Bonnemaison acquitté : neuf Français sur dix veulent une loi en faveur de l'euthanasie

Selon notre sondage réalisé hier après l'acquittement du Dr Bonnemaison, les Français réclament plus que jamais une loi sur cette douloureuse question de société.

Bonnemaison acquitté : neuf Français sur dix veulent une loi en faveur de l'euthanasie

    C'est un « oui » franc et unanime. Après l'acquittement du docteur Nicolas Bonnemaison, accusé d'avoir empoisonné sept patients en fin de vie, et la saisine en urgence de la Cour européenne des droits de l'homme sur le sort de Vincent Lambert, en état végétatif depuis 2008, notre sondage, réalisé par BVA après le verdict de la cour d'assises de Pau (Pyrénées-Atlantiques), montre que près de 9 Français sur 10 (89 %) se disent favorables à une loi visant à autoriser l'euthanasie. Chez les 65 ans et plus, le taux monte même jusqu'à 98 %.

    Cela fait de nombreuses années que les instituts de sondage enregistrent cette demande sur le sujet. En 1987 déjà, un sondage TNS Sofres annonçait une proportion de 85 % des sondés favorables à l'idée « qu'un malade soit aidé à mourir à sa demande ». Une enquête plus récente de l'Ifop relevait, plus précisément, que 92 % des personnes interrogées étaient d'accord pour qu'une « loi française autorise les médecins à mettre fin, sans souffrance, à la vie de ces personnes atteintes de maladies insupportables et incurables si elles le demandent ».

    Ce choix sociétal massif semble donc beaucoup moins clivant que ne l'ont été les questions du mariage pour tous et surtout de l'adoption pour tous. Ceci alors que le spectre d'une fracture « pro » et « anti » qui avait divisé le pays hante visiblement toujours les pouvoirs publics. Et ce même si la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a décrit hier l'acquittement du D r Bonnemaison comme une « décision d'humanit? et rappelé que le gouvernement travaillait à une évolution du cadre juridique sur la fin de vie.

    Les Français disent donc vouloir aller plus loin que les dispositions de la loi de 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite loi Leonetti. Mais si le patient, comme c'est le cas pour Vincent Lambert, n'est pas en mesure de formuler sa volonté, qui doit s'en charger ? Dans cette éventualité, le consensus se fissure et l'échantillon de Français interrogés par BVA se scinde quasiment en deux. Ainsi, ils estiment en majorité (53 %) que c'est à la famille d'en décider.

    A l'heure actuelle, pourtant, seul 2 % des Français ont désigné une personne de confiance pour les représenter dans le cas où ils ne seraient pas en mesure de s'exprimer. Restent 47 % des Français à penser qu'une décision « extérieure » est préférable. 41 % veulent que ce soit le médecin tandis qu'une très faible minorité -- 6 % -- se prononce pour l'intervention de la justice. « Pour une majorité, l'euthanasie reste donc une affaire privée », analyse Céline Bracq, directrice de BVA Opinion.

    Aujourd'hui, c'est l'équipe médicale, après consultation d'autres médecins et de la famille, qui prend l'ultime et douloureuse décision. L'objectif de la loi est d'éviter l'acharnement thérapeutique lorsqu'il n'y a plus aucun espoir de récupération. Des directives anticipées, lorsqu'elles ont été rédigées par le patient indiquant ses derniers souhaits, ne représentent qu'une simple indication.

    « L'opinion française, si elle exprime peu de doutes sur le principe même de l'euthanasie, se montre donc plus partagée lorsqu'il s'agit de choisir le responsable de cette lourde décision », résume Céline Bracq. Signe que ce sujet difficile n'est pas si tranché.

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