La Coupe du monde au Brésil n’est point synonyme de fête pour tous les
Africains. Non en raison des défaites successives que les équipes du
continent, à l’exception notable des Eléphants [Côte d’Ivoire],
subissent au fil de la compétition ; mais parce que, sur la partie
sahélienne du continent en particulier, certains groupes ont la cynique
et obscurantiste idée de mettre paradoxalement à profit cette occasion
des plus festives pour continuer à semer désolation et horreur dans de
nombreuses familles.

C’est ce qui s’est passé ces derniers jours au Nigeria et au
Kenya. Au total, dans ces deux pays, pas moins de 80 personnes viennent
de perdre la vie dans des attentats terroristes. Dans l’un et l’autre
cas, Boko Haram et les chebabs somaliens sont pointés du doigt. Face à la série
d’attentats horribles et meurtriers qui pourraient encore s’abattre sur
la partie nord du Nigeria, la très probable élimination des Super Eagles
nigérians est certainement de moindre importance. Certes, dans les
conditions normales, la piètre prestation de l’équipe nigériane face au
modeste Iran serait une source de préoccupation. Sauf que depuis un
certain temps le géant de l’Ouest africain vit dans la peur panique.

Tuer la passion du foot

Element inconnu

En cause ? La secte islamiste Boko Haram qui, ces derniers
temps, soumet l’Etat fédéral et les forces de sécurité en particulier à
de rudes épreuves. Après avoir prévenu qu’ils séviraient sans pitié
contre ceux qui laisseraient libre cours à leur passion en faveur du
football pendant cette Coupe du monde, les combattants d’Abubakar Shekau
sont passés à l’acte dans la soirée du 18 juin, à la faveur du match
entre le Brésil et le Mexique. Avec une bombe posée dans un
pousse-pousse, les terroristes se sont attaqués à un groupe de personnes
qui suivaient la rencontre à Damaturu, dans l’Etat de Yobé [nord-est].
Sur place, on a déploré au moins une vingtaine de morts. Aucunement
affectés, les terroristes promettent de poursuivre dans cette folie
meurtrière à chaque fois qu’ils en auront l’occasion.

Boko Haram et les chebabs, le tandem de la mort


Si, a priori, il n’y aucune connexion visible entre Boko
Haram et les chebabs, les agissements des deux groupes terroristes de
ces derniers jours coïncident cependant. Et relèvent à n’en pas douter
de la même logique. C’est ainsi que dimanche et le lundi derniers [les 15 et 16 juin], le
Kenya aussi a enregistré deux attentats perpétrés vraisemblablement par
les chebabs.

Dans les deux cas, les auteurs présumés, à la différence du cas
nigérian, ont clairement revendiqué leur forfaiture. Le total des pertes
en vie humaine s’élève à 60 personnes. Mais, au-delà de ce bilan des
plus effroyables, c’est la polémique que le président Uhuru Kenyatta
vient de susciter à propos de l’attentat de Mpeketoni [sud-est] qui
préoccupe davantage.

Selon le président kényan en effet, ledit
attentat serait l’œuvre de l’opposition politique locale. Une prise
de position qui tranche avec l’avis de tous les spécialistes en la matière
et qui est perçue comme une attaque frontale contre l’opposition
incarnée par Raila Odinga.

Les conséquences de cette déclaration que l’on redoute le plus seraient
qu’elle précipite le pays dans des troubles sociopolitiques, et
réveillent les vieux démons de l’ethnocentrisme, à l’image de ceux d’il y
a sept ans qui avaient fait au moins 1 200 morts. Les craintes sont d’autant plus
grandes que les différentes formations politiques sont définies selon
les contours ethnoculturels du pays. Alors, attention, danger !