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  • Cancer du sein : pas de remboursement pour les tests prédictifs du risque de rechute

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     David Bême
    David Bême Rédacteur en chef
     AFP/Relaxnews
    AFP/Relaxnews Agence de Presse

    Cancer du sein : pas de remboursement pour les tests prédictifs du risque de rechute

    La Haute Autorité de santé juge "prématuré" le remboursement par la Sécurité sociale des tests prédictifs du risque de récidive d'un cancer du sein détecté au stade précoce, destinés à distinguer les femmes qui ont besoin ou non d'une chimiothérapie après l'opération de la tumeur. Elle laisse néanmoins possible son financement dans le cadre de l'innovation.

    Le cancer du sein, avec 55.000 nouveaux cas par an, est le cancer le plus fréquent chez les femmes, rappelle la HAS. Les traitements sont adaptés aux multiples formes de la maladie (chirurgieradiothérapiechimiothérapiehormonothérapie). Son stade, avancé (métastases) ou non, et les caractéristiques de la tumeur (par exemple sensible au traitement hormonal) sont pris en compte. Mais pour certaines formes précoces, l'intérêt d'une chimiothérapie après la chirurgie serait nul. Plusieurs tests se proposent d'identifier les femmes qui pourraient s'en passer (et ainsi éviter les effets secondaires de ces traitements). La Haute Autorité de Santé devait se prononcer sur l'intérêt de rembourser ces tests. 

    Pour les cancers du sein précoces, chimio ou pas de chimio ?

    Schématiquement, les cancers du sein sont classés en fonction de leur localisation et de leurs caractéristiques biologiques (cancers hormonodépendants, HER2, triple négatif…). La moitié des cancers découverts chaque année sont des cancers hormonodépendants, de petite taillé (moins de 2 cm) et localisé au sein (pas d’atteinte des ganglions lymphatiques). Dans ce cas, les femmes seront opérées, et certaines auront une radiothérapie, et une hormonothérapie pendant plusieurs années.

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    Avant cette hormonothérapie et jusqu’à une époque récente, les femmes recevaient systématiquement une chimiothérapie pour prévenir l'apparition de récidives dans les 5 à 10 années suivantes. Mais on sait qu’une majorité de femmes n'en auraient pas besoin et subissent ainsi inutilement les effets secondaires de ces traitements lourds. A court terme : nausée, vomissement, perte de cheveux, fatigue et infection, ménopause précoce ou infertilité, neuropathie (engourdissement, picotement ou douleur dans les mains et les pieds). Certains effets secondaires très rares mais graves (insuffisance cardiaque, leucémie) peuvent survenir des mois ou des années plus tard.

    Pour mieux identifier ces femmes, différents tests basées sur des "signatures génomiques" évaluent le risque de récidive et donc la pertinence de recourir ou non à une chimiothérapie, en se basant sur un groupe de gènes impliqués dans le développement de la tumeur à partir d'un prélèvement de celle-ci. Quatre sont disponibles : Mammaprint®, Oncotype DX®, Endopredict® et Prosigna®. Plusieurs ont démontré leur intérêt, la plus vaste et récente étude sur le sujet (portant sur Oncotype DX) avait été présenté en 2018 lors du congrès mondial contre le cancer et publiée dans la prestigieuse revue The New England Journal of Medicine. Nous nous en étions fait l'écho en juin 2018.

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    Environ 4.500 tests ont été réalisés en 2017 dans le cadre des actes innovants.

    La Haute autorité de santé refuse le remboursement pas laisse possible leur financement

    Le remboursement par la Sécurité sociale de ces tests prédictifs du risque de récidive d'un cancer du sein détecté au stade précoce, est jugé "prématuré" par la Haute autorité de Santé (HAS). Cependant, dans un rapport rendu public lundi motivant cet "avis défavorable" au remboursement, la HAS recommande de prolonger "sous condition" le financement de soutien à l'innovation, qui permet actuellement leur prise en charge. Elle "reconnaît l'intérêt potentiel de ces tests comme outil d'aide à la décision thérapeutique", mais "juge indispensable de poursuivre la recherche clinique".

    La HAS a défini précisément la population concernée : les femmes dont la tumeur mesure entre 1 et 5 cm, est sensible à l’hormonothérapie adjuvante, de statut HER2 négatif, de grade 2 et sans envahissement ganglionnaire ou avec un micro-envahissement. Cela représenterait 5 à 10 % des femmes atteintes d’un cancer du sein infiltrant. Après avoir étudié les études sur le sujet, elle estime que "ces essais ne permettent pas de déterminer si, en contexte français, les signatures génomiques présentent une valeur ajoutée par rapport aux critères clinico-pathologiques existants. En effet, les études portent principalement sur des populations ne correspondant pas à la population d’intérêt". D'après différentes études, pour une femme sur cinq, voire une sur quatre, la décision de faire une chimiothérapie adjuvante diffère selon le test utilisé, note la HAS parmi ses critiques.

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    Elle réclame donc une étude comparative des quatre tests disponibles et que cette étude clinique concerne "la population cible de patientes les plus à même d'en bénéficier, soit 2.000 à 4.000 femmes par an selon le chiffrage qu'on a pu faire", a indiqué à l'AFP Cédric Carbonneil, chef de service des actes professionnels à la HAS.

    La HAS "pourra revoir son avis sur le remboursement lorsqu'elle disposera de ces données".

    Une décision contestée

    "Près de 10.000 femmes en France ont bénéficié de ces tests ces trois dernières années", selon le professeur Pascal Pujol président de la Société française de médecine prédictive et personnalisée (SFMPP) qui exprime son désaccord avec la position de la HAS.

    Cette société savante contrairement aux experts de la HAS, estime que les études internationales récentes apportent un niveau de preuves suffisant justifiant le remboursement. Néanmoins, "la SFMPP se félicite que la HAS laisse l'accès des femmes à ces tests en préconisant de prolonger leur financement dans le cadre de l'innovation", ajoute-t-il.

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    "On fait trop de chimiothérapie en France" lance le professeur Roman Rouzier de l'Institut Curie à l'origine de la demande qui a permis d'obtenir le financement dérogatoire de ces tests qui servent à la "désescalade".

    "Éviter les thérapies inutiles, c'est évidemment un bénéfice majeur". "Tant mieux" si le financement des tests est conservé, ajoute ce spécialiste, de toute façon, partisan du contrôle de leur usage à bon escient.


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