Alors que le ministre de l’éducation, Benoît Hamon, n’a pour l’heure rendu aucun arbitrage au sujet des ABCD de l’égalité, le camp des « antis » occupe le terrain. Cette fois, ni dans la rue ni devant les écoles, mais dans la salle de conférences d’un hôtel parisien. Jeudi 12 juin, la Manif pour tous et le collectif de parents VigiGender ont organisé une « soirée décryptage » des ABCD – ce programme expérimenté au primaire et destiné à lutter contre les stéréotypes sexués.
A trois semaines de la fin des classes, les détracteurs de cet outil pédagogique, accusé d’être le vecteur d’une supposée « théorie du genre », entendent peser sur la décision du ministre de poursuivre ou non le dispositif. Officiellement, M. Hamon attend les résultats d’une évaluation. Il s’agit surtout de trouver une issue dans ce dossier miné par un an de polémiques. « Plusieurs déclarations laissent entendre que les ABCD seront reconduits, et cela nous inquiète », a déclaré Ludovine de La Rochère, la présidente de la Manif pour tous, en introduction de la soirée.
« LE SUJET EST GRAVE »
Dans la salle, les quelque 200 auditeurs semblent d’emblée conquis. Ils sont pour beaucoup bénévoles, adhérents ou donateurs de la Manif pour tous, et ont défilé ensemble, en 2013, contre le mariage homosexuel. Sur la scène, cinq « experts » – deux philosophes, une juriste, un pédopsychiatre et une sexologue. Aucun enseignant du primaire. L’éducation nationale n’est invitée à la soirée que par le biais d’un grand écran, sur lequel sont diffusés des entretiens avec des « théoriciens des ABCD » provoquant tantôt la stupeur, tantôt des rires.
Tour à tour, les intervenants ont étalé leurs arguments « anti-ABCD ». Le philosophe Thibaud Collin est venu mettre en doute une « vision asexuée de l’être humain », tandis que le pédopsychiatre Christian Flavigny a dénoncé un programme « pernicieux » qui « brouille la maturation des enfants ». Dans un autre registre, la juriste Anne-Marie Le Pourhiet a questionné le droit d’un gouvernement, « dans une démocratie libérale, de mener un tel formatage des enfants ».
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