
La guerre commerciale que se livrent Amazon et Hachette aux Etats-Unis a franchi une nouvelle étape, mardi 8 juillet. Le géant de la distribution sur Internet a proposé aux auteurs publiant chez la filiale américaine de l'éditeur français de leur reverser la totalité des recettes des ventes de la version électronique de leurs livres. Amazon tente ainsi de mettre dans son camp les écrivains dans ce bras de fer entre les deux groupes qui dure depuis des mois.
Dans le cadre des traditionnelles négociations commerciales annuelles, Amazon essaye de faire pression sur Hachette pour obtenir de meilleures conditions tarifaires afin de dynamiser les ventes de livres électroniques. La brouille a éclaté au grand jour début mai, lorsque Hachette a commencé à se plaindre de l'allongement des délais de livraison, la disparition des précommandes et la suppression des réductions qui pouvaient être offertes sur certains titres. Des méthodes qui ont provoqué une avalanche de protestations des auteurs, qui, dans cette affaire, ont le sentiment d'être pris en otage.
Pour inverser le rapport de force, Amazon tente donc une nouvelle tactique en proposant de verser l'ensemble des recettes des livres électroniques aux auteurs. A cette condition, le distributeur s'engage à arrêter toutes ses pratiques qui nuisent à la vente des auteurs publiés par Hachette. Ce dernier s'est immédiatement opposé à la proposition qu'il qualifie de « suicide ». « Nous invitons Amazon à retirer les sanctions qu'il a unilatéralement imposées et nous allons continuer de négocier de bonne foi et avec l'espoir d'une conclusion rapide », indique l'éditeur.
LES AUTEURS PAS CONVAINCUS
De son côté, Amazon accuse l'éditeur de vouloir mettre les auteurs au centre de la bataille pour faire pression sur lui. Mais pour le groupe de distribution, les enjeux ne sont pas les mêmes que pour Hachette. Renoncer à quelques milliers de livres électroniques n'aurait beaucoup d'impact pour un distributeur réalisant un chiffre d'affaires de 75 milliards de dollars (55,1 milliards d'euros). En revanche, le préjudice pour Hachette serait beaucoup plus important.
La manœuvre n'a visiblement pas séduit les auteurs. Roxana Robinson, la présidente de la Guilde des auteurs, l'association américaine de défense des intérêts des écrivains, a rejeté la proposition. « Si Amazon veut avoir une conversation constructive à ce sujet, nous sommes prêts à l'avoir à tout moment », affirme-t-elle dans un courriel envoyé au New York Times, tout en ayant le sentiment que la proposition d'Amazon est une « solution à court terme qui encourage les auteurs à prendre parti contre leurs éditeurs ». La semaine dernière, l'auteur de best-sellers Douglas Preston a vivement critiqué les méthodes d'Amazon au travers d'une lettre signée par plusieurs autres écrivains de renom.
Au-delà de cette guerre commerciale se joue l'avenir de la distribution du livre électronique. Amazon, qui détient 30 % du marché du livre aux Etats-Unis et même 60 % sur les versions numériques, prétend défendre l'intérêt du consommateur en voulant faire baisser les prix. Hachette, lui, affirme vouloir préserver les intérêts des auteurs.
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