1962 à Ipanema. Le compositeur Tom Jobim et le poète Vinicius de Moraes “boivent à foison” au bar Veloso, raconte le journal espagnol El Mundo. Sur leur droite, à cinquante mètres, la désormais célèbre plage d’Ipanema. De l’autre côté, la favela Vigidal. Tous les jours, une jeune fille à la longue chevelure noire passe devant le repère où ils enchainent les verres. Elle marche vers la plage, comme dit la chanson qu’ils vont écrire “inspirés par le whisky et par le pas chaloupé de l’adolescente” de bonne famille.

Elle s’appelle Heloisa Eneida Menezes Paes Pinto. Elle a 15 ans. Son père est général et “elle rougit en passant devant le bar sifflée et complimentée par Vinicius et Jobim”, relate le quotidien. Le premier écrira les paroles, le second la musique. Quelques notes de bossa nova plus tard, “Helo” devient “la garota de Ipanema”. Après la reprise par Stan Getz, la première d’une longue série, elle devient pour toujours “the girl from Ipanema”, la fille d’Ipanema.

La fille d’Ipanema est diplômé en droit et en journalisme

A l’époque, tout le monde l’appelait “Helo”. Aujourd’hui, devenue Heloisa Pinheiro et mère de quatre enfants, elle tient un magasin de bikinis à Rio de Janeiro, relate El Mundo. Un magasin baptisé “garota de Ipanema”, tout comme le bar Veloso qui a changé de nom… et d’adresse, car la rue aussi a pris un patronyme plus illustre: rue Vinicius de Moraes.

A 67 ans, Heloisa est blonde à présent. Diplomée en droit et en journalisme, c’est dans le spectacle qu’elle a tenté sa chance “avant de finir dévorée par la chanson qui l’avait rendue célèbre”, explique El Mundo. Actrice de séries télévisées, présentatrice, elle pose pour playboy dans les années 1980. Elle récidive à presque 60 ans en 2003, au côté de sa fille.

La légende veut que Tom Jobim l’ait demandé en mariage. Econduit, il termine témoin au mariage de sa muse.

Ceux qui viennent au bar demande souvent : “A-t-elle vraiment existé?”
rapporte el Mundo, avant de répondre non sans un brin de nostalgie : “La réponse se
trouve entre ces murs recouvert de journaux jaunis par le temps.” Au
mur, entre les photographies de la plage, de Vinicius ou de Jobim, une image sépia de la jeune fille éternellement jeune et brune sur la plage d’Ipanema.

Camille Drouet