La naissance d'un front anti-Hollande

Les 41 frondeurs socialistes, des écolos et les communistes se regroupent. Ils se lancent cette semaine dans une guérilla parlementaire contre des textes clés pour le gouvernement.

La naissance d'un front anti-Hollande

    Il y a le feu dans la majorité. Déjà occupés par les grèves, François Hollande et Manuel Valls doivent aussi faire face à la naissance d'un nouveau front politique, alors que s'ouvrent demain à l'Assemblée nationale les discussions sur deux textes essentiels pour le gouvernement (projet de loi de finances rectificatif et financement de la Sécurité sociale). Pour la première fois depuis le début du quinquennat, socialistes déçus, écologistes et communistes ont jeté les ponts d'un bloc clairement hostile à la politique du chef de l'Etat.

    Qui le compose ?

    D'un côté, les 41 députés frondeurs du PS (de l'aile gauche comme Henri Emmanuelli à d'ex-proches de Dominique Strauss-Kahn comme Laurent Baumel ou des amis de Martine Aubry tel Jean-Marc Germain). De l'autre, Pierre Laurent le secrétaire général du Parti communiste. Au milieu, des écologistes d'EELV, avec l'ex-ministre Cécile Duflot en « marraine » des frondeurs. Ce week-end, ils se sont réunis pour la première fois à Paris. Tous sont des polytraumatisés du 14 janvier, le jour où, lors de sa conférence de presse semestrielle, François Hollande a annoncé son pacte de responsabilité.

    Que veut-il ?

    « 20 Mdsâ?¬ de cadeaux aux entreprises, financés par les classes moyennes et populaires, c'est la goutte d'eau », estime le député Jean-Marc Germain. Les choix de François Hollande pour retrouver la croissance sont remis en cause. « La politique fiscale penche trop en faveur des entreprises et pas assez des ménages, le rééquilibrage est urgent », clame le député Laurent Baumel, qui milite pour des gestes plus marqués en faveur du pouvoir d'achat. Pour Stéphane Sitbon-Gomez, conseiller de Duflot, EELV se « désolidarise complètement du gouvernement ». La preuve, les écologistes ont rejeté ce week-end à l'unanimité le projet de loi de finances rectificatif.

    Quelle stratégie ?

    « La gauche peut mourir », a mis en garde ce week-end le Premier ministre. Les contestataires font, eux, la démonstration inverse : « L'unité de la gauche est possible, mais sur une ligne qui n'est pas celle du président », affirme le député Pouria Amirshahi. La bataille parlementaire peut être le creuset de ce nouveau rassemblement. Les frondeurs du PS préparent 15 amendements. Parmi eux, la suppression du gel des prestations sociales et des baisses de charges accordées aux entreprises, la création de 150 000 emplois d'avenir et le recrutement de 150 000 apprentis. Ils prévoient de les discuter directement dans l'Hémicycle en espérant le vote, au cas par cas, des communistes (55 députés) et des écologistes (17).

    Ont-ils une chance ?

    Encore faut-il entraîner les députés socialistes. Attendu à leur réunion demain, le Premier ministre entend peser de tout son poids contre « la guérilla parlementaire ». « Valls n'est pas un conseiller pédagogique d'éducation, il n'a pas assisté aux débats sur nos amendements », grince déjà Amirshahi. De fait, les frondeurs sont loin de faire l'unanimité. « C'est le bal des aigris et des ingrats, dénonce le député de l'Ardèche Pascal Terrasse. Qu'ils aillent au bout de leur logique et qu'ils partent. » Quant aux députés verts, ils sont divisés. Se détacher de la majorité serait suicidaire, prévient leur coprésident François de Rugy : « Ce serait le retour à une forme d'isolationnisme. » C'est donc loin d'être gagné pour le bloc anti-Hollande. Une hirondelle, cependant pour le chef de l'Etat : le soutien d'un nouveau parti venu du centre (voir ci-dessous)...