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Aaron Swartz, itinéraire d'un enfant du Net

Le documentaire « The Internet's Own Boy » dresse un long et beau portrait du militant des libertés numériques qui s'est suicidé l'an dernier en pleine procédure judiciaire.

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Publié le 30 juin 2014 à 12h39, modifié le 31 juillet 2014 à 16h07

Temps de Lecture 3 min.

Affiche de « The Internet's Own Boy », le documentaire consacré à Aaron Swartz.

L'image du film de famille tremble un peu. On y voit un petit garçon lire un livre à voix haute, en butant encore parfois sur les mots. C'est Aaron Swartz, et il a à peine 3 ans.

Surdoué, génie, hacker, activiste, criminel : bien des mots sont utilisés pour décrire ce jeune homme, qui s'est suicidé à l'âge de 26 ans, dans le documentaire de TakePart qui lui est consacré, The Internet's Own Boy.

Emouvant et sensible, le film donne largement la parole aux proches d'Aaron Swartz, qu'il s'agisse de sa famille, de ses amis ou de militants qu'il a côtoyés, pour dresser un portrait riche d'un des grands défenseurs des libertés numériques.

Mort très jeune, Aaron Swartz avait connu plusieurs vies. A 12 ans, il crée sur l'ordinateur familial un projet précurseur de Wikipédia ; à 14, il fait partie de l'équipe qui cofonde la technologie RSS, qui permet d'être informé en temps réel des mises à jour de pages Web. A 16 ans, il fait son entrée à Stanford, la prestigieuse université américaine.

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MILLIONNAIRE ET EMPLOYÉ DE BUREAU

Mais l'arrivée à la fac se passe mal : « On l'a collé dans un programme de baby-sitting pour surdoués, ça l'a rendu dingue », explique le fondateur du site BoingBoing, Cory Doctorow. Il quitte les bancs de l'université pour créer sa propre société, qui finit par fusionner avec un petit projet collaboratif qui va rapidement prendre de l'ampleur : Reddit.com, qui devient rapidement une gigantesque plateforme de discussions. L'entreprise est rachetée par le groupe de médias Conde Nast : Aaron Swartz devient du même coup millionnaire et employé de bureau.

Le monde de l'entreprise lui convient encore moins que la fac. Aaron Swartz est mal à l'aise avec la culture de l'argent qui règne dans la Silicon Valley. Il déteste les grandes sociétés, les profiteurs…

Son idole est Tim Berners-Lee, l'un des principaux créateurs du World Wide Web, qui a choisi de laisser sa création libre et gratuite pour qu'elle puisse bénéficier à tous. Il cesse tout simplement de venir au travail pour se consacrer à des projets plus politiques.

Aaron Swartz, alors âgé de 15 ans, avec le juriste Lawrence Lessig.

La politique n'est pas vraiment une nouveauté pour Aaron Swartz, qui s'est passionné très jeune pour les questions de droit d'auteur et s'est lié d'amitié avec le juriste Lawrence Lessig.

Au fil des années, il est de tous les combats pour les libertés numériques : accès aux données publiques, mouvement contre la loi Sopa aux Etats-Unis (contraignant entre autres un éditeur à fermer une page dès la première notification d'un ayant droit)…

Il coécrit un manifeste pour l'ouverture de l'accès aux données, participe à des dizaines d'organisations, de manifestations, et passe régulièrement sur les plateaux de télévision américains ou russes.

Le documentaire couvre longuement la bataille, finalement victorieuse, d'Aaron Swartz et des organisations de défense des libertés publiques contre le projet de loi Sopa, se laissant parfois aller à quelques raccourcis.

Le film présente ainsi cette bataille politique comme un combat entre de simples citoyens et un conglomérat de grandes entreprises, oubliant un peu vite que les grandes entreprises du secteur technologique ont aussi soutenu le mouvement anti-Sopa.

SON PRINCIPAL TORT : NE PAS ENTRER « DANS LE MOULE »

En octobre 2010, la vie d'Aaron Swartz bascule : quelques semaines auparavant, il avait caché un ordinateur dans un placard du Massachusetts Institute of Technology pour télécharger l'intégralité de la base de données de Jstor, l'une des principales bases de données de publications scientifiques, dont l'accès est payant en dehors des campus. Une pratique qui scandalisait Aaron Swartz, pour qui ces articles, somme de la connaissance de l'humanité, auraient dû être accessibles à tous librement.

Voulait-il les publier en ligne ? Utiliser ces documents pour un projet personnel, comme le suggèrent certains de ses proches ? Arrêté puis libéré sous caution, traumatisé par la procédure judiciaire, Aaron Swartz s'est suicidé avant la tenue de son procès. Son avocat, qui dénonçait un harcèlement juridique à son encontre, se dit encore aujourd'hui confiant dans le fait qu'il serait sorti libre du tribunal.

Pour le père d'Aaron, ce harcèlement et la volonté du procureur de faire un exemple ont largement contribué au suicide de son fils, dont le principal tort était de ne pas entrer « dans le moule ». « Jobs et Wozniak ont lancé Apple en créant des boîtiers pour téléphoner gratuitement en piratant les réseaux. Bill Gates a lancé Microsoft en utilisant les ordinateurs de la fac, ce qui était strictement interdit. La seule différence entre Jobs, Gates et Aaaon, c'est que lui voulait rendre le monde meilleur, pas gagner de l'argent.  »

Lire : Suicide d'Aaron Swartz, activiste à l'origine du format RSS et de Creative Commons


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