"La Planète des singes" : Pierre Boulle, le Français à l'origine de tout

Avant les films, il y avait un livre, écrit par l'un des pionniers de la science-fiction française. Une oeuvre trop méconnue chez nous.

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Un poster de
Un poster de "La Planète des singes", version 1968. © 20th Century Fox

Temps de lecture : 3 min

C'est pourtant un nom facile à retenir : Pierre Boulle. Mais combien de ceux qui iront cette semaine voir La Planète des singes : l'affrontement savent que l'homme à l'origine du singe, c'est lui ? Lui, un écrivain avignonnais, né en 1912, et dont deux des romans donnèrent naissance à deux chefs-d'oeuvre du cinéma hollywoodien : Le Pont de la rivière Kwaï, adapté en 1957, et la fameuse Planète des singes, dont une nouvelle interprétation (la huitième !) vient d'être lancée dans nos salles.

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Pierre Boulle ©  Probably Life Magazine
Pierre Boulle © Probably Life Magazine
Pour une fois qu'un Français est roi d'Hollywood, on aurait pu croire que les honneurs dus à son rang lui seraient rendus par ses compatriotes ! Trop rares, hélas, sont ceux qui connaissent l'oeuvre de Boulle au-delà de sa représentation américaine. Or, nul ne sera surpris d'apprendre que cette dernière diffère largement du matériau d'origine, aussi bien sur la forme que sur le fond.

"L'adaptation par Hollywood est une lecture au premier degré avec tous les clichés de la science-fiction", explique Clément Pieyre, vice-président de l'Association des amis de l'oeuvre de Pierre Boulle, dans une interview à L'Express. "Or, il ne faut pas lire La Planète des singes trop sérieusement. Dans le roman, le héros porte un nom de poisson ridicule : Ulysse Mérou. C'est une fable philosophique aux accents voltairiens." Loin du souffle épique des films, loin de la science-fiction rigoureuse et grandiose d'un Isaac Asimov, le récit du Français s'inscrit dans la lignée des contes satiriques des XVIIe et XVIIe siècles tels que le Candide de Voltaire, Les Lettres persanes de Montesquieu ou Les Voyages de Gulliver, de Johathan Swift. Le ton y est ironique, empli de second degré et de fantaisie, à l'image de cette réplique de Zira, la femelle chimpanzé dont le héros s'est rapproché au point de vouloir l'embrasser : "Mon chéri, c'est impossible. C'est dommage, mais je ne peux pas, je ne peux pas. Tu es vraiment trop affreux !"

Humour noir

Mais si l'humour domine, cela n'empêche pas l'oeuvre de Boulle d'être teintée d'une certaine noirceur. Certains passages y sont même plus extrêmes que tout ce qui a pu être montré au cinéma. Ainsi en est-il des relations sexuelles entre Mérou et Nova, la femme placée dans sa cellule par des singes savants - au sens littéral -, curieux d'analyser leur accouplement. Bien que méprisant cette femme primitive apparemment dépourvue d'intelligence, le héros ne résiste pas à ses impulsions, illustrant ainsi pour les scientifiques son caractère proprement "animal".

Dans le célèbre film de Franklin Schaffner (celui par qui la saga cinématographique a commencé en 1968), la démonstration est plus policée. En fait d'Ulysse Mérou, on trouve un capitaine George Taylor à qui Charlton Heston prête ses traits majestueux. S'il prend effectivement Nova pour compagne, ce n'est pas sans romantisme et sans une certaine grandeur d'âme qui lui fait considérer la jeune femme sous sa protection... Cela n'enlève rien pour autant à la qualité de l'adaptation de Schaffner qui explore ses propres thèmes philosophiques et politiques, liés au contexte des années 1960, notamment la lutte contre le racisme.

Autre différence de taille, dans le film, la planète des singes est en réalité, comme vient à le découvrir le héros dans l'une des scènes les plus puissantes de l'histoire du cinéma, la planète Terre. L'histoire prend alors une toute autre dimension et ouvre la porte aux scénarios imaginés près de 40 ans plus tard par La Planète des singes: les origines, qui raconte la façon dont une expérience scientifique a donné naissance au premier singe intelligent. Dans le roman, tout cela n'existe pas. Mais la fin imaginée par Pierre Boulle est tout aussi efficace et surprenante. Et bien plus drôle ! Lisez donc le livre pour la découvrir...

REGARDEZ la fin de La Planète des singes, avec Charlton Heston :


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Commentaires (7)

  • Jepirad

    L'école de Boule pour l'ébénisterie d'art,
    L'algèbre de Boole pour le calcul logique et le calcul des systèmes de l'électronique,
    Mais j'avoue que je ne connaissais pas Boulle l'écrivain français honoré par les américains. Mais finalement n'est pas un mal français que d'ignorer ce qui réussissent et de porter au firmament les imposteurs ?

  • Josick

    Le livre est en effet beaucoup plus profond qu'aucune adaptation cinématographique. L'écrit permet aussi de décrire des situations qu'il ne serait pas possible de montrer dans un film "tout public". Dans le livre les humains sont et vivent comme certains grands singes aujourd'hui.
    Les singes les utilisent comme nous le faisons avec eux : dans le livre, les singes chassent l'humain, font des expériences en laboratoire sur lui et l'exhibent dans des zoos.
    Exactement ce que nous faisons avec les grands singes. Cela pourrait nous faire réfléchir à toutes les souffrances, les cruautés et toutes les horreurs que les hommes font subir à ces animaux dotés d'une grand intelligence. Et si les rôles étaient inversés ?

  • Laurent D

    Disons que les dernières adaptations donnent tout le sens à la dernière phrase de Charlon Heston "que les humains soient maudits mille fois maudits".