Doit-on remettre en place le service militaire obligatoire en Allemagne ? Jusqu’à l’invasion russe de l’Ukraine, cette question semblait presque anachronique outre-Rhin. Mais depuis le retour de la guerre en Europe, elle s’est glissée au cœur des débats du Bundestag. Et dans les pages d’opinion des principaux journaux du pays.

Comme le remarque le journaliste de la Zeit Martin Machowecz, “aucune décision politique n’a été aussi populaire que celle prise par le Bundestag en mars 2011, à savoir la fin du service militaire obligatoire”. La mesure était à l’époque perçue par beaucoup comme une bonne nouvelle. “Les plus vieux se sont réjouis que leurs enfants et petits-enfants ne soient pas forcés d’y participer. Et les enfants et petits-enfants se sont réjouis pour eux-mêmes : ils ne prendraient pas part à la guerre.”

Mais pour l’hebdomadaire de gauche, l’abandon de l’obligation de conscription a eu des effets désastreux sur la société allemande. “Cela a détruit encore davantage le lien qu’entretenaient les Allemands avec leur armée, un lien déjà très controversé, explique le titre. À cause de cette législation, les citoyens se sont mis à considérer la sécurité comme une prestation de service. Cela a entretenu l’illusion que l’on pouvait laisser la guerre aux professionnels et à ceux qui s’y connaissent.”

Renouer des liens avec la Bundeswehr

Le journal voit un lien de cause à effet entre l’état déplorable de la Bundeswehr et la fin du service militaire obligatoire. Il plaide donc pour le retour de ce genre d’initiative, mais de manière “plus libre et joyeuse”.

“Si le service militaire obligatoire était réintroduit, il devrait concerner tous les jeunes, y compris les femmes”, affirme-t-il, insistant sur l’importance d’ouvrir “le club d’hommes” qu’est actuellement l’armée. Il pourrait ne durer que six mois, l’important étant d’intégrer à nouveau la Bundeswehr au quotidien de presque toutes les familles allemandes.

Avec un service militaire obligatoire universel – et son alternative civile –, les jeunes Allemands pourraient réfléchir plus longuement aux causes défendues par leur armée. Surtout, ils seraient prêts en cas d’éventuelles attaques, alors que la guerre est de nouveau proche, conclut Martin Machowecz :

“Rétablir le service militaire, c’est envoyer un message. Nous aussi, nous sommes prêts à nous battre, corps et âme, en cas d’urgence.”