même de donner des indicateurs qui permettront de fixer le loyer de référence », indique son entourage. Le décret devrait sortir à l'automne et la mesure être effective d'ici la fin de l'année. Hors de la capitale, la faisabilité de la mesure a été mise à mal par une étude commandée par Mme Duflot mais dévoilée après son départ, qui concluait que seuls 8 des 19 observatoires locaux étudiés avaient des données exploitables.

La garantie universelle des loyers, qui devait remplacer la caution, a déjà été détricotée au cours de l'examen de la loi. L'idée de créer un fonds qui sécuriserait les propriétaires et faciliterait l'accès au logement pour tous les locataires n'est plus obligatoire. Les propriétaires pourront continuer à privilégier le système de la caution. La question de son financement n'a jamais été tranchée, et sa mise en œuvre n'est prévue dans le texte qu'à partir de 2016. La mesure ne serait pour autant pas enterrée, assure-t-on au cabinet de Mme Pinel. « Nous cherchons à dégager des lignes de financement. Des discussions sont en cours sur le sujet avec Action Logement. [organisme de financement de logement social] »

FLOU

Le chantier du plafonnement des frais d'agence est également en négociation. Là encore, la loi avait laissé une marge de manœuvre en ne fixant pas de chiffres. Les honoraires des agents immobiliers seront calculés en fonction de la surface et de la zone géographique du bien, et non plus du loyer. « Nous nous battons pour arriver à une solution équilibrée qui nous permette d'assurer la viabilité de nos agences », indique Jean-François Buet, président de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim). La nouvelle ministre pourrait lâcher un peu de lest sur la fourchette évoquée par sa prédécesseure.

Le flou laissé par la loi présente l'avantage de permettre au gouvernement de faire marche arrière sans en avoir l'air. Il y a urgence. Le ministère du logement doit donner des signes rassurants à un secteur plombé, qui accuse la loi ALUR d'être une des causes de sa morosité. « Le nombre de bailleurs investisseurs a été divisé par trois dans nos agences », affirme M. Buet. La tendance à la baisse des prix d'achat et de loyers dans de nombreuses villes et la chute de la construction sont autant d'arguments avancés par les professionnels pour desserrer la loi ALUR.

Entre mai 2013 et avril 2014, loin de l'objectif de François Hollande de 500 000 logements par an, le nombre de mises en chantier affiche un recul de 6,5 %, à 316 370 unités. Selon la Fédération du bâtiment, les conséquences sur l'emploi sont importantes. 15 000 et 20 000 logements en moins équivaudraient à une perte de 30 000 à 40 000 emplois.

Lire le focus (en édition abonnés) : Article rĂ©servĂ© Ă  nos abonnĂ©s La politique de Cécile Duflot pèse sur la construction de logements neufs

A l'issue du conseil des ministres du 25 juin, Sylvia Pinel devrait préciser les 50 mesures de simplification déjà engagées par Cécile Duflot et évoquées par Manuel Valls, le 8 avril, dans sa déclaration de politique générale. L'objectif est de réduire les coûts et les délais de construction. Des mesures pour accélérer la construction de logements sociaux sont aussi attendues.

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