Cela se passe dans une école privée de l’Ariana. Les enfants de la première année primaire, ayant terminé les examens de fin d’année, s’adonnent à des activités de détente. La maitresse leur propose une séance de coloriage, histoire d’éveiller leur sens artistique.

Le dessin à colorier représente une petite fille dans une prairie. Un enfant a colorié le visage de la fille en noir… Ses camarades ont pouffé de rire et se sont interrogés sur le choix de la couleur. «Pourquoi dessines-tu une noire? Il ne fallait pas, regarde les nôtres!», lui ont-ils dit en le couvrant de lazzis…

La maitresse, interpellée par le boucan, a demandé aux enfants les raisons de leurs rires. «Mais maitresse, il a colorié la fille en noir», a lancé l’un des élèves, comme pour dénoncer un «criminel».

Et là, surprise : au lieu de reprendre gentiment les enfants et leur expliquer qu’une personne peut être noire, brune ou blanche et que leur camarade n’a pas eu tort de colorier la fille en noir, la maîtresse a eu une réaction pour le moins étonnante. «Ben alors, tu n’as trouvé que le noir pour colorier le visage de la fille?», a-t-elle lancé au «petit fauteur de trouble», tout en en rigolant elle-même.

Heureusement qu’il n’y avait pas de petite fille noire dans la classe, sinon on aurait imaginé l’impact dévastateur qu’aurait eu sur elle une telle scène !

Manifestation contre le racisme à Tunis.

Le soir, l’enfant a rapporté l’histoire à ses parents: il ne comprenait pas la réaction de ses camarades et trouvait même que son dessin était le plus joli «Qu’est ce qui leur a pris maman? N’ont-ils jamais vu de gens noirs autour d’eux?», s’est-il interrogé.

Cette scène anodine aurait pu passer inaperçue… Mais elle est lourde de sens. Elle dénonce le racisme ordinaire de la société tunisienne et le manque de conscience chez les éducateurs de la nécessité de combattre le racisme dès l’école.

Y. N. M.