Comme toujours, même à la basse saison, la basilique Santa Croce de Florence était noire de monde. En ce début d’après-midi du jeudi 19 octobre, plus d’une centaine de touristes arpentaient les travées de l’église, admirant les proportions parfaites de ce joyau de l’art franciscain, qui abrite notamment les tombes de Michel-Ange, Galilée et Machiavel. Un petit groupe de touristes espagnols venus de Barcelone avançait lentement sur la nef droite, entre la deuxième et la troisième chapelle, admirant la tombe de Rossini, quand, sans un bruit et de façon inexplicable, un bloc de pierre d’une quarantaine de centimètres de côté s’est détaché de la voûte, terminant sa chute trente mètres plus bas sur l’un d’entre eux, qui marchait un peu à l’écart.
Après quelques minutes d’efforts dérisoires pour tenter de ranimer la victime, les secouristes ont dû se rendre à l’évidence. Par une malchance invraisemblable, Daniel Testor Schnell, 52 ans, est mort sur le coup, le crâne fracassé, sous les yeux de son épouse.
Chantier permanent
Le moment de panique passé, la basilique a été fermée, jusqu’à nouvel ordre. Depuis New York, où il était en visite officielle, le ministre des biens culturels italiens, Dario Franceschini, a immédiatement réagi : « Nous devons vite comprendre comment a pu se produire ce fait terrible, et s’il y a des responsabilités du côté de l’entretien de l’église », a-t-il déclaré, avant d’annoncer l’ouverture d’une enquête. Selon les premiers éléments fournis par la direction du musée, des contrôles de sécurité avaient été effectués une semaine avant le drame.
« L’ensemble de Santa Croce est un complexe de 11 000 mètres carrés en même temps qu’un chantier toujours ouvert, a expliqué au Corriere della Sera le secrétaire général du musée de la basilique, Giuseppe de Micheli, quelques heures après l’accident. Naturellement, cela nous oblige à chercher à comprendre comment a été possible cet accident qui, outre qu’il est une tragédie, nous apparaît comme un coup du destin. »
Enjeu stratégique
Pour l’Etat italien, naturellement, le plus important est de circonscrire l’affaire, afin de ne pas installer de crainte dans l’esprit des touristes. Car l’enjeu est stratégique : le secteur du tourisme, en croissance constante ces dernières années, est un des ressorts principaux du timide rebond de l’économie italienne (selon la Caisse des dépôts italienne, il contribuerait au PIB à hauteur de 4 %), et Florence est, avec Venise, la destination privilégiée des voyageurs. Or, dans les enquêtes de satisfaction, ceux-ci mettent en avant la sécurité comme l’un des aspects qui ont motivé leur choix de séjour.
Du côté du ministère des biens culturels, on pointe le besoin de réguler et limiter le flux de touristes, en même temps que l’immensité de la tâche d’entretien et de préservation d’un patrimoine unique au monde. Une entreprise titanesque, que l’Etat délègue de plus en plus souvent au mécénat des grands groupes. A Florence, La Dernière Cène, de Vasari, a été restaurée avec l’aide de Prada, et la réfection de la galerie des Offices n’aurait pas été possible sans l’aide de la maison Ferragamo.
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