Des féministes attaquent le concours Miss France aux prud’hommes, qu’elles jugent «sexiste» et «discriminatoire»

Il est peu vraisemblable qu’une décision soit rendue avant le prochain concours, le 11 décembre prochain à Caen.

Des candidates recalées et des féministes attaquent le concours Miss France aux prud'hommes. LP/ Sébastien Blondé
Des candidates recalées et des féministes attaquent le concours Miss France aux prud'hommes. LP/ Sébastien Blondé

    Deux visions du monde s’affrontent. Pour la nouvelle présidente de la société Miss France, Alexia Laroche-Joubert, c’est « un programme féministe ». Pour de nombreuses féministes, c’est un spectacle « sexiste ». Et pour le démontrer, elles ont des arguments à faire valoir. Les jeunes femmes doivent mesurer au moins 1,70 m, être célibataires et « représentatives de la beauté », ce qui fait dire à l’association Osez le féminisme que les critères de recrutement des candidates à l’élection de Miss France sont « discriminatoires ». Elle a donc annoncé ce lundi avoir saisi la justice prud’homale, estimant que ce concours « sexiste » violait le droit du travail.

    L’association, ainsi que trois femmes qui affirment avoir dû renoncer à se présenter au concours car elles ne satisfaisaient pas aux critères exigés par les organisateurs, ont décidé « d’attaquer en justice » la célèbre émission, diffusée chaque année en décembre par TF1.

    La procédure, intentée devant le conseil des prud’hommes de Bobigny, vise les sociétés Miss France et Endemol Production, a précisé l’association dans un communiqué. Endemol « utilise des femmes pour fabriquer un programme audiovisuel extrêmement lucratif tout en bafouant le droit du travail », estiment les requérantes. Les candidates à la couronne de beauté ne signent certes aucun contrat de travail avec les organisateurs du concours. Mais leur relation avec Endemol doit bien s’analyser comme celle liant un salarié à son employeur, affirme l’association, qui s’appuie sur une jurisprudence de 2013, concernant le concours « Mister France ».

    « Caricature archaïque »

    Or le Code du travail interdit, dans un recrutement, tout critère lié « aux mœurs, à l’âge, à la situation de famille ou à l’apparence physique », a expliqué à l’AFP Me Violaine De Filippis-Abate, l’avocate d’ « Osez le féminisme ». En conséquence, les requérantes demandent aux prud’hommes de condamner les organisateurs du concours à supprimer de leur règlement ces clauses discriminatoires, comme celles interdisant de fumer en public, ou de porter des tatouages visibles ou des piercings.

    Au vu de la longueur habituelle de cette dernière, il est peu vraisemblable qu’une décision soit rendue avant le prochain concours, le 11 décembre à Caen, a reconnu Me De Filippis-Abate. Reprenant des arguments brandis depuis plusieurs années par de nombreuses militantes, « Osez le féminisme » impute au concours Miss France « un impact négatif et rétrograde sur l’ensemble de la société ».

    Dans son « rapport annuel sur l’état des lieux du sexisme en France », en 2019, le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes (HCE), une instance consultative chargée de conseiller le gouvernement, avait lui-même qualifié le concours Miss France de « caricature archaïque ». Il avait dénoncé notamment l’exigence faite aux candidates d’être célibataires et sans enfant, et même de ne jamais avoir été mariées.

    Interrogée, la société Miss France a refusé de réagir « dans l’immédiat » à cette procédure.