Le financement de la CGT au cÅ?ur du procès du comité d'entreprise d'EDF-GDF

Le financement de la CGT au cÅ?ur du procès du comité d'entreprise d'EDF-GDF

    Le rôle et le financement de la CGT ont été, mardi, au centre des débats du procès des malversations présumées de la Caisse des activités sociales (CCAS), le comité d'entreprise d'EDF-GDF, le plus important comité d'entreprise de France, doté d'un budget de 400 millions d'euros. La justice reproche aux seize prévenus d'avoir détourné des fonds de la CCAS pour financer des activités ne relevant pas de son objet social, au bénéfice de la CGT, du PCF ou de la société du journal l'Humanité.

    Les seize prévenus comparaissent depuis le 2 juin devant le tribunal correctionnel de Paris, poursuivis pour abus de confiance, recel et complicité au préjudice de la CCAS, organisme dépeint par des témoins comme une institution à part, héritière du modèle social français.

    «La CCAS n'est pas un comité d'entreprise»

    Parmi ces détournements figure la captation d'images des spectacles de la fête de l'Humanité entre 1997 et 2005 pour un coût estimé à 1,11 million d'euros. L'accusation conteste également la prise en charge des salaires d'employés de la CCAS ou d'EDF, mis à la disposition de la CGT ou du PCF. Parmi les six salariés visés figurent l'une des secrétaires de Bernard Thibault, l'ex-secrétaire général de la CGT, et la sénatrice des Hauts-de-Seine Brigitte Gonthier-Maurin.

    Cités à l'audience par la défense, l'ancien président d'EDF François Roussely, le juriste Antoine Lyon-Caen et l'historien du syndicalisme et des mouvements sociaux Michel Dreyfus, ont tour à tour expliqué l'originalité de la CCAS dans l'histoire du mouvement social qui, selon eux, pourrait expliquer ses relations particulières avec la CGT et les investissements contestés. «La CCAS n'est pas un comité d'entreprise, même si le législateur a essayé ces dernières années d'insérer cette institution originale dans le cadre général des entreprises privées», a avancé le professeur Lyon-Caen.

    «A l'époque, le syndicalisme ne se résumait pas à la défense des travailleurs»

    «Son histoire commence sous le Front populaire même si sa création date de 1946. Elle correspond au modèle social français de l'après-guerre avec les nationalisations, les comités d'entreprises, la Sécurité sociale...», a expliqué Michel Dreyfus, en soulignant le poids historique de la CGT et les rapports étroits du syndicat avec la direction d'EDF-GDF, après la nationalisation de l'industrie électrique et gazière sous la houlette du ministre PCF, Marcel Paul, président de la CCAS et secrétaire de la fédération CGT de l'éclairage.

    «La CCAS c'est une institution de notre République qui lui a fourni des ressources exceptionnelles (son budget est alimenté par 1% du produit des ventes de gaz et d'électricité) à une époque où le facteur travail était aussi considéré que le facteur capital», explique François Roussely

    «A l'époque, le syndicalisme ne se résumait pas à la défense des travailleurs, il devait aussi concourir à leur épanouissement: loisir, prévoyance, assistance aux familles», a souligné Antoine Lyon-Caen, en justifiant notamment les investissements réalisés dans la culture. Interrogé sur les «décharges de personnels» de la CCAS et d'EDF vers les syndicats, le professeur a évoqué «la lourde charge qui pèse sur les confédérations, leurs responsabilité sociales et la faiblesse de leurs ressources».

    Les mises à disposition de personnel en question

    «Leurs moyens principaux proviennent des mises à disposition de personnel, le plus souvent de la fonction publique. (...) Il est de tradition qu'une partie de ces décharges de personnel soit ensuite redirigée vers les confédérations syndicales», a-t-il assuré, en invoquant une enquête parlementaire. «On peut penser ce qu'on veut de cette pratique mais elle est historique et n'a jamais été contrariée», a-t-il affirmé. Selon le syndicat Sud-énergie, partie civile au procès, entre 40 et 50 salariés d'EDF, selon les années, auraient ainsi été mis à la disposition des fédérations syndicales.

    Un constat également fait par le juge d'instruction qui avait comptabilisé 26 agents d'EDF mis a disposition de la fédération CGT du CCAS pour un appui administratif, hors l'exercice de tout mandat syndical». Mais cette pratique s'inscrivait dans le contexte de dispositions anciennes et sans dissimulation à la connaissance des autorités, avait constaté le magistrat, pour qui il n'en allait pas de même pour les salariés de la CCAS ou d'EDF qui travaillaient directement pour la CGT ou le PCF.