Marek Halter : « À ceux qui occupent les universités en soutien au Hamas »

Jean-Paul Sartre soutenait avec raison que les moyens employés pour parvenir à un but, si généreux soit-il, le marqueraient inévitablement et pour toujours. Imaginons un Che Guevara en train de torturer un bébé en Bolivie ! Ou de découper un fœtus arraché au ventre d’une mère ! Les jeunes d’aujourd’hui afficheraient-ils encore sa tête sur leurs tee-shirts ?

Les Palestiniens sont un peuple magnifique qui a droit à une patrie

Les Palestiniens sont un peuple magnifique qui a droit à une patrie. J’ai été parmi les premiers à réclamer ce droit et à organiser des rencontres, sur le plan culturel autour des écrivains Amos Oz et Mahmoud Darwich et, sur le plan politique, entre Arafat, Ahmed Qoreï, Shimon Peres et Rabin.

La cause palestinienne mobilise aujourd’hui beaucoup de jeunes gens qui se retrouvent derrière des banderoles, pour certaines inscrites en arabe, langue qu’ils ne comprennent pas, mais qui leur donne l’occasion de narguer l’État considéré comme injuste, même s’ils ne savent pas encore par quoi le remplacer.

En occupant la rue, ils ont l’impression de mettre leurs pas dans ceux de leurs prédécesseurs qui affichaient leur solidarité avec les Algériens, les Vietnamiens, les Chiliens, les Tchèques, les Polonais, les Ukrainiens…

Mais cette fois-ci, il y a un élément supplémentaire, particulier : le Juif. Or, « quand vous entendez dire du mal des Juifs, affirmait Frantz Fanon, dressez l’oreille, on parle de vous ». De vous, jeunes femmes que l’on assassine en Iran et en Afghanistan lorsque vous refusez de dissimuler votre corps sous une burqa ; de vous, homosexuels, emprisonnés et mutilés dans nombre de pays d’Orient ; de vous qui défendez la nature et, par là même, dénoncez la pollution des producteurs de gaz et de pétrole ; de vous, jeunes de gauche, qui souhaitez changer le monde ; de vous, jeunes de droite, qui ne désirez pas qu’il change ; de vous qui aidez les réfugiés qui fuient les nations qui soutiennent le Hamas ; de vous tous qui croyez, ou ne croyez pas, mais qui voulez laisser Dieu de côté parce que, comme le disait Voltaire avec une certaine amertume dans son Traité sur la tolérance, face à ceux qui agissent au nom de Dieu, toute action rationnelle est vouée a l’échec.

Or, vous, les jeunes idéalistes, vous suivez des hommes qui crient : « Allah akbar ! » Ah, si vous acceptiez seulement de relire l’histoire, comme le faisait Périclès avec Homère avant chaque prise de position. Vous auriez appris que les Juifs, il y a trois mille cinq cents ans, ont tué les habitants de Jéricho, parce que polythéistes, que les musulmans ont, au VIIIe siècle, massacré les chrétiens, parce qu’infidèles, et que les rois bien chrétiens ont, à partir du XIe  siècle, annihilé les musulmans au cours de plusieurs croisades au cri de « Dieu le veut ! ».

Méfiez-vous de ceux qui crient « Allah akbar ! »

Méfiez-vous, donc, de manifester aux côtés de ceux qui crient : « Dieu est grand ! » C’est avec ce cri qu’un fanatique décapita il y a trois ans un professeur de la République française, Samuel Paty, devant son lycée à Conflans-Sainte-Honorine, en région parisienne. Et que c’est avec ce même cri qu’un autre fanatique, il y a peu, poignarda Dominique Bernard, un autre professeur de notre République à Arras.

Je prévois, tout en espérant me tromper, que demain, ou d’ici un mois, des synagogues et des écoles juives flamberont en France. Toujours au cri de « Allah Akbar ! ». La Nuit de Cristal, contrairement a ce que pensaient nos parents, est reproductible. La haine qui coule dans nos caniveaux transformera bientôt nos ressentiments en actes.

Et pourtant, pourtant, pour les vrais croyants, il suffit d’ouvrir le Coran pour tomber sur la sourate V-32 où il est dit que tuer un individu, c’est comme tuer l’humanité entière. Or, quelle que soit notre appartenance ethnique ou religieuse, nous en faisons tous partie.

Il y a quelques années, j’ai publié un opuscule intitulé Réconciliez-vous ! Voilà un objectif digne d’une jeunesse qui pense à l’avenir. Particulièrement au moment ou Israéliens et Palestiniens s’entre-tuent là-bas, au Proche-Orient. Hâtons-nous !