Quelle
fierté et quelle gloire pourrait tirer le président Bouteflika de son parrainage par
le Front de libération nationale (FLN), un parti sclérosé et miné par des luttes de clans, qui vient de le
désigner comme candidat à un quatrième mandat ? Des cadres du parti en
rupture de ban avec la nouvelle direction politique emmenée par Amar Saadani [un fidèle du président]
n’ont pas tardé à réagir à l’annonce de cet appel à la candidature de
Bouteflika, la qualifiant d’illégale et en violation des textes réglementaires
régissant le fonctionnement du parti.

La
précipitation avec laquelle l’annonce de la candidature a été faite dégage un
parfum diffus d’une course de vitesse dans laquelle le FLN a entrepris de s’engager
pour le compte de Bouteflika en vue de planter le décor électoral de la
présidentielle d’avril 2014. Le procédé est pour le moins inédit.

Le principal
concerné, le président Bouteflika, n’a pas soufflé mot de ses
intentions en la matière. Du moins pas publiquement. Mais ne
dit-on pas que le silence vaut aussi consentement ? On imagine mal, en effet,
Bouteflika, dont on connaît l’autoritarisme, accepter de se faire parrainer par quelque partie que ce soit sans son accord. Si tel n’avait pas
été le cas, Saadani aurait déjà été débarqué du FLN.
Expectative et prudence

Ce modus
operandi
de Bouteflika pour (faire) annoncer sa candidature en se faisant
adouber par le FLN, qui l’avait porté au poste de président d’honneur du parti,
tranche singulièrement avec l’étiquette du candidat du consensus, de père de la nation, sous laquelle il s’était présenté lors des précédents scrutins
présidentiels. Le temps est loin où la candidature de Bouteflika donnait lieu à
une véritable mêlée d’opportunistes de tout bord, où l’on ne comptait plus les
formations politiques, les associations de la société civile qui se pressaient
pour la soutenir.

En dehors
d’une composante du FLN, il n’y a pas, selon toute apparence, foule cette fois-ci
pour apporter de l’eau au moulin de Bouteflika. Du moins pas dans les
circonstances politiques actuelles pour le moins floues. La clientèle
traditionnelle du pouvoir n’a jamais été aussi désemparée en l’absence de
signaux politiques clairs sur le candidat pour lequel il faudra se mobiliser
lors du prochain scrutin présidentiel.

D’où
l’expectative et la prudence de la classe politique et de la société civile. Y
compris du côté des plus fervents supporters d’hier de Bouteflika, à l’instar
du Rassemblement national démocratique (RND) qui apparaît moins engagé que le FLN dans le soutien à un quatrième mandat. Question de filiation politique
avec Bouteflika que le FLN revendique pour lui seul ? Sûrement. Mais
personne n’est dupe pour voir derrière cette proximité proclamée l’expression
d’un soutien politique désintéressé en faveur d’un programme politique partagé.

De “candidat
de large consensus” qu’il fut au candidat d’un parti d’arrière-garde et
d’affairisme qui a perdu son aura historique et populaire, Bouteflika a-t-il
brûlé tous ses vaisseaux au terme de ses trois mandats cumulés pour tomber aussi
bas ? L’annonce de sa candidature par le FLN est-elle destinée à couper l’herbe
sous le pied de Benflis [Ali Benflis, membre du FLN, candidat malheureux lors de la dernière
présidentielle] ? Ou ne serait-elle qu’un leurre et une stratégie électorale
qui cachent mal le véritable candidat du pouvoir, que l’on garde bien au chaud
pour des considérations qui tiennent aux équilibres et aux arbitrages internes
du système ? Avec le consentement de Bouteflika ou à son insu.